Si la libre circulation des armes aux États-Unis a été immédiatement mise en cause, c’est la dimension raciste de l’attentat qui s’est rapidement imposée. Comme Brenton Tarrant, qui avait tué 51 personnes dans deux mosquées de Christchurch (Nouvelle-Zélande) le 15 mars 2019, Payton Gendron n’a en effet pas fait mystère des motivations politiques de ses actes. Il a d’ailleurs publié lui aussi un manifeste, reprenant des éléments de celui de Tarrant. Racisme, islamophobie et antisémitisme imprègnent la logorrhée suprémaciste de Payton Gendron, qui se pose comme un militant « anti-remplaciste » : « C’est un remplacement ethnique. C’est un remplacement culturel. C’est un remplacement racial. C’est le génocide blanc ».
Payton Gendron a donc commis un acte terroriste meurtrier au nom de la lutte contre le « grand remplacement », ce néfaste fantasme complotiste de l’extrême droite identitaire selon lequel un processus de substitution des populations blanches serait à l’œuvre dans les pays occidentaux, progressivement remplacées par des populations « arabo-musulmanes ». Fantasme qui, on le sait malheureusement, n’est plus cantonné aux forums de la fachosphère et aux réunions confidentielles des groupuscules néonazis, mais a désormais pignon sur rue, avec les invitations faites à l’idéologue Renaud Camus et, plus encore, la candidature d’Éric Zemmour et la banalisation de ses thèses identitaires-racistes.
Il existe un continuum raciste et islamophobe au bout duquel on trouve des assassins comme Payton Gendron. Pour le dire simplement : les idées mortifères des Trump et Zemmour tuent. C’est l’une des leçons de l’attentat de Buffalo, n’en déplaisent à ceux qui voudraient l’attribuer à la « folie » de Payton Gendron. Et ce n’est malheureusement pas la première fois que de tels passages à l’acte se produisent, soulignant l’urgence de lutter sans aucune forme de compromis contre les extrêmes droites. Antifascistes, parce qu’il le faut, et tant qu’il le faudra.
Julien Salingue