La décomposition et la crise du régime politique actuel n’ont pas de précédents et sont l’aboutissement d’un sexennat marqué par l’illégitimité, depuis le mouvement « Yo soy 132 » [1], en passant par la campagne pour les 43 d’Ayotzinapa [2] et les cris persistants de « Fuera Peña » [3] et de « C’est l’État [le coupable] ». La crise se reflète dans la crise de légitimité du système politico-électoral, de ses institutions et de tous les partis politiques légaux, ainsi que dans l’absence de légitimité des institutions de justice. La crise s’exprime sur le terrain politico-électoral à cause du manque de crédibilité et du discrédit de tous les partis politiques.La démonstration de l’opportunisme et les accords scandaleux que passent tous les partis pour tenter de maintenir leur contrôle de l’appareil d’État sont révélateurs. Ce n’est pas un hasard si tous cherchent à passer des alliances et à former des coalitions entre eux pour tenter de sauver le système. La candidature de José Antonio Meade du PRI en est l’exemple principal.
Il est représentatif de l’oligarchie néolibérale qui a servi de manière égale les gouvernements du PRI et du Parti d’action nationale [4]. Cependant, les autres partis passent également des alliances avec divers secteurs de la classe dominante qui sont divisés par des intérêts opposés et manquent d’une boussole leur permettant d’assurer la continuité de la domination capitaliste, notamment depuis l’arrivée de Trump à la tête du gouvernement des États-Unis.
Dans ce contexte, la proposition du CIG et la candidature indépendante de Marichuy, bien qu’elle tente d’obtenir la validation légale de sa candidature en récoltant les signatures exigées, est une campagne antisystème, contre le système politico-électoral dans son ensemble. C’est pour cela que Marichuy dit « Je ne cherche pas des votes, je veux tout ». Les calomnies des partisans d’AMLO [5] qui affirment que Marichuy fera perdre des voix, des voix qui manqueront au triomphe du parti Morena, ne comprennent pas que notre campagne ne cherche pas à obtenir des votes pour parvenir au gouvernement (et faire la promesse démagogique qu’en votant pour moi, tout sera résolu), mais cherche à en finir avec le système politique et son actuelle crise et décomposition.
La campagne pour récolter un million de signatures pour la validation de la candidature de Marichuy s’inscrit dans le cadre de cette crise. Les partis actuels, à cause de la crise de crédibilité qui les touchent, ont approuvé le nouveau mécanisme électoral (qui permet de présenter des « candidatures indépendantes ») dans le but de redonner une nouvelle légitimité au système électoral tout en imposant des conditions telles qu’il est impossible de les remplir pour une candidate réellement indépendante portant une vraie alternative comme Marichuy – qui ne peut pas compter sur le soutien de divers secteurs de certains partis, comme El Bronco, Margarita Zavala ou Ríos Piter [6]. Depuis le début, Marichuy a dénoncé le caractère classiste, antidémocratique, raciste et misogyne du processus de validation de sa candidature.
C’est ici qu’il faut rappeler que cette candidature va au-delà d’une campagne électorale. Nous avons récolté des signatures tout en dénonçant le caractère antidémocratique du système. Nous pensons que la lutte représentée par la candidature de Marichuy doit se poursuivre, avec ou sans les signatures, avec la reconnaissance légale de sa candidature ou sans elle. Il s’agit d’une campagne de lutte contre le système politique dans son ensemble. Il faut la maintenir, même sans reconnaissance légale afin d’offrir une alternative extérieure face à la crise du régime et non pas pour le renforcer ou le sauver. C’est cette alternative que représente potentiellement le CIG. La campagne de Morena cherche au contraire à donner une nouvelle légitimité au système politico-électoral en donnant l’illusion d’un changement possible de gouvernement simplement au travers du vote en juillet. La campagne du Marichuy et du CIG (et de toutes les forces qui l’appuient) doit continuer à dénoncer le caractère antidémocratique du système, spécialement face à l’imminence de la fraude électorale qui très certainement imposera le candidat du PRI.
En cela, le CIG représente une option anticapitaliste au milieu de la crise. Il propose sa porte-parole comme candidate indépendante, en affirmant qu’elle ne cherche pas à obtenir des votes mais organise et renforce un Conseil indigène de gouvernement pour l’ensemble du pays face à la fraude en préparation. La rencontre de travailleurs, dans les locaux du SME [7] le 24 janvier, a pour but de créer des ponts avec le CIG pour avancer vers la formation d’un Conseil de gouvernement de la classe travailleuse et du peuple. C’est là que réside l’importance historique de cette rencontre qui pose les bases d’une alliance entre les peuples indigènes et originaires représentés par le CIG et les organisations syndicales et de travailleurs, qui incluent des syndicats combatifs comme le SME et ceux regroupés dans la Nouvelle centrale des travailleurs (NCT), mais aussi d’autres secteurs et mouvements en lutte comme l’Assemblée nationale des usagers de l’énergie électrique (ANUEE) et des organisations comme l’Organisation politique du peuple et des travailleurs [8].
L’alliance ouvrière paysanne et indigène, dans la perspective d’une alliance entre le Conseil de gouvernement indigène et un futur Conseil de gouvernement des travailleurs, se reflétera nécessairement dans la confluence des revendications et des luttes des peuples indigènes qui s’opposent à la dévastation capitaliste de leurs communautés et de leurs peuples, et des revendications des travailleurs en lutte contre les réformes structurelles néolibérales, la violence et la militarisation du pays, les féminicides et les autres fléaux de la phase actuelle du capitalisme. C’est cet enrichissement programmatique, au travers de l’échange des expériences mutuelles, qui peut sortir de cette rencontre. ■
Partido Revolucionario de los Trabajadores
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