Avec 28, 3 % des voix, le parti nationaliste flamand N-VA de Bart De Wever est devenu le premier parti du pays, balayant tous les autres partis flamands, les Verts exceptés. En Wallonie, le PS d’Elio di Ruppo retrouve son niveau « historique » avec 35 % des voix. Très modéré, il profite pourtant des anciens réflexes défensifs du mouvement ouvrier wallon. Partout l’extrême droite a fortement reculé.
Le succès du N-VA, qualifié par les francophones de séparatiste, est considéré par ceux-ci comme inquiétant. Mais en quoi la disparition de la Belgique serait-elle inquiétante ? Pour la monarchie, certainement. Mais aussi pour la sécurité sociale unifiée dont « profite » la Wallonie déshéritée et que De Wever veut remettre en cause. C’est le seul argument sérieux contre le séparatisme.
De Wever pourra-t-il tenir sa promesse d’aller vers la séparation de la Flandre sous la pression du monarque et des partenaires de la coalition gouvernementale ? La bourgeoisie flamande de son côté exige une profonde réforme institutionnelle avant de se prononcer pour la séparation ou pour une autonomie communautaire approfondie avec la Wallonie comme réserve de main-d’œuvre à bon marché.
Pour faire face à la montée de l’extrême droite, les socialistes et les Verts flamands ont réalisé une union sacrée avec les autres partis « démocratiques ». Ils ont cru qu’en défendant l’unité belge, donc avec la Wallonie comme arrière-base, ils pourraient endiguer la marée du VB (ex-Vlaams Blok), mais cette collaboration de classe a, au contraire, renforcé l’impact de la démagogie populiste.
La pusillanimité de cette union sacrée pour l’unité de la Belgique a attisé le nationalisme flamand. Cette question est devenue la question politique par excellence dans un État qui n’est pas une nation. Depuis la naissance de la Belgique, la politique culturelle francophone de la bourgeoisie et de l’aristocratie a tué la possibilité de la formation d’une nation avec deux communautés linguistiques. Cette mentalité anti-flamande n’est pas morte, comme le prouve le quotidien belgiciste et monarchiste la Libre Belgique, qui souligne méchamment que De Wever adore la culture allemande et parle mieux l’allemand que le français (oubliant que l’allemand est la troisième langue du royaume). Après un long combat, et cela sans l’appui de la social-démocratie, les Flamands ont obtenu des droits démocratiques concernant l’emploi des langues et l’ouverture de l’éducation pour leurs enfants.
Aujourd’hui, La Flandre est devenue plus riche que la Wallonie qui a perdu sa base industrielle. L’idée s’est imposée en Flandre que la crise actuelle est aggravée par les demandes sociales des francophones. Il n’en est rien, mais vu la politique néolibérale de la gauche, la mayonnaise a pris.
La question socio-économique se traduit sur le plan politique à travers la question communautaire, bien réelle, qu’on le veuille ou non. Les structures institutionnelles détermineront le taux de plus-value que le patronat pourra extorquer au salariat. La gauche ne peut pas ne pas en tenir compte, ni dans les élections ni dans les luttes syndicales. La négliger reviendrait à laisser le terrain libre à la droite. Cela dit, le mouvement ouvrier wallon a tout intérêt à rejeter son attachement à une Belgique monarchiste.
Hendrik Patroons
* Paru dans Hebdo TEAN 61 (24/06/10).
BELGIQUE–FRONT DES GAUCHES : BILAN POSITIF ET APPEL À LA MOBILISATION SOCIALE
COMMUNIQUÉ DU FRONT DES GAUCHES
Le Front des Gauches remercie les électrices et électeurs qui lui ont apporté leur suffrage et tire un bilan positif de sa campagne. En moins d’un mois, le Front des Gauches, réunissant six organisations (Parti Communiste, Parti Socialiste de Lutte/Linkse Socialistische Partij, Ligue Communiste Révolutionnaire, Parti Humaniste, Comité pour une Autre Politique et Vélorution) et des militants d’ouverture, a réussi à élaborer une première plateforme commune face aux crises sociale, écologique, économique et politique, à déposer des listes complètes et à se faire connaître comme une force de gauche active, plurielle et radicale.
Quoique son score soit encore modeste, le Front des Gauches a reçu de nombreux encouragements de la population, a été bien accueilli dans les mouvements sociaux, notamment syndicaux, et a été soutenu par des personnalités connues pour leur engagement dans les luttes en faveur d’une autre société. Ce succès est un point de départ pour la construction d’une alternative de gauche face au PS et à Ecolo.
Avec l’aide des gouvernements et de l’Union européenne, les marchés financiers ont lancé une gigantesque offensive internationale. Leur but est de balayer ce qui reste de « l’Etat providence » pour accroître drastiquement l’exploitation des travailleurs et soumettre totalement à la logique du profit la gestion des ressources, humaines et naturelles. La sécurité sociale, la santé, les pensions, les conditions de travail et les services publics sont plus que jamais dans le collimateur. Le chantage à l’emploi et la chasse aux chômeurs risquent de redoubler d’intensité. Les femmes, les jeunes et les immigrés sont spécialement menacés. Dans le domaine environnemental, rien de sérieux n’est fait pour enrayer le changement climatique dont les pauvres sont les principales victimes. Au lieu de combattre cette politique, tous les politiciens traditionnels de droite comme de la soi-disant gauche l’embrassent. Le PS et Ecolo se préparent à la gérer, faisant ainsi le jeu de l’extrême droite, des populistes et de tous ceux qui veulent encore plus « diviser pour régner » dans l’espoir de faire passer sur le plan régional les mesures d’austérité qu’ils ne réussissent pas à faire passer sur le plan fédéral.
Les milieux patronaux ont déjà adressé leurs exigences au prochain gouvernement : un nouveau plan d’austérité de 22 milliards, la suppression de 70.000 emplois dans la fonction publique, une attaque contre les pensions. Le Front des Gauches appelle à la mobilisation sociale la plus large, la plus unitaire et la plus déterminée, par-delà les frontières linguistiques et nationales, pour empêcher que la population laborieuse, qui a déjà payé pour sauver les banques, ne doive payer une seconde fois.
Le nombre croissant d’électeurs/trices qui ont boudé les urnes ou ont exprimé un vote blanc témoigne de l’impopularité de la politique néolibérale menée par les quatre partis traditionnels. Cependant, dans le mécanisme électoral actuel, ces refus de vote ne sanctionnent pas les partis traditionnels mais au contraire les confortent. Le Front des Gauches s’adresse à ces électeurs/trices mécontents en les invitant à rejoindre notre combat pour une alternative de gauche aux partis traditionnels qui gèrent la crise sans remettre en cause le système.
Pour le Front des Gauches, la construction d’une alternative à gauche du PS et d’Ecolo n’a jamais été aussi nécessaire et urgente. Dans les semaines et les mois qui viennent, les composantes du Front des Gauches s’efforceront de relever le défi en consolidant et en élargissant leur alliance. Dès à présent, le Front des Gauches lance un appel à toutes les forces luttant de façon décidée contre la dictature de la finance, l’injustice sociale, la guerre, le racisme, le sexisme et le productivisme capitaliste qui détruit l’environnement : par nos actions communes, avançons vers la constitution de la force politique nouvelle dont les exploité-e-s et les opprimé-e-s ont besoin. Tous ensemble contre leurs crises, tous ensemble dans la résistance, tous ensemble pour une alternative au capitalisme !
Contacts :
Pierre Eyben, Parti Communiste,
Céline Caudron, Ligue Communiste Révolutionnaire, 0474/916.459
Anja Deschoemacker, Parti Socialiste de Lutte, 0473/922.833
Gilles Smedts, Parti Humaniste, 0497/542.741
Frans Leens, Comité pour une Autre Politique, 0497/592.210
Reginald de Potesta de Waleffe, Vélorution, 0472/500.190