La stabilité politique du régime repose largement sur l’interdiction de toute organisation qui ne soit pas étroitement contrôlée par le Parti communiste. Cette règle s’applique en premier lieu aux deux grandes « organisations de masse » nationales : la confédération syndicale ACFTU et la Fédération pan-chinoise des femmes (ACWF) [2].
LA CONFÉDÉRATION SYNDICALE PAN-CHINOISE - ALL CHINA FEDERATION OF TRADE UNIONS (ACFTU)
Au niveau national, l’ACFTU est la seule confédération syndicale légale en Chine. D’après la loi, la création de syndicats à un niveau inférieur est soumise à l’accord de la direction de l’ACFTU. Toute tentative de fonder un syndicat indépendant est illégale et passible de poursuites judiciaires. L’ACFTU est légalement tenue d’accepter « la direction du parti ». Il n’existe aucun mécanisme démocratique interne, laissant ainsi les adhérents sans aucun moyen de s’exprimer [3].
Avant l’introduction de l’économie de marché, l’ACFTU était connue pour ses positions productivistes liées au rôle dévolu au syndicat dans la « construction du socialisme », ce qui signifiait que l’ACFTU considérait que sa première mission était avant tout d’aider la direction de l’entreprise à rendre les salariés plus productifs. Depuis les années 1980, la politique socioéconomique du Parti communiste chinois a connu de profonds changements et les directions d’entreprise, dans le secteur public comme dans le privé, ont maintenant la possibilité de licencier les salariés.
Les positions productivistes de l’ACFTU n’ont cependant pas changé, bien qu’elles soient maintenant davantage au service de la « construction capitaliste » que de la « construction socialiste ». Les syndicats locaux de l’ACFTU sont devenus des partenaires des directions d’entreprise. Par exemple, un cadre subalterne coréen de la Korean Beijing Modern Car Company a fait l’éloge du syndicat local de l’ACFTU, non pas pour avoir défendu les intérêts des salariés, mais pour avoir permis de les faire travailler de nuit peu de temps après l’inauguration de l’usine, à une époque où il n’y avait pas assez de main-d’œuvre.
Dans le secteur privé, il n’est pas rare que les présidents des syndicats locaux de l’ACFTU soient les patrons ou les cadres supérieurs de l’entreprise. Les syndicats locaux existent seulement sur le papier. Nous n’avons jamais entendu de cas où un syndicat local de l’ACFTU ait soutenu des travailleurs en lutte contre la direction. Dans le cas du conflit de Gold Peak [4], la direction locale de l’ACFTU ne fit absolument rien pour aider les salariés à connaître la vérité sur l’empoisonnement par le cadmium.
LA FÉDÉRATION PAN-CHINOISE DES FEMMES - ALL CHINA WOMEN’S FEDERATION (ACWF)
Elle est supposée protéger les femmes du sexisme et de toutes formes d’oppression spécifique des femmes. Malheureusement, elle est autant acquise à l’establishment que l’ACFTU. Comme l’ACFTU, cette organisation est la seule association de femmes autorisée par le PC chinois. Elle a rarement protesté contre les conditions inhumaines que les femmes sont contraintes d’endurer dans les zones franches. Elle va, comme l’ACFTU, dans le sens des directions d’entreprise. À l’usine de chaussures Anjia, par exemple, une usine qui appartient à des capitaux taiwanais, une quarantaine de ses salariées ont été empoisonnées par des produits chimiques en fabriquant des chaussures. Lorsque des salariées se sont tournées vers l’ACWF pour obtenir de l’aide, celle-ci passa un accord avec la direction de l’entreprise accordant des compensations bien inférieures à celles prévues par la loi.