Le nouveau traité européen n’a rien du « traité simplifié » promis
par Nicolas Sarkozy. Avec plusieurs centaines de pages, des dizaines
de déclarations et de protocoles, il n’est pas non plus un « minitraité »
se réduisant aux aspects institutionnels. Il est marqué,
comme le TCE, de bout en bout par le néolibéralisme, tant dans
les principes qu’il promeut que dans les politiques qu’il prône.
Nicolas Sarkozy ait obtenu que l’expression
« concurrence libre et non faussée »
n’apparaisse pas comme un objectif de
l’Union européenne. Il s’agit d’une avancée
en trompe l’oeil.
La concurrence au cœur du traité
En effet, le principe de concurrence reste
présent dans nombre d’articles des traités.
Citons par exemple l’article 105 du projet
de Traité sur le fonctionnement de l’Union
européenne, qui affirme « le principe d’une
économie de marché ouverte où la concurrence
est libre ».
De plus, pour éviter toute fausse interprétation,
et sur exigence du Royaume-Uni, le
protocole n° 6 indique : « le marché intérieur
tel qu’il est défini à l’article [I-3] du
traité sur l’Union européenne comprend un
système garantissant que la concurrence
n’est pas faussée ». Or, cet article [I-3]
porte sur les objectifs de l’Union. C’est
ainsi que la concurrence non faussée est
réintroduite là où elle semblait avoir disparu.
Statut et missions de la Banque centrale
européenne (BCE) inchangés, services
publics toujours soumis aux règles de la
concurrence, libre-échange généralisé
comme seul objectif de la politique commerciale,
politique industrielle réduite à
l’application du droit de la concurrence,
etc. On pourrait allonger la liste. Le droit
de la concurrence reste le droit organisateur
de l’Union et ce malgré l’existence de
la Charte des droits fondamentaux.
En effet, les droits sociaux qui y sont
contenus sont de très faible portée. Par
exemple, le droit au travail et à l’emploi
n’existe pas et seul apparaît le « droit de
travailler ». Mais surtout, pour l’essentiel,
l’application des droits contenus dans cette
Charte est renvoyée aux « pratiques et
législations nationales ». Cette charte ne
crée donc pas fondamentalement de droit
social européen susceptible de rééquilibrer
le droit de la concurrence qui restera dominant
à l’échelle européenne.
Le social est en option
Malgré toutes ces précautions, ce texte est
encore de trop pour certains gouvernements.
Le Royaume-Uni et la Pologne ont
obtenu d’en être dispensé. Ainsi, les droits
sociaux au niveau européen, même réduits
à la portion congrue, ne sont pas obligatoires
au même titre que les règles du marché
intérieur. Le social est en option et la
concurrence obligatoire. C’est l’officialisation
du dumping social.
Ce sont eux
qui le disent !
"Les gouvernements
européens se sont ainsi
mis d’accord sur des
changements
cosmétiques à la
Constitution pour qu’elle
soit plus facile à avaler."
Valéry Giscard
d’Estaing, devant la
commission des
Affaires
constitutionnelles du
Parlement
européen, 17/06/07.
"C’est essentiellement
la même proposition
que l’ancienne
Constitution."
Margot Wallstrom,
Commissaire européen,
Svenska Dagbladet,
26/06/07.
"Le but du Traité
Constitutionnel était
d’être plus lisible… Le
but de ce traité est
d’être illisible… La
constitution voulait être
claire alors que ce traité
devait être obscur. C’est
un succès."
Karel de Gucht, ministre
belge des Affaires
étrangères, Flandre
info, 23/06/07.