Quatre mois après la répression du mouvement de protestation conduit par des moines bouddhistes, la Birmanie est confrontée à une vague d’attentats, et le pouvoir birman fait face à la dégradation de ses relations avec la communauté internationale.
Le 16 janvier, un chauffeur a été tué par l’explosion d’une bombe dans son autocar au nord-est de Rangoun. Le 13 janvier, une femme a été blessée par un engin explosif posé dans une gare de Rangoun. Le 12 janvier, un homme, décrit comme le poseur de bombe, a été tué et quatre personnes blessées. Et le 11 janvier, une femme a été tuée par l’explosion d’une bombe à la gare de Pyinmana, localité du centre du pays qui dessert la nouvelle capitale, Naypyidaw.
Ces événements font suite aux onze morts recensés par les autorités en décembre 2007 dans deux attaques contre des autocars dans l’est du pays. Ces attentats n’ont pas été revendiqués, mais le régime militaire accuse les rebelles de l’Union nationale Karen (KNU), groupe ethnique minoritaire en lutte contre le pouvoir central.
Des opposants, réfugiés en Thaïlande, et des ambassades occidentales à Rangoun expriment des réserves sur la stigmatisation des Karens. Ces sources s’interrogent sur le rôle éventuel des généraux birmans dans ces violences révélées par la presse officielle.
Le seul acte de résistance identifié, à ce jour, est apparu, mi-janvier, après la découverte de messages d’amour codés publiés, à son insu, par la presse officielle. La censure militaire a ouvert une enquête sur ces textes qui dénoncent le général à la tête de la junte.
Les ministres des affaires étrangères américain, britannique et français, réunis au forum économique de Davos, ont dénoncé, le 24 janvier, l’absence d’évolution du régime birman dans le domaine des droits de l’homme.
Ils ont également appelé au respect des sanctions internationales. Plus de 1 500 lots de pierres précieuses et de jade ont été vendus, mi-janvier, lors d’une vente organisée par la junte en dépit de l’appel au boycottage.
La Birmanie « régresse sur tous les fronts », a analysé, le 21 janvier, le sous-secrétaire d’Etat adjoint américain, Scot Marciel, appelant les pays de la région à faire pression sur la junte.
L’émissaire de l’ONU pour la Birmanie, Ibrahim Gambari, n’a pas été autorisé à retourner dans le pays depuis son expulsion début décembre. La Birmanie refuse également de délivrer des visas à Bernard Kouchner, le chef de la diplomatie française, et à Rama Yade, la secrétaire d’Etat aux droits de l’homme.
Jacques Follorou
* Article paru dans le Monde, édition du 30.01.08. LE MONDE | 29.01.08 | 17h17 • Mis à jour le 29.01.08 | 17h17.
L’opposante birmane Aung San Suu Kyi autorisée à quitter sa résidence surveillée à Rangoun
LEMONDE.FR avec AFP et Reuters | 30.01.08 | 12h07 • Mis à jour le 30.01.08 | 12h33
L’opposante birmane Aung San Suu Kyi, assignée à résidence surveillée pendant la majeure partie des dix-huit dernières années, a été autorisée par la junte birmane à quitter son domicile, notamment pour s’entretenir avec des membres de son parti, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), dans une résidence gouvernementale. C’est seulement la deuxième fois depuis 2004 qu’elle reçoit l’autorisation de rencontrer des responsables de la LND.
Elle a également rencontré le ministre du travail de la junte, chargé depuis octobre 2007 de nouer des relations avec elle. Selon un porte-parole de Mme Suu Kyi, celle-ci ne serait « pas satisfaite » de ses entretiens avec le ministre, « principalement parce qu’il n’y a pas de calendrier » dans le processus proposé par la junte.
LES ARRESTATIONS D’OPPOSANTS SE POURSUIVENT
Depuis la fin du mouvement de protestation emmené par les bonzes, en septembre, les autorités birmanes multiplient les gestes pour tenter d’établir un dialogue avec l’opposante historique, jusqu’à présent sans succès. L’envoyé spécial de l’ONU, Piero Fassino, a ainsi été autorisé à rencontrer Mme Suu Kyi à quatre reprises, afin d’essayer de favoriser un « vrai dialogue » entre « la junte, l’opposition et les différents segments de la société birmane ».
Si la junte militaire affirme que la situation en Birmanie est sous contrôle depuis la fin du mouvement de protestation des bonzes, en septembre 2007, les arrestations d’opposants se poursuivent. Dix personnes, dont d’anciens leaders étudiants arrêtés en août, ont notamment été inculpés par les autorités. Par ailleurs, un blogueur birman, membre du LND, a été arrêté à Rangoun pour ne pas avoir respecté les contrôles numériques imposés par le régime, selon un porte-parole du parti. Lors du mouvement de protestation de septembre, beaucoup de témoignages, de photographies et de vidéos avaient été réalisés par les blogueurs.