Belle soirée à la LCR, « le plus gros des petits »
Dépêche Reuters par Julien Toyer.
PARIS (Reuters) - Dans la salle louée par la Ligue communiste révolutionnaire à proximité de son siège et QG de campagne, les « anciens », ceux de Mai 68, côtoient de très jeunes militants, dont les plus vieux n’affichent guère plus de 25 ans.
Environ 400 personnes, en majorité des militants et sympathisants de la LCR et quelques curieux, ont salué à Montreuil, en banlieue parisienne, le résultat d’Olivier Besancenot, « le plus gros des petits ».
Quelques jeunes des banlieues ont fait le déplacement. Au menu du buffet : salade de riz, gâteaux maison et bière et vin bon marché.
Impatients de découvrir le score de leur candidat, les militants ont entonné pendant une heure des « partagez le travail, partagez les richesses ou ça va péter » et des « Sarkozy au karcher ».
Quelques minutes avant 20h00, certains n’en peuvent plus et se lèvent. Tension et silence quasi religieux lorsque le score des quatre candidats arrivés en tête s’affiche.
Celui de Jean-Marie Le Pen est salué par quelques applaudissements et un « Et F comme fasciste, et N comme Nazi, à bas le Front national », qui réjouit tout le monde.
Stéphane, 25 ans, qui habite Montreuil et est venu en curieux, se dit « plutôt rassuré par ces résultats après ceux du 21 avril ». La seule chose qu’il ne voulait pas c’est un « match Sarko-Le Pen ».
Puis viennent les résultats d’Olivier Besancenot, à plus de 4%. Tonnerres d’applaudissements. Arlette Laguiller et Marie-George Buffet recueillent quelques sifflets.
« UNE VICTOIRE A NOTRE ECHELLE »
Olivier, producteur, et Mr R, rappeur, du 94 et du 77, se disent contents des résultats parce qu’ils « correspondent à (nos) prévisions ».
Ils disent avoir suivi la campagne et être des sympathisants de la LCR « parce que Besancenot dit aux gens des choses qui leur parlent ».
« Sarko a mangé Le Pen », se réjouit Olivier. « Pour Besancenot, c’est bien parce que c’est le plus gros des petits », ajoute-t-il.
Daniel Bensaïd, professeur de philosophie et militant de la LCR, estime que la seule position « valable » est « de rester indépendants ».
« A l’heure actuelle, après ces très bons résultats, le rapport de force est plutôt favorable dans la perspective d’une force unifiée à la gauche de la gauche », affirme-t-il.
« Mais avant toute discussion, il y a une clarification nécessaire en ce qui concerne la position qui sera finalement adoptée par les différentes composantes face aux majorités électorales à venir. Le PC, notamment, a un vrai choix à faire ».
Yoann, 23 ans, animateur dans un centre de loisirs de la région parisienne et militant à la LCR depuis l’entre-deux tours de 2002, estime qu’il s’agit d’« une victoire à notre échelle ».
« Ces 1,7 million d’électeurs sont le résultat des campagnes et des luttes des trois dernières années, le ’non’ au référendum européen, la crises des banlieues, le CPE », dit-il.
« Ségolène Royal n’a pas fait une campagne convaincante et elle va devoir prendre un virage à gauche si elle veut gagner face à Sarkozy au second tour. Pour moi, cette élection marque la fin d’un cycle à gauche et la fin du PC. Pour la LCR, c’est le début ».
A Montreuil, le camp de Besancenot fête son score et conspue Sarkozy
Dépêche AFP par Daphné BENOIT.
MONTREUIL (AFP) - Souriants, les militants du candidat LCR Olivier Besancenot fêtaient dimanche soir à Montreuil, en Seine Saint-Denis, le score du grand gagnant de l’extrême-gauche dans une ambiance bon enfant, tout en affichant déjà la couleur pour le deuxième tour : faire barrage à Nicolas Sarkozy à tout prix.
Lorsqu’ils découvrent les premières estimations sur les écrans géants du Palais des Congrès de la ville, les 400 partisans du jeune postier laissent éclater leur joie dans un tonnerre d’applaudissements : leur candidat est crédité de 4,6% de voix.
« Partage du temps de travail, partage des richesses, ou bien alors ça va péter ! », entonne à 20H00 un public composé d’une écrasante majorité de jeunes dans une salle tapissée d’affiches bardées du slogan de campagne de leur candidat : « Nos vies valent plus que leurs profits ». « C’est pas mal dans l’atmosphère du vote utile. On était tellement stressés, on avait peur d’un deuxième tour Sarko-Le Pen », s’exclame Michelle, 54 ans. « Maintenant il faut battre Sarkozy à tout prix ».
Une deuxième acclamation parcourt la salle à la vue du net recul du candidat du Front National, Jean-Marie Le Pen, crédité de quelque 11% de voix.
« C’est la meilleure nouvelle de la soirée », se réjouit Yves, 30 ans.
Dimanche soir, l’ennemi, pour les partisans de la LCR, c’est désormais Nicolas Sarkozy.
L’hostilité envers le candidat UMP est palpable : à l’annonce de sa qualification au deuxième tour, les militants se lèvent devant la télévision et scandent tour à tour pendant de longues minutes « Sarko, facho, le peuple aura ta peau ! », « Sarkozy au Kärcher, qui sème la misère récolte la colère ».
« Le score de Besancenot est clairement positif, c’est le candidat de la gauche anti-libérale qui a tiré son épingle du jeu », se félicite Benjamin, 25 ans, professeur de mathématiques et militant.
« En plus, Le Pen a perdu des voix. Mais on voit bien que c’est Sarkozy qui les a récupérées. La droite dure a cartonné, donc maintenant la priorité absolue c’est de faire barrage à Sarko », martèle-t-il.
« J’ai un sentiment mitigé. D’un côté, on a fait un bon score après une campagne très réussie. En même temps, je suis désespérée de voir que Nicolas Sarkozy a obtenu 30%. Mais il n’a pas encore gagné », soupire Mélanie, 28 ans.
« Je ne me pose même pas la question, je vote Royal au deuxième tour, même à contrecœur », lance Bénédicte, étudiante en droit.
« Le deuxième tour prend l’allure d’un référendum anti-Sarkozy », a estimé dimanche soir M. Besancenot. « C’est pourquoi ce soir, je lance un appel à battre la droite dans la rue comme dans les urnes », a indiqué M. Besancenot. « Dans la rue, il faut que le 1er mai prochain, il y ait un maximum de manifestations en France contre les lois anti-sociales et liberticides de Nicolas Sarkozy, qui a largement chassé sur les terres du Front national », a-t-il précisé.
Olivier Besancenot appelle à « battre la droite » le 6 mai
Dépêche AP : Le candidat LCR Olivier Besancenot a invité ses électeurs du premier tour à reporter leur voix sur Ségolène Royal au second tour. « Je lance (...) un appel à battre la droite dans la rue comme dans les urnes », a-t-il déclaré dimanche soir.
« Le deuxième tour prend l’allure d’un référendum anti-Sarkozy », a-t-il ajouté par la suite, appelant à voter « contre cette droite brutale, contre Nicolas Sarkozy ».
Le candidat trotskiste à l’Elysée a confié sa « fierté » et sa « joie » d’avoir obtenu dimanche les suffrages de « 1.800.000 électeurs », soit « 50% de plus qu’en 2002 ». Il y a trouvé un « encouragement précieux (...) pour les luttes de demain ».
« Personne n’est propriétaire de ses voix et chacun et chacune est évidemment libre de son vote le 6 mai », a noté Olivier Besancenot.
« Mais depuis plus de cinq ans, la LCR combat la politique de Chirac et de ses Premiers ministres dans la rue comme dans les urnes. C’est pourquoi ce soir je lance de nouveau un appel à battre la droite dans la rue comme dans les urnes ». AP
Besancenot, seul rescapé
Eric Hacquemand
Le Parisien , lundi 23 avril 2007.
POUR Olivier Besancenot, c’est « un moment de joie et de fierté ». Certes, le candidat de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) n’atteint pas la barre symbolique des 5 %. Avec environ 4,1 % des voix, il retrouve presque son score de 2002 (4,25 %) mais, surtout, il endosse le maillot jaune des partis à la gauche du PS.
Tandis que Marie-George Buffet et Arlette Laguiller s’effondrent, lui résiste. Fort de ce résultat, il a appelé à « battre Nicolas Sarkozy dans les rues et dans les urnes » au second tour. 20 heures passées de quelques secondes, c’est l’explosion de joie au QG de campagne de Besancenot, à Montreuil (Seine-Saint-Denis), où sont rassemblées 400 personnes : jamais un candidat de la LCR n’a obtenu autant de suffrages à une présidentielle - environ 1,7 million de voix. Alain Krivine, l’historique fondateur de l’organisation trotskiste, explique : « Malgré le chantage au vote utile martelé depuis des semaines par le PS, on fait mieux que résister. » François Sabado, directeur de campagne, et surtout dirigeant le plus proche de Besancenot, est ému et voit dans le résultat de son poulain « l’aboutissement d’un long travail ».
Un appel à la création « d’une grande force anticapitaliste »
Au coin du bar, à table ou dans le hall du palais des Congrès, les militants partagent tous la même satisfaction d’« avoir mené une super-campagne ». « On a été stressés avec les parrainages, on a pris du retard avec les divisions de la gauche antilibérale... mais aujourd’hui Besancenot montre la pertinence de notre choix : 100 % à gauche et clairement indépendant du PS », se félicite Julien, 24 ans, étudiant. Sur grands écrans, les scores des autres petits candidats défilent. « Bové, 1 %, il n’a plus qu’à rentrer dans sa ferme... Laguiller 2 %, c’est un peu injuste... Buffet, 2,4 %, cette fois les carottes sont cuites pour le PC », commente Frédéric, 36 ans, qui filme la scène. Lorsque la candidate PC appelle « à voter Ségolène Royal le 6 mai », elle est conspuée : « Nous, on trouvera une autre formule... », lâche Sabado. Dans sa déclaration, Besancenot, sourire aux lèvres, ne donne effectivement aucune consigne de vote en faveur de la candidate socialiste. Estimant que « personne n’est propriétaire de ses voix », le candidat affirme pourtant que la LCR « sera du côté de ceux et de celles qui veulent empêcher Sarkozy d’accéder à la présidence de la République ». Pour autant, poursuit-il, « la LCR ne se situe pas en soutien de Ségolène Royal » qu’il n’hésite pas à égratigner dans son discours. Fort de son nouveau statut de leader, il compte bien participer à la recomposition de la gauche de la gauche sur une ligne d’indépendance vis-à-vis du PS. Appelant à la création « d’une grande force anticapitaliste », Besancenot a estimé nécessaire que Royal ait, si elle est élue le 6 mai prochain, « une opposition à sa gauche ».