PSA : un air de déjà-vu
PSA ne sera pas Michelin ni Renault Vilvoorde. Et Hollande ne s’inclinera pas comme Jospin l’avait fait en son temps... Pourtant, rien n’est moins sûr. « Je considère qu’il y a eu mensonge […] L’État ne peut pas rester indifférent et ne laissera pas faire. Le plan doit être renégocié ». Mais c’est pour mieux reconnaître que le gouvernement ne pourra pas empêcher la fermeture d’Aulnay !
En fait les seules mesures envisagées consistent une nouvelle fois à verser des aides à la reconversion. PSA ne manque pourtant pas de moyens : des milliards de bénéfice accumulés ces dernières années, encore 240 millions d’euros versés aux actionnaires de PSA l’année dernière. Mais ce serait aux contribuables de payer. Tout en profitant de la conférence sociale pour légitimer le discours patronal de la « compétitivité des entreprises » et du « coût du travail » qui justifient… ces fameuses réductions d’effectif et les licenciements !
En réalité, lorsque les intérêts généraux de la bourgeoisie l’exigent, l’État n’a jamais hésité dans le passé à prendre des mesures autoritaires, de salut public, pour régenter l’économie privée. Si le gouvernement théorise son impuissance et dit ne pas pouvoir empêcher les licenciements, c’est parce que l’intérêt général de la bourgeoisie aujourd’hui est de mener une véritable guerre sociale contre les travailleurs pour redresser ses profits.
Mais les travailleurs, eux, peuvent beaucoup pour eux-mêmes : en faisant converger les résistances et les luttes, à partir des centaines d’entreprises où sont annoncés des « plans sociaux », sans oublier la fonction publique où les réductions d’effectif sont massives. En imposant l’interdiction des licenciements, une revendication qui acquiert sa véritable signification au fur et à mesure que le rapport de forces se modifie tout en donnant d’emblée un objectif à cette convergence. En faisant le lien avec la nécessité de réduire le temps de travail pour donner du travail à tous, contrôler les livres de comptes pour savoir où est l’argent, et quels sont les plans réels des actionnaires au-delà des discours de façade.
Un programme ambitieux certes. Mais y en a-t-il d’autres possibles en ces temps de crise ?
PSA : D’Aulnay à Rennes, la riposte s’organise
Jeudi 12 juillet, la direction de PSA officialisait, en les aggravant les projets de suppression d’emplois révélés par la CGT l’an passé. Plus surprenant, les commentaires de la presse et des dirigeants politiques et syndicaux : tout le monde semblait découvrir le plan de PSA ! À Aulnay, cela fait plusieurs années que la fermeture était mise en œuvre : départ de productions, suppressions d’équipes, non-investissement dans la modernisation des chaînes, la rumeur faisait son boulot de sape.
À l’annonce officielle du plan, la situation est confuse. Anticipant des mouvements de colère, la direction autorise les salariés à informer leur famille avec une « pause » d’une heure pour couper l’herbe sous le pied à toute forme de grève sauvage difficile à maîtriser. Les discussions montrent un mélange de colère et de résignation, de volonté de riposte et de fatalisme. La hiérarchie se garde bien de pousser à la reprise du travail. De ce fait, le rassemblement initialement prévu au changement équipe s’est étalé sur la plus grande partie de la journée. Au plus fort de la journée, il y avait environ 5 à 600 salariés de PSA et une centaine de soutiens extérieurs (CGT 93, UL Roissy, Renault Cléon, Sandouville, Ford, PSA Saint-Ouen, etc.). Seuls des responsables syndicaux et politiques étaient présents, Marie-George Buffet, député de la circonscription, et Philippe Poutou.
Vers 14 heures, Jean-Pierre Mercier de la CGT critique point par point les arguments de la direction. À la suite, interventions tristes des CGC, CFDT et SIA sur le thème : c’est dégueulasse, ils annoncent ça la veille des vacances et cela va nous les gâcher, profitons de ces congés pour réfléchir... Seul le représentant de SUD prononce le mot « grève ». Pour conclure, intervention très déterminée de Philippe Julien de la CGT : « Nous ne nous laisserons pas faire, nous nous battrons et nous ôterons l’envie à PSA de fermer une usine ». En même temps, une longue tirade contre la « grève immédiatement » dont, selon lui, s’accommoderait la direction dans sa politique de réduction de l’activité et de suppression d’une équipe. La seule perspective précise est une assemblée générale, le 11 septembre, préparée par la constitution d’un comité de mobilisation ouvert aux syndiqués et non-syndiqués. Le NPA était représenté par une vingtaine de camarades et Philippe Poutou, chaleureusement salué par les salariés de l’usine, a pu s’exprimer devant de nombreux médias présents.
Vendredi 13 juillet, à l’usine de La Janais, près de Rennes, après un débrayage à 200 la veille, des militants CGT sont passés dès 7 heures du matin sur les chaînes pour convaincre leurs collègues d’arrêter le travail. À 11 heures, à l’appel de l’ensemble des syndicats, plus de 1 000 salariés ont cessé le travail. L’annonce des 1 200 suppressions de postes sur le site a déclenché colère et désarroi. La CFDT s’est fait huée avec son discours soporifique « partons tranquillement en vacances et on en reparle à la rentrée », « laissons travailler les experts »... La CGT est plus offensive, dénonçant, le salaire du PDG, les dividendes versés aux actionnaires, les profits engrangés par PSA. Cela s’est terminé par des applaudissements et des appels à l’unité, le fameux, « tous ensemble », mais la tension était palpable. Les ouvriers ne croient pas aux promesses de reclassement, pas plus qu’aux prétendus « départs volontaires », et n’envisagent pas non plus d’aller travailler à Poissy : « il y a suffisamment de chômeurs sur place ».
Une centaine de personnes (CGT, FO, LO, NPA) était venus soutenir les salariés. Les grilles de l’usine avaient été fermées pour empêcher tout contact. Les anciens intérimaires venus soutenir ceux qui sont en sursis ont dit aux gardiens : « quand on venait travailler, vous nous laissiez entrer ! »
Partout, la mobilisation doit se développer avec l’appui des populations, des organisations politiques, syndicales et associatives locales.