Avant même le retour en masse des oiseaux migrateurs, une certitude se dessine : une première manche est en train d’être perdue contre la grippe aviaire. L’épidémie, limitée en Asie du Sud-Est, est en train de se transformer sous nos yeux en épizootie mondiale. L’Europe, mais surtout l’Afrique de l’Ouest, sont autant de nouveaux territoires où grippes aviaire et humaine pourront se rencontrer, et peut-être se recombiner, pour donner naissance à un nouveau virus grippal humain très dangereux.
Abattage rapide et systématique assorti d’une compensation immédiate et transparente, quarantaine, vaccination animale de masse : des propositions ont été formulées par les autorités vétérinaires mondiales. Les budgets internationaux n’ont pas suivi. Les États autoritaires, où l’importance de la corruption n’a d’égal que la destruction des systèmes de santé et de contrôle vétérinaire sous les injonctions du FMI, ont fait le reste.
Cela n’aurait peut-être pas suffi à éviter une diffusion mondiale, mais quelques années auraient pu être gagnées, très importantes, pour préparer la lutte contre une nouvelle grippe humaine.
La lutte contre l’épidémie de grippe aviaire est une chose trop importante pour être laissée aux seules forces du marché. Un seul exemple : on nous parle d’un vaccin, qui pourrait être disponible trois mois après le début de la pandémie. Mais on oublie souvent de dire que les capacités de production mondiale de vaccin antigrippal ne sont que de 300 millions de doses : le secteur de la vaccination n’est pas un secteur très rentable. Nous sommes plus de six milliards d’humains. Cherchez l’erreur, et qui n’aura pas droit à la vaccination !
Le mouvement ouvrier et le mouvement altermondialiste doivent se saisir de la question de la grippe aviaire pour produire - avec les experts, car le sujet est complexe - leurs propres exigences. Soyons sûrs qu’une épidémie de grippe aviaire ne serait pas qu’une crise sanitaire. Elle serait aussi une crise politique, révélant, malgré tous les discours, l’incapacité du marché à faire face à l’urgence mondiale.