Il y a presque un an, en août 2008, le Pakistan était au bord du défaut de paiement. Ses réserves de change, fondant rapidement au rythme de 250 à 330 millions de dollars chaque semaine, atteignaient un plancher de 4 milliards de dollars, soit à peine de quoi couvrir un mois d’importations. La dette et les obligations pakistanaises avaient dépassé le seuil des 45 milliards d’euros, la roupie pakistanaise s’était dépréciée de 23% et le déficit commercial se creusait à un rythme inquiétant. Pour faire face à cette situation, le Pakistan désespéré a frappé à la porte du FMI, et en dépit de la forte opposition, il a signé en novembre 2008 un accord Stand By pour un montant de 7,6 milliards de dollars. Or, recourir au « pompier-pyromane » de l’économie mondiale ne sortira pas le pays du marasme dans lequel il se trouve plongé. Si elle risque de plonger davantage le pays dans la spirale infernale de la dette, cette « solution » contraint en outre le gouvernement du PPP (Parti du Peuple Pakistanais), avec à sa tête Asif Ali Zardari, à appliquer les mêmes recettes frelatées qui ont conduit immanquablement à l’impasse actuelle.
L’accord Stand By demande par exemple la fin des subsides pour le combustible et l’électricité, des exemptions en matière d’impôts sur le revenu et de taxes agricoles, la poursuite des privatisations et des coupes dans les dépenses sociales. Le seul secteur pour lequel le FMI n’a pas demandé la réduction des dépenses est le budget militaire... Le gouvernement pakistanais s’est exécuté : outre la privatisation d’unités industrielles, le Pakistan a mis en vente un million d’hectares de terres arables ; il a supprimé les subsides pour le combustible et augmenté les tarifs de l’électricité, ce qui a provoqué de vives protestations. Pour tenir ses engagements de réduction du déficit budgétaire, le gouvernement a mis fin à environ 125 projets du Programme de développement du secteur public1 et en a postposé 432 autres. Les dépenses dans le secteur de l’éducation supérieure ont été réduites de 73% tandis que l’imposition de charges fiscales supplémentaires dans l’agriculture pourrait bien ruiner ce secteur.
Le recours à l’endettement et l’application des mesures néolibérales, imposées à l’échelle planétaire depuis plus de 30 ans et qui ont largement témoigné de leur échec en terme de développement humain, sont l’exact opposé d’une véritable politique destinée à faire face à la crise en défendant l’intérêt de ceux qui en sont victimes.
Le CADTM appelle le gouvernement pakistanais à cesser de se soumettre aux injonctions pernicieuses du FMI et à prendre des mesures urgentes, telle que la suspension unilatérale du remboursement de la dette, odieuse et largement immorale, afin de donner la priorité aux besoins humains fondamentaux de sa population.
Le CADTM tient à rappeler que l’ancien régime du Général Pérez Musharraf était un allié stratégique des Etats-Unis dans la région, surtout depuis les attentats du 11 septembre 2001. Les principaux bailleurs de fonds n’ont jamais hésité à prêter à la dictature pakistanaise de Musharraf les fonds nécessaires pour mener sa politique. A l’automne 2001, les Etats-Unis avaient demandé l’aide du Pakistan dans la guerre qu’ils avaient déclenchée en Afghanistan. Musharraf avait alors accepté que son pays serve de base arrière aux troupes militaires des Etats-Unis et de leurs alliés, mais il avait négocié en échange une réduction substantielle de sa dette. Dès décembre 2001, les pays riches réunis au sein du Club de Paris2 s’étaient empressés de la lui accorder. Le régime de Musharraf a ensuite continué d’endetter le Pakistan, avec le soutien actif de la Banque mondiale et des grandes puissances. Les prêts accordés n’ont aucune légitimité, ils ont servi à renforcer la tyrannie de Musharraf et n’ont amélioré en rien les conditions de vie des citoyens pakistanais. La dette contractée par ce régime despotique est odieuse. Pour le CADTM, les créanciers qui ont prêté à Musharraf l’ont fait en connaissance de cause et, dans ces conditions, il est inadmissible que le peuple pakistanais soit contraint de rembourser à l’avenir la dette odieuse contractée par Musharraf. Dans ces conditions, son annulation pure et simple est une exigence minimale.
En outre, le combat contre la paupérisation et contre la montée de l’extrémisme religieux ne peuvent l’emporter que si les problèmes fondamentaux des classes ouvrières, paysannes, et des femmes, dans les domaines social, politique et économique sont résolus.
– Le CADTM soutient la revendication d’un programme de réforme agraire radical, la redistribution des terres aux mains des forces armées (les ’Fermes militaires’, l’Army Welfare Trust et la Corporation des Semences du Pendjab) qui contrôlent près de 30.000 hectares de terrains très fertiles que les paysans et leurs familles cultivent depuis plus d’un siècle, et une réduction radicale du budget de l’armée au profit des dépenses sociales.
– Le CADTM appelle le Pakistan - et tous les pays du Sud - à enclencher une autre logique économique, respectueuse des droits humains fondamentaux et de l’environnement, à l’opposé de la logique néolibérale imposée aux forceps par l’intermédiaire d’une dette odieuse dont il faut revendiquer l’abolition immédiate. Le CADTM est en faveur d’un programme de réforme complet, légal et constitutionnel, qui inclut la convocation d’une assemblée pour rédiger une nouvelle constitution laïque, qui respecte les minorités et les femmes.
– Le CADTM demande la fin de l’occupation de l’Afghanistan par les forces étasuniennes et de l’Otan, ainsi que leur retrait des autres parties du monde.
– Le CADTM apporte son soutien aux luttes populaires contre la poursuite des politiques néolibérales et pour le départ des forces militaires étrangères. Le CADTM soutient la lutte des forces sociales et politiques qui s’opposent au fondamentalisme religieux. Le CADTM soutien les luttes des femmes pour leur émancipation.