Face à la crise du coût de la vie, des omissions et des reports particulièrement étonnants
Pour faire face à la crise du coût de la vie, on nous propose « un programme d’alimentation scolaire universel », « le déplafonnement des marges de profit des chaînes d’alimentation et la détaxation des services de réparation et des produits usagés ». On reporte la proposition d’appui aux travailleurs et travailleuses de la fonction publique et le montant d’une éventuelle hausse du salaire minimum.
Si les propositions faites dans le Bloc I nous semblent importantes, elles sont complémentaires à des revendications essentielles qui ne sont pas avancées dans la lutte contre l’inflation. Face à l’inflation qui gruge le pouvoir d’achat de la majorité laborieuse, il est nécessaire d’exiger l’indexation des salaires au coût de la vie.
Face à l’inflation, s’il faut s’attaquer au déplafonnement des marges de profit des chaînes d’alimentation comme il est proposé, il faut être plus précis et exiger le blocage des prix de tous les biens essentiels (alimentation, loyer, transport public, médicaments et énergie (tarifs d’électricité et carburants).
Pourquoi reporter à plus tard l’adoption d’un salaire minimum à 20$ de l’heure indexé au coût de la vie, comme le propose la Fédération des travailleurs et des travailleuses du Québec ? Sur ce même terrain, il faut affirmer notre entier soutien à la revendication du Front commun qu’est l’indexation des salaires des travailleuses et travailleurs du secteur public. Ce serait là un geste essentiel de solidarité concrétisant notre engagement dans la lutte pour la défense de leur pouvoir d’achat. L’urgence n’est pas à venir. C’est maintenant qu’il y a urgence, il faut prendre position et agir.
2. Une reconnaissance des réseaux militants à parfaire
Les propositions du Bloc 2 constituent une meilleure reconnaissance des réseaux militants. La proposition d’une délégation au congrès et aux Comité national doit être saluée. Pourtant, il faut se demander pourquoi rompre avec le principe de la délégation proportionnelle aux membres d’une instance, principe qui est appliqué aux délégations des assemblées de circonscription. L’élection à la proportionnelle au nombre de leurs effectifs ne devrait-elle pas s’appliquer pour les réseaux également ?
3. Des grands défis qui restent à définir
Le Bloc 3 ouvre des débats importants sur des enjeux essentiels. La proposition 5 invite à une adaptation aux changements climatiques. Ce n’est qu’une dimension de la question. Il faudrait également parler de lutte aux changements climatiques qui est une lutte pour la sortie des énergies fossiles, la réduction de GES qui en est la condition, pour l’économie de l’énergie et des ressources dans une logique de sobriété et de décroissance. Affirmer que « Québec solidaire a un programme et des propositions solides sur la lutte contre les changements climatiques depuis de nombreuses années », est une bien faible parade à l’heure où l’urgence climatique nécessite une rediscussion des initiatives et du rythme des actions. Ce débat sur la lutte aux changements implique de s’opposer clairement aux choix qui sont actuellement faits par les gouvernements d’Ottawa et du Québec d’opter pour une croissance capitaliste verte qui va à l’encontre de ce qui est nécessaire pour faire face à la crise climatique.
Les cinq principes proposés restent à un niveau de généralité tel que l’on ne voit pas en quoi ils pourront guider l’élaboration de propositions précises et éclairer, aux yeux de la population, le projet d’un Québec solidaire et écologique. Pour faire apparaître Québec solidaire comme une alternative politique réelle à une société qui se détracte et va dans le mur, il ne suffira pas de présenter quelques propositions se limitant à des mesures adaptatives. Il faut pouvoir préciser les tournants et les ruptures que devra faire la société québécoise pour être à la hauteur des défis que pose la crise climatique, comme la crise de la biodiversité d’ailleurs. C’est pourquoi il faut répondre au plan du gouvernement Legault pour une économie verte (PEV) et renouer avec notre approche en définissant un plan global de transition écologique à présenter à la population, plan dont nous avons déjà amorcé les premiers jalons dans « Maintenant ou jamais », présenté aux élections de 2018, malgré les limites de cette première esquisse.
À la proposition 5, définir un au-delà de la simple adaptation aux changements climatiques
Il faut en finir avec le refus total de faire une analyse des fondements capitalistes de cette crise climatique et de l’effondrement de la biodiversité. La lutte aux changements climatiques, comme l’adaptation aux changements climatiques que nous vivons, ne seront pas le résultat de l’utilisation des mécanismes du marché qui sont à la source de la crise actuelle dans ses
différentes dimensions. Une véritable démocratie économique, où la majorité populaire peut faire les choix économiques et écologiques nécessaires à la satisfaction des besoins et à la protection de la nature, passe par une rupture radicale avec le pouvoir d’une minorité de possédants. C’est pourquoi nous proposons d’ajouter au Cahier de propositions les propositions suivantes :
- Accélérer la fin de l’utilisation des énergies non renouvelables et, pour cela, donner la primauté et la généralisation des énergies renouvelables au contrôle public ;
- Viser la diminution de l’utilisation de l’auto solo comme moyen de transport privilégié et créer les conditions d’un transport collectif gratuit comme moyen principal de mobilité ;
- Multiplier les initiatives liées à l’économie d’énergie dans le domaine bâti, dans les secteurs industriel, commercial, institutionnel et résidentiel ;
- Soutenir le passage d’une agriculture industrielle exportatrice à une agriculture écologique de proximité ;
- Développer l’économie des circuits courts et le rapatriement d’urgence des productions essentielles (médicaments, vaccins, alimentation,…) ;
- Favoriser la sobriété dans l’utilisation des ressources par l’élimination des productions inutiles, la rupture avec la surconsommation et la publicité qui cherche essentiellement à entretenir cette dernière ;
- Faciliter la participation démocratique de la population à la prise de décisions concernant l’avenir énergétique du Québec ;
- Donner un rôle primordial et décisionnel aux travailleuses et travailleurs concernés dans la planification économique et écologique ;
- Impliquer activement les municipalités dans l’autogestion et la mise en place de microréseaux intelligents, socialisés et gérés au niveau municipal.
La proposition 6 parle de l’avenir énergétique du Québec, mais aucune analyse n’est faite sur la réalité de ce secteur et sa dynamique actuelle sous l’impulsion de François Legault, Pierre Fitzgibbon et Michael Sabia. Pourtant, pour définir ensemble l’avenir énergétique du Québec, il faut identifier la réalité du pouvoir des différents acteurs afin d’opposer une réponse solidaire aux besoins énergétiques du Québec. Une véritable transition énergétique et écologique nécessitera de prendre des mesures permettant une diminution radicale de la consommation d’énergie, de bloquer le processus de privatisation de ce secteur, de contrer la volonté de produire de plus en plus d’énergie pour attirer des entreprises multinationales énergivores et satisfaire les besoins des grandes entreprises de l’automobile américaine et d’en finir avec la surconsommation énergivore de la classe dominante.
C’est pourquoi, aux propositions que nous fait le Cahier de propositions du congrès sur l’avenir énergétique, il serait important d’ajouter (comme nous le suggère le Réseau militant écologiste de Québec solidaire) « les objectifs suivants afin d’effectuer « une transition énergétique et écologique, juste et démocratique ainsi qu’une nouvelle organisation économique et sociale pour vivre en harmonie avec notre environnement.
- Réduire la dépendance aux entreprises privées en consolidant la propriété publique des ressources énergétiques renouvelables.
- Garantir que les énergies renouvelables restent des biens publics au bénéfice de la population québécoise.
- Mettre en place une planification écologique et démocratique qui répond de manière résiliente aux besoins énergétiques de la population aux échelles locales, régionales et nationales.
- Conserver les acquis et développer les connaissances scientifiques et le savoir-faire technique accumulés par Hydro-Québec et d’autres entités publiques et les maintenir dans le domaine public.
- Informer la population sur les enjeux énergétiques, les avantages de la nationalisation des énergies renouvelables et les mesures d’économie d’énergie.
- Baisser significativement la consommation d’énergie, particulièrement pour la classe la plus énergivore de la société. » [1]
Nous reviendrons dans une deuxième partie de ce texte sur les enjeux concernant les nouvelles technologies et l’intelligence artificielle ; la défense et la promotion de la culture québécoise et la parité hommes / femmes dans le parti et la députation.
Bernard Rioux
Abonnez-vous à la Lettre de nouveautés du site ESSF et recevez par courriel la liste des articles parus, en français ou en anglais.