Selon le principe du « deux poids, deux mesures » cher à l’administration Bush, le sénat américain a ratifié un projet d’accord de coopération nucléaire civile avec l’Inde. Celle-ci n’a pas signé le Traité de non prolifération nucléaire (TNP) — et n’a pas l’intention de le signer. Mieux, si l’on peut dire, le gouvernement indien n’accepte une éventuelle inspection internationale que sur une partie de ses sites (14 sur 22).
Contre toute attente, ce projet de loi qui fixe les conditions d’une ratification définitive a été approuvé à une très large majorité (85 voix contre 12). Le 26 juillet dernier, la Chambre des représentants avait également adopté le projet, mais dans des termes légèrement différents, en raison d’amendements. Il reste donc à harmoniser les textes pour que l’accord soit définitivement scellé. Cela devrait être fait d’ici le début de 2007.
Ainsi prendra fin l’embargo sur les matériels sensibles, décidé par les pays occidentaux, après les essais atomiques indiens en 1998. Essais immédiatement suivis par ceux du Pakistan…
Cet accord historique — le premier de ce type — offre à l’Inde un statut de puissance nucléaire, et de puissance tout court. Mais il sonne étrangement aux oreilles du monde, à l’heure où les Etats-Unis et leurs alliés dénient à l’Iran le droit de produire de l’uranium enrichi — Téhéran qui a signé le TNP mais qui n’accepte plus les inspections internationales de l’ensemble de ses sites prévues par le protocole additionnel. Pour sa part, la Corée du Nord estime se situer dans le droit fil de la politique indienne d’indépendance nucléaire et de dissuasion militaire. Au Pakistan, auquel les Etats-Unis, alliés de vieille date, viennent de refuser ce qu’ils ont offert à l’Inde, le ressentiment à l’égard du puissant voisin indien n’en est que plus vif. Quant à la non-prolifération et au désarmement nucléaires, ils semblent s’éloigner un peu plus de cette région sur-nucléarisée (Inde, Pakistan, Chine, Corée du Nord, « parapluie nucléaire » américain, et, aux confins, Israël).