Nous attendons avec frayeur le « verdict » du procès d’Aung San Suu Kyi par la cour militaire birmane... Connaissant la férocité, le mépris et la mauvaise volonté des militaires à son égard, on peut se préparer sans illusions au pire. La lauréate du prix Nobel de la paix est en effet la proie des généraux depuis deux décennies. Ils ont déjà essayé de l’assassiner en 2003, et ils ne cessent, depuis, de la harceler. Nous savons qu’ils veulent l’« écarter » pour au moins un an, le temps de préparer et de gagner leurs « élections », le temps de s’assurer qu’aucune résistance démocratique n’est possible...
Nous savons Aung San Suu Kyi courageuse, mais en mauvaise santé. Nous la savons sereine, mais combien de temps ce corps de femme pourra-t-il tenir ? Les « accusations » contre elle, nous les connaissons : tout vient d’un Américain qui, déjouant les soldats qui la gardent, a nagé jusqu’à sa « résidence surveillée » et est resté chez elle une journée et deux nuits. Elle l’a supplié de partir, ce mormon, muni d’une bible ! Mais il a refusé. Et cela arrange bien les affaires de la junte militaire.
Le crime d’Aung San Suu Kyi ? N’avoir pas dénoncé aux militaires l’intrusion de cet illuminé aux soldats entourant sa résidence surveillée ! Soldats qui, il faut bien le reconnaître, se sont montrés ce jour-là d’une étonnante distraction alors qu’ils l’ont séquestré pendant près de quatorze ans sans que personne jamais ne puisse l’approcher, la confinant dans un isolement total. Certains parlent d’une manipulation ou d’un piège. C’est, en tout cas, une occasion rêvée pour les militaires au pouvoir.
Tout cela serait risible et ridicule, si la vie d’Aung San Suu Kyi n’était pas en jeu, car, de nouveau emprisonnée dans la prison d’Insein, à l’âge de 64 ans, elle a une santé de plus en plus fragile.
Son destin est étroitement lié à celui de ses compagnons de malheur, d’autres prisonniers politiques, torturés et maintenus en prison avec des peines allant pour certains jusqu’à soixante-cinq ans d’emprisonnement, pour avoir participé à la « révolution safran » ou encore parlé aux étrangers. Dans cet Etat de terreur qu’est la Birmanie des généraux, pour le peuple birman, le seul espoir qui subsiste, c’est Aung San Suu Kyi et la Ligue pour la démocratie dont elle est la dirigeante.
Depuis vingt ans elle tient bon, mais cette fois-ci nous redoutons le pire : une sentence qui pourrait la faire taire à tout jamais.
Jane Birkin, Catherine Deneuve, Robert Hossein, Michel Piccoli, Alain Souchon.
* Article paru dans l’édition du 31.07.09. LE MONDE | 30.07.09 | 13h12.
Le verdict dans le procès d’Aung San Suu Kyi est reporté
LEMONDE.FR avec AFP | 31.07.09 | 06h45 • Mis à jour le 31.07.09 | 08h52
Alors qu’il était attendu ce vendredi, le verdict dans le procès de l’opposante birmane Aung San Suu Kyi a été renvoyé au 11 août, ont annoncé vendredi un responsable birman et un diplomate. « La date du verdict a été ajournée au 11 août. La raison invoquée par les juges est qu’ils doivent réexaminer le dossier », a déclaré celui-ci, qui assistait à la brève audience à la prison d’Insein. Plus tôt dans la matinée, la sécurité avait été renforcée aux abords de la prison où Mme Suu Kyi est incarcérée depuis le 14 mai et jugée depuis le 18 mai.
La lauréate du prix Nobel de la paix 1991 risque jusqu’à cinq années d’emprisonnement, ce qui l’écarterait de facto du paysage politique pendant les élections controversées que la junte entend organiser en 2010. La « Dame » de Rangoun est accusée d’avoir hébergé les 4 et 5 mai un Américain de 53 ans, John Yettaw, qui, dans des circonstances mystérieuses, a réussi à gagner à la nage sa demeure, située au bord du lac Inya, à Rangoun. M. Yettaw, mormon et ancien militaire qui est lui aussi jugé avec les deux dames de compagnie de Mme Suu Kyi, a affirmé qu’il s’était rendu chez l’opposante après avoir eu « une vision selon laquelle elle allait être assassinée ».
Procès Aung San Suu Kyi : le verdict est attendu vendredi
LEMONDE.FR avec AFP | 28.07.09 | 09h29 • Mis à jour le 28.07.09 | 10h43
Détenue depuis la mi-mai à la tristement célèbre prison d’Insein, au nord de Rangoun, l’opposante birmane est jugée pour avoir enfreint les règles de son assignation à résidence. « Le verdict sera rendu vendredi », a affirmé son avocat et porte-parole de son parti, la Ligue nationale pour la démocratie (LND).
« Nous avons de bonnes chances au regard de la loi, mais nous ne pouvons pas anticiper la décision de la cour car c’est un dossier politique », a-t-il ajouté. Les débats devaient s’achever mardi. Mme Suu Kyi, Nobel de la paix, est passible de cinq ans de prison pour avoir reçu en mai un Américain qui s’était invité chez elle après avoir traversé un lac à la nage.
Tout au long de son procès qui s’était ouvert le 18 mai à huis clos, l’opposante, âgée de 64 ans, n’a cessé de clamer son innocence, dénonçant le caractère « partial » et « politique » de sa mise en accusation. Durant les débats, ses avocats ont fait valoir que cette dernière ne pouvait pas être tenue pour responsable des actes de l’Américain John Yettaw, et qu’elle avait été inculpée en vertu d’une Constitution qui n’est plus en vigueur depuis plus de deux décennies. Ils ont aussi indiqué que l’accusation a pu appeler quatorze témoins à la barre alors que la défense n’a eu droit qu’à deux témoins.
Mme Suu Kyi a passé treize des dix-neuf dernières années en résidence surveillée, depuis que la junte militaire a refusé d’admettre sa victoire aux dernières élections organisées en Birmanie en 1990. En 2010, des élections doivent être organisées par la junte.