La création de Respect, dans la foulée du mouvement antiguerre de 2003, constituait une étape prometteuse du rassemblement de la gauche radicale et de construction d’une alternative au New Labour. Cette coalition regroupait des militants syndicaux et associatifs, des militants de la gauche travailliste révoltés par le libéralisme de Tony Blair, des opposants à la guerre en Irak, des musulmans, et des militants révolutionnaires de différentes sensibilités dont, entre autres, le Socialist Workers Party (SWP) – principale organisation de l’extrême gauche britannique – ainsi que nos camarades de l’International Socialist Group (ISG, section britannique de la IVe Internationale). Malgré un système électoral particulièrement injuste (scrutin majoritaire à un tour), Respect réussissait à faire élire un député, George Galloway – ancien député, exclu du Labour Party pour son opposition à la guerre, aux prises de positions parfois controversées –, ainsi que plusieurs dizaines de conseillers municipaux.
Paradoxalement, ces succès viennent de déboucher sur une scission. L’arrière-fond politique du débat – qui s’est envenimé – est constitué par les réponses divergentes données aux interrogations sur la fonction et la nature de Respect. Pour le SWP, Respect devait rester essentiellement une coalition électorale – « un front unique d’un type particulier » – et ne pas chercher à se substituer aux partis politiques existants. Cette conception permettait évidemment d’empêcher tout « empiètement » sur son intervention propre sur tous les fronts de lutte. À l’inverse, les autres composantes de Respect et de nombreux militants non encartés souhaitaient aller plus loin, ne pas limiter l’intervention de Respect aux campagnes électorales mais, au contraire, agir de plus en plus en tant que Respect dans l’ensemble des mobilisations. Et, en conséquence, construire Respect comme une force politique à part entière, pluraliste et dotée d’une structuration démocratique à la base.
Après avoir longtemps « protégé » George Galloway contre les critiques (fondées) qui s’exprimaient dans les rangs de Respect, la direction du SWP a récemment dénoncé avec virulence son caractère « incontrôlable », ainsi que les dérives « communautaristes » et électoralistes qui, selon elle, se faisaient jour dans certaines sections locales de Respect.
George Galloway, pour sa part, a repris à son compte une série de propositions de fonctionnement faites antérieurement par nos camarades de l’ISG. Finalement, la scission s’est matérialisée, le 17 novembre dernier, par la tenue de deux conférences concurrentes. L’une était essentiellement animée par le SWP et quelques alliés. L’autre, regroupant la grande majorité des autres composantes, a décidé le lancement d’un nouveau mouvement, Respect Renewal.