« LA BELLE Monica Bellucci d’entrée, ça calme... » Samedi matin, Olivier Besancenot arrive à l’aéroport de Rome où la plastique de l’actrice italienne s’étale sur les affiches publicitaires. Premier contact avec les charmes de l’Italie où le facteur de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) n’est pourtant pas venu faire du tourisme. Il était l’invité d’honneur du congrès de fondation du nouveau parti des anticapitalistes italiens. Le « cousin » de celui que le militant révolutionnaire veut former en France.
« Même ici, je sers de facteur »
Débarquant à Rome (après sa tournée de postier à Neuilly), Besancenot, « aussi bordélique que les Italiens », ne boude pas son plaisir. Et pas simplement « pour les pâtes et les pizzas ». Pour lui l’Italie, c’est « Florence en 2003 et 10 000 personnes hyperchaudes pour le plus beau meeting auquel j’ai participé ». Plus douloureux, c’est aussi le sommet du G 8 à Gênes en 2001 et « le souvenir indélébile » du jeune Carlo Giuliani tué par les carabiniers. Il y a enfin le bilan, encore plus sombre, des années de plomb et du terrorisme. Une page sanglante de l’histoire de l’extrême gauche italienne, pour laquelle il avoue n’éprouver « ni fascination ni répulsion ». « C’est simplement du passé », dit-il. Besancenot préfère regarder « vers l’avenir et les Italiens qui n’ont jamais joué les petits professeurs rouges ».
Via Rieti, au cœur de Rome, 1 000 délégués altermondialistes, syndicalistes et militants antiguerre déçus par le gouvernement social-démocrate de Romano Prodi créent la Sinistra critica (Gauche critique). Un vieux militant lui glisse en douce une enveloppe avec 60 € à remettre à Paris au siège d’une revue amie. « Même ici, je sers de facteur », rigole Besancenot. Deux cents militants viennent surtout entendre la figure emblématique des dernières grèves en France. « Della Francia in lotta : Olivier Besancenot » (« De la France en lutte »), proclame l’affiche du congrès. Et quand un métallo vient gentiment le titiller sur la faiblesse des syndicats français, Besancenot rétorque : « Petits syndicats mais grandes luttes » avant de dévier : « Parlons foot, on va peut-être pouvoir rivaliser... »
Mais la politique reprend ses droits. Un coup en français, un coup en italien, et souvent avec les mains. « Comme la LCR, nous rejetons l’alliance avec le social-libéralisme et, même si l’on ne refuse ni les élections ni les institutions, le centre de gravité du nouveau parti, c’est d’abord le mouvement social et altermondialiste », reconnaît le sénateur Franco Turigliatto. L’exact profil politique du « cousin français » qu’évoque Besancenot dans un discours griffonné à la va-vite. « Il y a des connivences. Comme quoi entre la France et l’Italie, ça ne se résume pas au ballon rond », avance-t-il.
Et de proposer la tenue « d’une conférence anticapitaliste avec les Espagnols, les Portugais... » En ligne de mire, les élections européennes de 2009. Avec un sigle commun pour s’y présenter ? « La faucille et les marteaux, c’est comme les spaghettis : les Italiens y tiennent », relève Besancenot, largement applaudi. « Recueillir comme lui 1,5 million de voix, un rêve ! Besancenot, è una bomba ! » s’enflamme Sem, la trentaine. Voici le leader de la LCR, « les pneus regonflés », parti sous des « Ciao, ciao Besancenot ! ».