Depuis l’annonce de ton adhésion à la LCR, quelles ont été les réactions autour de toi ?
Pascale Montel - Plutôt bonnes ! C’est d’ailleurs un engagement qui n’a surpris personne. Quand on s’oppose quotidiennement à l’exploitation patronale sur le terrain syndical, c’est finalement assez logique de lutter pour changer la société, en finir avec un système capitaliste qui fait que les pauvres sont de plus en plus pauvres et les riches de plus en plus riches. D’autres camarades ont adhéré avec moi, et je suis convaincue que d’autres feront également le pas de nous rejoindre dans les semaines et les mois qui viennent.
Peux-tu nous présenter votre section et vos perspectives militantes ?
P. Montel - Nous sommes actuellement une dizaine de militants syndicaux des entreprises de la métallurgie de la région. Nous voulons intervenir en direction de nos entreprises, car il y a réellement besoin de développer une conscience de classe, de renouer avec les salariés. C’est sur les lieux de travail que nous serons les plus efficaces pour être en contact avec les masses, pour être présents dans les luttes, pour porter l’espoir, les exigences revendicatives des travailleurs et des travailleuses. Plus que jamais, tous les efforts doivent être orientés en direction des lieux de travail. Il faut s’implanter dans les entreprises. Rien ne peut remplacer ce contact direct, militant, d’autant que les médias sont à la solde du pouvoir et du patronat.
Comment est perçue la perspective de construire un nouveau parti anticapitaliste autour de toi ?
P. Montel - Il y a beaucoup d’espoir et d’attentes, parce que de nombreux militants se sentent orphelins, beaucoup se sentent désorientés face à l’absence d’opposition à Sarkozy. Les travailleurs sont en attente d’une véritable alternative politique face au gouvernement. C’est particulièrement vrai ici, dans le Nord-Pas-de-Calais, où il y a encore des traditions de luttes. Il y a des militants de la CGT, ou même du PCF, qui veulent un parti pour les luttes. Tout le monde ressent le besoin d’unité face au patronat et au gouvernement, mais c’est l’unité autour de nos revendications qu’il faut pour construire une véritable opposition à Sarkozy et au Medef. La gauche plurielle a laissé un goût amer, et la politique de collaboration des directions syndicales tourne le dos à nos revendications. Il faut regrouper nos forces, mais sans faire de concessions. Il faut reconstruire des repères. On a tout essayé depuis vingt ans, il faut faire du neuf, créer un nouveau parti qui appartienne aux travailleurs et aux exploités.
C’est donc d’abord l’évolution des partis de gauche qui explique cet engouement ?
P. Montel - Pas seulement. L’offensive patronale et les attaques du gouvernement ne nous laissent pas de répit. Il y a urgence à agir. La casse du CDI, les attaques contre le droit de grève, la démolition des services publics, la remise en cause du droit à la santé et le pouvoir d’achat qui dégringole, les conditions de travail qui se dégradent, les atteintes aux libertés, toutes ces attaques inquiètent les salariés. Quand on voit que les cadences et la pression poussent des salariés au suicide, que tous les acquis des luttes passées sont remis en cause, c’est clair que nous sommes dos au mur. Par exemple, sur la question des retraites et des régimes spéciaux, il faut être à l’offensive, pour une retraite pleine et entière à 55 ans pour tous. De même, la question d’augmenter les salaires se pose partout, sans travailler plus ! Rien ne viendra hors des luttes des travailleurs eux-mêmes.
Quelles sont les initiatives que vous comptez prendre dans les semaines qui viennent ?
P. Montel - Comme je l’ai dit, il faut s’adresser aux salariés. On a commencé à diffuser une feuille à l’usine Vistéon près de Lille. On va aller régulièrement à la porte des entreprises pour faire connaître nos revendications et notre programme, convaincre le maximum de travailleurs et de militants de nous rejoindre, de s’organiser autour d’un projet anticapitaliste. Et organiser, dès maintenant, la mobilisation contre les attaques du gouvernement.
* Propos recueillis par le correspondant de Rouge.
RENCONTRE A PARIS
Le débat s’engage
La semaine dernière, Olivier Besancenot a rencontré à Paris sept militants du mouvement social, particulièrement investis dans les luttes des précaires, des salariés du commerce, dans le combat pour le droit au logement, dans la solidarité internationale et avec les prisonniers politiques.
Ils sont désireux de prolonger leurs engagements sur un terrain directement politique. Mais toutes et tous veulent des garanties : ne pas être instrumentalisés, pouvoir continuer à militer et à vivre sans que le parti les enrégimente... Quelques questions ont été plus particulièrement débattues avec ces militants syndicaux et associatifs intéressés par notre proposition de construction d’un nouveau parti. Un nouveau parti ? Anticapitaliste ? Est-ce qu’en tant que jeune, je vais pouvoir trouver ma place ? Comment éviter de retomber dans la « réunionite » et les vieux discours et les anciennes références des militants d’extrême gauche ? Je veux donner un prolongement politique à mon engagement syndical et associatif, mais est-ce que le parti ne va pas brider mes initiatives ?
Le fonctionnement de ce parti permettra-t-il de concilier mes différents engagements et respectera-t-il ma vie privée ? Indépendant du PS, c’est indispensable, mais comment voyez-vous les relations avec les autres partis, avec celles et ceux qui se sont retrouvés dans les collectifs antilibéraux ? Anticapitaliste, est-ce suffisant ? Ne doit-on pas aussi poser la question de la violence à opposer à celle de l’État ? Quel lien avec votre « IVe Internationale » ? Le prolétariat n’est ni trotskyste, ni libertaire, ni maoïste - il est le prolétariat -, comment travailler à son unification sans renoncer aux expériences importantes du passé ?
Toutes les interrogations, toutes les inquiétudes n’ont pas été levées. Alors, la proposition finale a été de se revoir et de continuer la discussion, qu’une des participantes a décidé de résumer sur un blog. Une initiative fructueuse, à suivre et à démultiplier.
Côme Pierron