Les menaces de la rentrée contre le service public d’éducation, c’est, en premier lieu, la saignée prévue sur les postes : plus de 11 000 suppressions, essentiellement dans le personnel enseignant du second degré (collèges, lycées). Du jamais vu, qui ne peut que réduire l’offre éducative (le ministère parle de rogner sur les horaires des élèves) et compliquer la tâche des enseignants, en augmentant les effectifs par classe. La contrepartie salariale, c’est le « travailler plus », les heures supplémentaires, avec la bénédiction de Michel Rocard, épinglé lui aussi au tableau de chasse de « l’ouverture » sarkozyenne.
Mais d’autres menaces se profilent à l’horizon. La bivalence - permettant à un professeur du second degré d’enseigner deux matières en cas d’absence d’un collègue -, si fortement rejetée dans la rue l’an dernier, demeure dans les cartons, Darcos l’a répété. Dans le premier degré, un rapport vient de dénoncer les lacunes du primaire et de la maternelle : on peut craindre qu’il annonce des solutions rétrogrades et une dégradation des conditions de travail des instituteurs.
Et puis, une terrible menace pèse plus que jamais sur nombre d’élèves : celle du renvoi des sans-papiers. Hortefeux a redit la volonté gouvernementale d’en expulser 25 000. Combien de places risquent de rester vides dans les établissements scolaires ? Combien de jeunes, d’enfants traumatisés par les risques qu’ils courent ?
On a donc rarement vu une rentrée scolaire s’engager sous de tels auspices. Sans parler de la carte scolaire, que le ministère commence à liquider, et de la menace de service minimum en cas de grève, qui continue de peser aussi à l’école. On aurait pu s’attendre à des initiatives très rapidement. Or, les organisations syndicales, pour le moment, tout en dénonçant justement les décisions gouvernementales, ne font qu’annoncer une « action d’ampleur » dans le courant du premier trimestre. Elles préservent leur unité, ce qui est positif, mais il convient de passer très vite de la menace à la décision d’action. Le mouvement syndical, pas seulement dans l’Éducation nationale, est tétanisé par la crainte de l’échec des mobilisations. Mais l’échec est garanti s’il ne se passe rien ou pas grand-chose. Les personnels de l’Éducation sont bien placés pour savoir qu’il faudra, pour obtenir satisfaction, agir en nombre et dans la durée, agir pour gagner et non pour témoigner. Ils le feront savoir à leurs syndicats.
C’est à une bataille difficile, mais essentielle, qu’il convient de se préparer. L’ampleur de l’offensive contre le service public, contre la demande sociale d’éducation, est telle que les parents et les jeunes ne peuvent rester indifférents. L’enjeu, ce n’est pas seulement les conditions de travail des personnels, c’est l’avenir de l’école et donc de la jeunesse. Il appelle un « tous et toutes ensemble » pour préserver les possibilités de formation.