Cette extrême gauche là n’existe pas pour l’heure, en dehors de la voix singulière et singulièrement éclairante d’Olivier Besancenot.
Lutte ouvrière continue son petit solo aigrelet qui enfile les évidences marxiennes comme les perles d’un boulier que ce groupe protège de toute évolution depuis des décennies. Le 5% d’Arlette en 1995 puis la vraie notoriété de LO durant quelques années, les députés européens obtenus avec la LCR, tout cela s’est dilapidé dans la soufreteuse pensée d’un parti qui ne voit dans les occasions offertes par l’histoire qu’une vertigineuse occasion de se perdre. Et la direction de LO a le vertige facile.
Une majeure partie de la LCR n’a pas su résister à la droitisation générale des discours et tactiques qui a contaminé la scène politique française depuis grosso modo la conversion européenne (monétariste) de la gauche mitterrandienne. Sous diverses moutures elle est retournée à la « maison mère » stalinienne où son ancêtre dans les années 60 avait su se construire et surgir. La justification théorique étant l’unité dont les vertus « dynamiques » seraient quasiment spontanées quasiment irrépressibles pour peu qu’on s’attache à la construire sans relâche. On ne peut pas dire que jusqu’ici la théorie de la dynamique unitaire aie beaucoup payé, malgré de « pédagogiques » avalements de couleuvres et diverses contorsions sémantiques qui vont jusqu’à avoir adopté la logomachie politiquement spongieuse du stalinisme décadent (citoyens, mettre en débat, l’humain etc).
Le NPA ne rassemble plus que le « mâchefer » du creuset politique et inventif que nous avions espéré qu’il soit : il ne compte plus que les débris stériles de groupuscules, couranticules, succursales d’internationales fantomatiques, qui dansent sur les cendres froides en se disputant d’infinitésimales poignées de « militants gagnés », lesquels militants sous la dureté des temps et dans le désarroi de la pensée à gauche, ont la tentation de se rendre à « plus révolutionnaire que moi tu meurs ». Comme si postuler au plus à gauche possible était un antidote aux dérives idéologiques. Misère des trotskismes !
Les amis de Besancenot, encalminés dans ce magmas refroidi sont en attente. Parfois ils se voient « gagner » la majorité au prochain congrès, ce qui signifierait devoir redonner un peu de crédibilité à un sigle sans doute épuisé, et surtout trimbaler ce lourd fardeaux d’une meute sectaire en aboi qui n’auraient de cesse de faire fuir le simple militant majo. Les ex LCR d’Ensemble (de toutes les strates historiques de la LCR d’ailleurs) leur font les yeux doux et leur jouent le « n’aie pas peur » du boa de la jungle, sans plus de conviction que ça mais en leur disant « que faire d’autre » ? Ils aimeraient cette petite revanche même si leurs urgents espoirs dans le FG se sont amplement... assagis, tout en craignant pour certains d’entre eux, le retour d’une pensée politique moins... pédagogique pour ne pas dire flexible que la leur.
On est dans la merde et je vous passe les convulsionettes du POI qui n’amusent que les archéologues de l’histoire stalino-trostskiste.
La tactique besançonnienne du livre par an, de la parole limpide et ferme du côté des travailleurs dans les media, de l’indépendance partidaire (« ex-porte parole du NPA » le présente-t-on), de la main active dans ce qui va dans le bon sens, sans a priori sectaire ni condition comminatoire mais sans rien céder sur le fond sont un stand by intelligent. Il est dans le jeu tout en ne le jouant pas (il s’épargne les tambouilles uRnitaires ravageuses des camarades de Ensemble, il ne postule pas à être candidat à la présidentielle), mais l’outil collectif est squelettique et paralytique...
Il n’y a toujours pas d’autres partenaires qui ne soient pas des « laisse de mer » de l’ample reflux du vieux mouvement ouvrier qui n’en finit pas de bégayer un faux gauchisme mitterrandien, un post stalinisme invertébré crispé sur sa survie, une gauche de la gauche raisonneuse, libelleuse et élégante mais absolument velléitaire qui a épuisé sa crédibilité de cénacle en cénacle...
Il y a nous, milliers, dizaine de milliers qu’un moment d’Olivier conforte non pas comme un messie qui dirait la bonne parole, mais comme notre parole qui serait dite dans ces endroits aussi, nous qui dans notre coin faisont ce que nous pouvons, osons l’intelligence, l’ouverture, la combativité sans souci uRnitaire, l’unité dans l’indépendance...
Savoir être dedans tout en en étant pas, figure active qui ne joue pas le jeu, ni le même air, ni dans les mêmes cours institutionnelles où les autres grenouillent sous le regard désabusé et rageur de la population... stand by actif.
Jusqu’à saisir l’occasion du premier stand up social quand une colère s’imposera sur la scène politique, apte à en catalyser d’autres pour qu’une autre voie s’esquisse, être là pour ça, pour soutenir, pour construire cette « extrême » gauche intelligente... qui nous fait tant défaut et qui saurait enfin dire qu’autre chose est possible sans finir par vendre l’écologie pour un fauteuil de député écolo libéral européen, par disputer une tête de liste ici ou là à l’appareil post stalinien, par avaler une palinodie douteuse de plus du sénateur mitterrandolâtre qui se verrait bien prendre le pouvoir pour le peuple.
je suis optimiste, mais si.
Jacques Fortin