Espionnage de Besancenot : le détective sous pression et la prétendue Porsche
Espionnage de Besancenot : le détective sous pression et la prétendue PorscheAu premier jour du procès de l’espionnage présumé d’Olivier Besancenot, un détective a expliqué avoir été mis sous « pression » par son client Antoine Di Zazzo, distributeur du Taser en France, pour rechercher une prétendue Porsche de l’ex-chef du NPA qui roulait en fait en Peugeot 106.
« Dès le départ » à l’été 2007, a raconté d’une voix faible l’ancien commandant de police Gérard Dussaucy reconverti dans le privé, M. Di Zazzo « m’a dit +j’ai un problème avec M. Besancenot+ ».
Celui-ci avait, rapport d’Amnesty international à l’appui, affirmé que le pistolet à impulsions électriques commercialisé par SMP Technologies, la société de M. Di Zazzo, avait fait des morts aux Etats-Unis.
« Je sais » que le dirigeant trotskiste « roule en Porsche Cayenne », lui a dit son client, a affirmé M. Dussaucy. Antoine Di Zazzo voulait à tout prix s’assurer de l’existence de cette voiture, a-t-il raconté.
« Il a insisté, malheureusement j’ai fini par accepter de voir ce que je pouvais faire », en s’adressant à un sous-traitant, poursuit-il. Les recherches s’avèreront finalement vaines. Le leader trotskiste ne roule pas dans un opulent 4X4 mais dans une modeste Peugeot 106, avec une galerie sur le toit...
C’est d’ailleurs la recherche de cette Porsche qui a conduit selon M. Dussaucy à ce que le fils de M. Besancenot, alors âgé de 4 ans, et sa compagne soient pris en photo, a-t-il soutenu.
Des clichés qui ont ulcéré l’ancien candidat à la présidentielle, qui a fait l’objet de « filatures », tout comme sa compagne.
« Inacceptable »
« La photo de mon enfant n’a rien à faire dans le bureau du directeur » du distributeur du Taser en France, s’est-il indigné, « c’est le plus inacceptable ».
« On a fouillé dans nos comptes, dans nos vies privées », a renchéri sa compagne, qui veut, lors de ce procès, « savoir qui a commandé quoi, pour quel compte et à quelles fins malveillantes ».
Selon Antoine Di Zazzo, qui doit déposer à la barre vendredi, il avait simplement demandé au détective un relevé cadastral pour faire délivrer une assignation à Olivier Besancenot pour lui intenter un procès en diffamation, qu’il perdra finalement.
Avant l’audience, son avocat Me Jean-Pierre Versini-Campinchi, le fait qu’un rapport de filature lui ait été transmis « n’établit pas du tout le fait que c’est lui qui l’a commandé ». « C’est lui qui a été piégé, mais on ne sait pas par qui », a-t-il dit.
Mais selon Gérard Dussaucy, Antoine Di Zazzo, « excité », « en furie », lui infligeait une « énorme pression » au point de lui faire « peur », lui avait ensuite demandé « d’autres choses » : « savoir ce qu’il avait sur ses comptes ».
Retraité de la police depuis 18 ans, le détective bredouillant à l’envi qu’il n’avait pas de « souvenance » des dates, s’est défendu d’avoir commis le moindre excès de zèle, car il ne se serait pas engagé sur des dépenses « sans être sûr d’être payé ».
Reconnaissant sa « responsabilité », il a expliqué qu’il ne ferait « jamais une recherche sans que le client ne soit d’accord ». « Je me suis fait piéger, je reconnais que j’ai eu tort », a-t-il conclu.
Parmi les dix prévenus à ce procès prévu jusqu’au 7 décembre, figurent d’autres détectives, des policiers, un agent des douanes, un autre des impôts et un responsable bancaire, qui ont été sollicités pour fournir des données confidentielles.
De Sylvain PEUCHMAURD (AFP)
* AFP : 29/11/2012.
Accusé d’avoir espionné Besancenot, le patron de Taser France au tribunal
PARIS, 27 nov 2012 (AFP) - Le patron de Taser France et neuf autres prévenus comparaissent à partir de jeudi devant le tribunal correctionnel de Paris pour l’espionnage présumé de l’ancien porte-parole du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) Olivier Besancenot.
M. Di Zazzo, directeur de SMP Technologies, est soupçonné d’avoir fait espionner en 2007 et 2008 l’ancien dirigeant trotskiste, avec lequel il a été en conflit ouvert. M. Besancenot avait notamment affirmé que le Taser avait provoqué des morts aux Etats-Unis.
M. Di Zazzo est poursuivi pour complicité de « violation du secret professionnel », d’« accès frauduleux à un système de traitement automatisé de données » et de « détournement de finalités de données ».
Selon l’accusation, le patron de SMP Technologies apparaît comme le « véritable donneur d’ordres » et, « afin de tout connaître de la situation personnelle et financière de son adversaire, M. Di Zazzo a sollicité le cabinet Dussaucy-Batana afin qu’ils obtiennent » des informations confidentielles.
Un compte rendu détaillé des filatures et surveillances dont ont été l’objet M. Besancenot et son proche entourage, entre octobre 2007 et janvier 2008, avait notamment été saisi au siège de SMP Technologies, dans le XVIe arrondissement de Paris.
M. Di Zazzo assure avoir simplement demandé à un détective privé d’effectuer un relevé cadastral pour obtenir l’adresse de M. Besancenot afin de l’assigner en diffamation. Il affirme que c’est de sa propre initiative que le cabinet Dussaucy-Batana a effectué un certain nombre d’investigations.
« Officines privées »
Pour son avocat, Me Jean-Pierre Versini-Campinchi, on « fait porter » à Antoine Di Zazzo « un chapeau beaucoup trop large pour lui ».
Mais selon le conseil du détective Gérard Dussaucy, M. Di Zazzo n’avait pas besoin d’engager son client pour un simple relevé de cadastre. Selon Me Jean-Pierre Cahen, il avait bien été demandé à M. Dussaucy d’enquêter sur la « surface financière » d’Olivier Besancenot. Et ce pour évaluer le montant des dommages et intérêts qu’il pourrait prétendre lui demander dans le cadre du procès en diffamation, dans lequel le patron de Taser France avait finalement été débouté.
Pour Olivier Besancenot et son avocat, Me Antoine Comte, l’affaire met en lumière les problèmes de confidentialité des fichiers de la police censés être protégés.
L’ex porte-parole du NPA attend des « explications et des condamnations à la hauteur de cette forme d’intimidation qu’est l’espionage », affirmant que sa compagne, ses enfants, sa famille ont été suivis. « Tout le monde se renvoie la balle » dans cette affaire, ajoute-t-il.
Il souhaite, au-delà de l’affaire jugée par le tribunal, un « débat public » sur ces questions et une commission d’enquête, soulignant l’opacité de ces « officines privées ». Il souhaite également un « moratoire » et un débat sur le pistolet à impulsions électriques.
Deux autres détectives sont également poursuivis, tout comme un agent des douanes, un agent des impôts, deux policiers et un responsable bancaire, qui ont été sollicités pour fournir ces données confidentielles.
Les débats doivent se dérouler jusqu’au 7 décembre devant la 17e chambre du tribunal correctionnel, qui devrait mettre sa décision en délibéré à plusieurs semaines.
Sylvain PEUCHMAURD