Le candidat du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) à l’élection présidentielle, Philippe Poutou, a déposé ce matin au Conseil constitutionnel les 572 signatures d’élus, qui lui permettent de participer au scrutin. Au même moment, l’auteur-compositeur et interprète Georges Moustaki lui apportait son soutien dans une tribune publiée par le Huffington Post [1].
La campagne du NPA aura finalement lieu. 572 signatures, c’est mieux qu’en 2002 et en 2007, quand la candidature d’Olivier Besancenot n’avait été rendu possible que grâce au soutien instrumental et de dernière minute d’élus du Parti socialiste, puis de l’UMP. Il se murmure même que cette fois le député Serge Letchimy, président du Parti progressite martiniquais (PPM) d’Aimé Césaire, qui s’est récemment fait remarquer par une salutaire charge anti-raciste et anti-coloniale contre le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, aurait accordé son paraphe, à l’instar de quelques élus du PPM.
Arrachées par plusieurs centaines de militants issus de tous les courants du NPA dans un contexte particulièrement difficile, tant sur le plan médiatique et sondagier marqué par la sur-exposition des « grands » candidats et de la « dynamique » de la campagne de Jean-Luc Mélenchon à gauche de la gauche (qui s’est imposée jusqu’à Mediapart, où la rédaction a décidé de privilégier depuis plusieurs semaine et limitativement quatre candidats), que sur le plan interne, où la direction de la minorité du parti anticapitaliste (Gauche anticapitaliste) apparaît déterminée à ne pas laisser la campagne - qu’elle qualifie de « faute politique grave » - être menée à bien, ces signatures constituent une première victoire pour le NPA, qui peut désormais concourir à l’élection et bénéficier d’ici quelques jours de l’égalité des temps de parole, le mur des parrainages, « premier tour administratif », selon Philippe Poutou et Olivier Besancenot, ayant été franchi. Tous les obstacles ne sont, cependant, pas levés, puisque balayant d’un revers de main l’appel à l’unité du parti et à la raison lancé par Olivier Besancenot, Christine Poupin, Alain Krivine et François Sabado, la Gauche anticapitaliste pourrait ce week-end appeler à voter pour le candidat du Front de Gauche à l’élection présidentielle, puis quitter le NPA d’ici quelques semaines, non sans avoir pris soin de lui faire les poches et de le délester - sans manifestement respecter les principes et les procédures démocratiques en vigueur au sein de l’organisation anticapitaliste - de 850 000 euros (dont 150 000 devraient revenir à la Gauche unitaire, tendance de la Ligue communiste révolutionnaire qui a rejoint le Front de Gauche au moment de la création du NPA).
Le soutien apporté ce matin à Philippe Poutou par Georges Moustaki sonne comme une deuxième bonne nouvelle pour le parti anticapitaliste et vient ensoleiller quelque peu son ciel, qui, à défaut de lui tomber totalement sur la tête, peine à s’éclaircir. L’artiste aux « sympathies de gauche » et dont la « sensibilité se rapproche des libertaires, des grévistes » qualifie Jean-Luc Mélenchon de « très bon » mais de « cabotin » avant de marquer sa nette préférence pour le candidat du NPA : « Dans cette présidentielle, s’il y a un candidat dont les arguments m’interpellent, dans le sens où sa parole me touche, c’est Philippe Poutou. Il a l’air perdu dans l’univers politicien. Il le dit lui-même qu’il ne sera pas élu, mais il tient à cette tribune pour que le monde ouvrier ait voix au chapitre. Et je trouve cela attendrissant, oui c’est le terme qui convient selon moi. De surcroît, je trouve ses revendications radicales et justes. J’aimais bien Olivier Besancenot en 2002. Il avait du charisme et de la conviction. Mais je trouve Philippe Poutou plus émouvant. Il est d’apparence plus fragile. D’apparence seulement ».
Poutou, Letchimy, Moustaki : l’occasion de rappeler l’organisation ce samedi 17 mars 2012, à Paris, d’une marche anti-coloniale et anti-raciste, à l’appel d’une centaine d’associations, de syndicats et de partis politiques. Cette marche « contre le racisme et les idéologies d’exclusion, pour en finir avec le colonialisme partout dans le monde, pour l’auto-détermination et l’indépendance des peuples en lutte, pour les libertés individuelles et collectives et pour l’amitié et la solidarité avec les peuples en lutte » s’élancera de Barbès à 14 heures pour rejoindre la place de la Bastille. Place de la Bastille, qui sera investie le lendemain, 18 mars 2012, date anniversaire du début du soulèvement de la Commune de Paris et de la signature des accords d’Evian, par les soutiens du Front de Gauche, à l’occasion d’une marche pour la 6e République. Une république, dont on espère que leur candidat à l’élection présidentielle saura rappeler non seulement les pages glorieuses, mais également les heures sombres, qui continuent de peser lourdement sur les épaules de nombre de nos concitoyens, d’ailleurs ou d’ici.
Patrick Daquin, 16 Mars 2012