UCJS - table ronde du 18 novembre 2009 – dossier de presse
Contact presse : Maxime Combes – 06 24 51 29 44 Pierre Lucot - 06 60 68 30 00
http://climatjustice.org/
Devant l’enjeu que constitue pour l’avenir climatique le sommet de Copenhague, près de 40 organisations citoyennes se sont reconnues dans une nouvelle revendication : celle mettant en avant le lien existant entre l’urgence climatique et la justice sociale.
Pour la première fois, un collectif d’organisations citoyennes a su dépasser les clivages pouvant exister entre objectifs environnementaux et sociaux pour établir ce lien posant les bases d’un nouveau paradigme militant.
Celui-ci est porteur du constat suivant : les réponses à apporter à l’urgence climatique sont indissociables de la justice sociale.
Non seulement parce que les premières victimes d’un dérèglement climatique seront en premier lieu les actuelles victimes de l’injustice sociale, mais aussi parce que les réponses politiques à apporter au défi environnemental sont indissociables d’un projet de société fraternelle mettant radicalement en question le système socialement injuste à l’origine de la catastrophe climatique annoncée.
Pourtant, ce n’est pas seulement parce que le gauche est historiquement porteuse des combats de la justice sociale, qu’elle serait aujourd’hui capable de répondre au défi climatique.
Cette incapacité sera en effet sans appel si son projet alternatif ne s’appuie pas sur une remise en cause fondamentale des mécanismes politiques, sociaux et économiques dont la simple réforme est incompatible avec l’ampleur et l’urgence de l’enjeu climatique.
Cette urgence, si celle-ci est vécue quotidiennement par le milliard d’êtres humains souffrant de la faim ou par les autres milliards d’individus vivant dans la précarité, n’est qu’une simple variable adaptable pour toute une oligarchie politique et économique pour qui la seule urgence est celle du profit, de la croissance et de la consommation. L’illusion de sa réponse est à la hauteur de son aveuglement : elle a pour formules « progrès technique » ou « croissance verte », inscrites dans des perspectives temporelles qui prennent en compte la seule capacité d’évolution du système en vue de sa sauvegarde.
Cette urgence, cette temporalité associée à l’action et au projet politique est cependant une donnée nouvelle pour beaucoup de ceux qui combattent depuis toujours les injustices issues de cette domination.
C’est pour évaluer avec l’ensemble de ses composantes ses capacités à apprécier et analyser l’urgence de l’enjeu historique que le collectif UCJS a pris cette première initiative de débat avec les organisations de gauche autour des thématiques principales énoncées à l’occasion du sommet de Copenhague.
Puisse cette première rencontre, ouvrir un processus permettant à la gauche de mesurer l’ampleur de la réforme idéologique nécessaire afin qu’elle puisse être porteuse de l’espoir d’une transition fraternelle, inscrivant durablement et entre tous la répartitions des richesses, c’est l’appel que l’ensemble des organisations du collectif lui lance.
Pierre Lucot pour UCJS
Sommaire :
1 - La table ronde du 18 novembre , un point presse exceptionnel
2 - UCJS : plate forme et signataires
3 - UCJS : communiqué de presse du 6 novembre, de Barcelone à Copenhague
4 - 6 questions enjeux de Copenhague pour l’urgence climatique et la justice sociale
5 - Réponses des partis et organisations :
Les Verts Parti de Gauche Parti Communiste Français Nouveau Parti Anticapitaliste Les Alternatifs Fédération pour une Alternative Sociale et Ecologique Association des Objecteurs de Croissance
1 - La table ronde du 18 novembre, un point presse exceptionnel
Un mois avant la fin des négociations de Copenhague, le collectif Urgence Climatique Justice Sociale, regroupant plus de quarante associations, mouvements et partis*, a organisé un point presse exceptionnel.
Les représentants et responsables environnement / climat des principaux partis ou mouvements de gauche – PS, Verts, PCF, PG, NPA, Alternatifs, Fédération pour une Alternative Sociale et Ecologique et Objecteurs de Croissance – ont répondu à une liste de « 6 questions pour le climat » et ont accepté de présenter et confronter leurs positions et propositions sur le rendez-vous de Copenhague à l’occasion d’une table ronde qui a réuni pour la première fois les représentants politiques de toute la gauche.
Le Collectif Urgence Climatique Justice Sociale a invité les organisations politiques de gauche à débattre devant la presse de leurs réponses autour de trois thématiques principales :
1- L’impasse de Copenhague : quelles mesures prioritaires à prendre, comment en garantir l’application et peut-on sauver le climat sans changer de système
2 - Les relations Nord/Sud, la question de la dette écologique et des MDP
3 - La financiarisation du carbone et la fiscalité écologique
2 - UCJS : plate forme et signataires
Voir sur ESSF : Urgence climatique, justice sociale - Copenhague décembre 2009
3 - UCJS : communiqué de presse du 6 novembre
Voir sur ESSF : Copenhague : A J-30 : “Des mesures véritablement alternatives sont nécessaires”
6 QUESTIONS pour le CLIMAT et la JUSTICE SOCIALE
4 - 6 questions : enjeux de Copenhague pour l’urgence climatique et la justice sociale avant Copenhague ... « changer de système pour sauver le climat et garantir la justice sociale ? »
Questionnaire adressé aux partis de gauche : Parti Socialiste, les Verts, Parti Communiste Français, Parti de Gauche, Les Alternatifs, Fédération ASE , Association des Objecteurs de Croissance.
6 QUESTIONS pour le CLIMAT et la JUSTICE SOCIALE
Q1 : - Quel serait pour vous un « bon accord » à Copenhague ?
et quel engagement de réduction des GES induirait-il pour la France et l’UE ?
Q2 : quelle est la mesure prioritaire à mettre en œuvre pour engager le respect
de cet accord nationalement et à l’échelle de l’Europe ?
Q3 : quelle mesure européenne pourrait être considérée comme prioritaire pour l’impact international qu’elle pourrait avoir vis à vis des pays du Sud ?
Q4 : Comment envisagez-vous la contribution et les mécanismes de réduction et d’adaptation dans les Pays du Sud auxquels se soumettront l’Europe et de la France pour la réalisation des objectifs de l’accord ?
Q5 : Jugez vous nécessaire de mettre en place une fiscalité du carbone au niveau
des états et de l’Europe ? Si oui sous quelle forme la jugeriez vous la plus efficace pour le climat et le soutien aux pays du Sud.
Q6 : Etes vous favorables à la financiarisation du carbone telle qu’elle a été initiée dans le cadre du processus de Kyoto et si non, quelles mesures proposez vous si vous jugez opportun de donner un coût au carbone ?
5 - Réponses des partis et organisations :
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Les Verts
Quel serait pour vous un « bon accord » à Copenhague ? et quel engagement de réduction des GES induirait-il pour la France et l’UE ?
Il n’y a pas de solution technique miraculeuse, du type : recours massif au nucléaire. L’effort à accomplir pour stabiliser la température à 2°C est donc incontournable : d’ici à 2020, les pays industrialisés doivent réduire de 40% leurs émissions de gaz à effet de serre et mobiliser, chaque année, plus de cent milliards d’euros de financement pour aider les pays du Sud à faire face au défi climatique.
Un « bon accord » à Copenhague :
Le monde doit stopper la croissance de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2015 puis les réduire. Les pays industrialisés doivent réduire collectivement leurs émissions de 40% d’ici à 2020, par rapport à 1990. Cet objectif doit s’appliquer à la France.
Les pays du Sud doivent être soutenus pour faire face au changement climatique.
Les pays industrialisés doivent payer leur dette climatique et mobiliser 120 milliards d’euros par an d’ici à 2020, dont 35 pour l’Europe (4 pour la France). Ces financements publics ne doivent bien évidemment pas se substituer aux promesses d’aide publique au développement dans les domaines de la santé, l’éducation....
Il est impératif d’éviter la diffusion de fausses solutions, dangereuses, comme le nucléaire ou le captage et stockage de carbone.
L’accord doit être contraignant et donc inclure un mécanisme de contrôle crédible, a minima celui du Protocole de Kyoto.
Etant donné les évolutions de la science du climat, les engagements doivent être révisables tous les 5 ans.
La lutte contre la déforestation (20% des émissions) doit être intégrée à l’accord.
Pour les technologies et savoirs concernant le climat et la limitation des pollutions des
dérogations aux régimes de protection habituels des droits de propriété intellectuelle
Quelle est la mesure prioritaire à mettre en œuvre pour engager le respect de cet accord nationalement et à l’échelle de l’Europe ?
En matière de lutte contre les changements climatiques, il n’y a pas de mesure miracle mais bien des stratégies complètes à mettre en œuvre. Le paquet Energie Climat européen constitue une méthode intéressante mais les objectifs doivent être renforcés car les fameux « 3 fois 20 » ne sont pas suffisants si nous voulons réduire les émissions de 40%.
Une priorité pour parvenir à atteindre les objectifs est de rendre l’effort d’efficacité énergétique contraignant, il est pour l’instant indicatif. Or, sans réduction des consommations d’énergie, il sera impossible de respecter les autres. Cela implique une remise en question du « tout - croissance » non seulement dans les politiques, mais aussi dans le discours et le comportement. Et ça n’est possible que si cela s’inscrit dans une politique de justice sociale.
Au niveau national, mais aussi de chaque territoire, nous savons quelles sont les priorités : réduction du transport routier et rénovation des bâtiments doivent faire l’objet d’une mobilisation constante.
Quelle mesure européenne pourrait être considérée comme prioritaire pour l’impact international qu’elle pourrait avoir vis à vis des pays du Sud ?
Il faut veiller en particulier à ce que l’UE ne se défausse pas de ses responsabilités historiques, de sa dette écologique vis à vis des Pays du Sud tant en matière d’engagements que de financement de l’adaptation. Les propositions actuelles sont largement inacceptables.
En termes de financements de la réduction des émissions et de l’adaptation (le PNUD estime les besoins à 86 milliards d’euros d’ici 2015 pour la seule adaptation des PMA et pays OASIS), nous estimons que l’UE doit s’engager sur des montants à la hauteur des enjeux et de sa responsabilité (35 milliards d’euros par an).
Enfin, pour peser, l’UE doit être exemplaire en se fixant un objectif de réduction de ses gaz à effet de serre non pas de 20 % en 2020 mais de 40%, et de 90 % pour 2050. Cette réduction doit être domestique et ne pas faire appel aux mécanismes de compensation.
Comment envisagez-vous la contribution et les mécanismes de réduction et d’adaptation dans les Pays du Sud auxquels se soumettront l’Europe et de la France pour la réalisation des objectifs de l’accord ?
En plus des réductions d’émissions dans les pays développés, les scénarios du GIEC les plus ambitieux – qui permettent cependant de n’avoir qu’une chance sur deux de ne pas dépasser un réchauffement de 2°C – requièrent des actions fortes dans les pays en développement. D’après certains scientifiques, ils doivent faire dévier leurs émissions de 15 à 30 % d’ici 2020 par rapport à la tendance (en plus des réductions d’émission réalisées par le système de compensation carbone).
Il est nécessaire que les économies émergentes établissent des plans clairs afin d’atteindre cette déviation. Mais il est clair que, étant donné la faible responsabilité des pays en développement dans le réchauffement mondial et leur faible capacité économique, ils ne devraient pas avoir à en supporter la responsabilité financière. Les pays industrialisés doivent donc financer la majeure partie des efforts d’atténuation et d’adaptation dans les pays en développement.
Les Verts estiment que les pays industrialisés devraient mobiliser chaque année 120 milliards d’euros (80 pour l’atténuation, 40 pour l’adaptation) de fonds publics d’ici 2020. Le minimum absolu pour les Verts est que tout financement de l’adaptation soit supplémentaire, c’est à dire ne se substitue pas aux engagements d’Aide Publique au Développement (APD) des pays industrialisés. La représentation des pays dans la gouvernance de ces fonds devrait être équilibrée.
La part équitable de l’UE dans cet effort de financement s’élève à 35 milliards d’euros par an d’ici 2020. Ces fonds pourraient, par exemple, être issus du revenu généré par la vente aux industriels européens des quotas d’émission du marché carbone européen ou de l’instauration d’une taxe sur les transactions financières. La responsabilité des pays industrialisés dans le financement de l’atténuation dans les pays en développement pourrait également être mise en œuvre sous la forme d’un objectif de réduction d’émissions double de la part des pays industrialisés. En plus des réductions domestiques de gaz à effet de serre, ces pays devraient financer des réductions dans les pays en développement correspondant à un certain pourcentage de leurs propres émissions.
Jugez vous nécessaire de mettre en place une fiscalité du carbone au niveau des états et de l’Europe ? Si oui sous quelle forme la jugeriez vous la plus efficace pour le climat et le soutien aux pays du Sud.
Les Verts estiment qu’il est indispensable de mettre en place une fiscalité climat-énergie couvrant toutes les consommations d’énergie. Le produit de cette fiscalité devra être utilisé pour mettre en œuvre les politiques de maîtrise des consommations et émissions et développement des énergies renouvelables ainsi que pour accompagner les ménages et entreprises les plus modestes.
Etes vous favorables à la financiarisation du carbone telle qu’elle a été initiée dans le cadre du processus de Kyoto et si non, quelles mesures proposez vous si vous jugez opportun de donner un coût au carbone ?
Donner un « prix » au carbone est nécessaire pour que l’économie prenne en compte le coût pour la collectivité de son accumulation dans l’atmosphère.
Nous privilégions une approche par la fiscalité et les politiques et mesures domestiques.
La financiarisation du carbone a largement montré ses limites ces dernières années : prix trop bas, mauvaise prise en compte des réductions pour les gaz autres que le CO2, malversations et surtout impact restreint sur le volume des émissions. Les Verts se sont battus et continueront à le faire pour que le marché du carbone européen soit assaini, et notamment que l’on cesse d’allouer gratuitement des droits aux industriels.
Les mécanismes économiques – même réduits à des instruments de flexibilité limités – doivent être très sévèrement encadrés et surveillés au même titre que les marchés financiers. L’enjeu climatique ne supporte pas la spéculation.
Parti de gauche
Quel serait pour vous un « bon accord » à Copenhague ? et quel engagement de réduction des GES induirait-il pour la France et l’UE ?
Un bon accord comprendrait trois conditions : le respect des préconisations du GIEC en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre par les pays industrialisés, la non mise en place d’une finance carbone et autres fausses bonnes solutions, et le financement par les pays industrialisés de l’adaptation au changement climatique des pays en développement dans le cadre d’un fonds onusien. Cela passe donc par un accord nécessairement contraignant et donc juridiquement établit. Nous ne pourrons nous contenter d’une déclaration politique de cadrage et donc laissée au bon vouloir des gouvernements. Deuxième fait important pour être un bon accord, les pays du Nord doivent reconnaître la dette écologique et climatique qu’ils ont contractée avec les pays du Sud. Ce sont eux qui devront faire à ce titre les plus gros efforts de réduction et de financement.
Respect des préconisations du GIEC : diminution de 40% des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020 dans les pays industrialisés, dont ceux de l’Union européenne et la France ; et baisse de 85 à 95% d’ici 2050.
Pas de marché carbone : il n’est ni politiquement acceptable, ni techniquement efficace de jouer les émissions de gaz à effet de serre aux cours de la bourse. Après le dernier krach de l’économie casino des subprimes, on comprend l’empressement des institutions financières à replacer leur monnaie sur de nouvelles « valeurs ». Mais le climat ne peut pas être otage de la finance. Le précédent marché européen s’est effondré en ruinant tous les maigres efforts faits par les entreprises. Et déjà, de nombreux titres MDP pourris existent, qui risquent à terme de faire craquer le futur marché international. Les objectifs de réduction doivent être atteints au sein de chaque Etat, pas en les jouant à la bourse ou en investissant dans d’autres pays comme incitent à le faire les mécanismes MOC et MDP. Dans le même ordre d’idée, les fausses bonnes solutions de type développement du nucléaire ou stockage du carbone sont à proscrire et ne doivent en aucun cas bénéficier de l’urgence climatique pour être mise sur le devant de la scène. Elles ne sont en rien une solution, mais bien une partie du problème.
Financement onusien de l’adaptation au changement climatique : les pays en développement, notamment l’Afrique subsaharienne, seront les premières victimes du réchauffement dont ils ne sont pas responsables. Les pays industrialisés doivent reconnaître leur dette écologique, et abonder un fonds onusien pour aider ces pays à s’adapter au changement climatique. La création d’un statut de « réfugié climatique » doit également être posée.
Enfin, un bon accord à Copenhague, dont la perspective est malheureusement de plus en plus lointaine, passerait nécessairement par une discussion préalable sur l’analyse en profondeur des causes de l’impasse actuelle, et donc la remise en cause du système capitaliste, de la logique productiviste et des règles de libre échange du commerce mondial.
Quelle est la mesure prioritaire à mettre en œuvre pour engager le respect de cet accord nationalement et à l’échelle de l’Europe ?
La mise en place d’un « Plan climat énergie » contraignant, national et européen est une nécessité. Il s’agit de planifier, sur la base de débats démocratiques nationaux et européens, la transition énergétique de l’Europe, ainsi que la nécessaire révolution de ses modes de production, de consommation et de vie. Elle suppose la mise en place d’un pôle public européen de l’énergie, capable d’assurer la sécurité des approvisionnements en énergie dans les années à venir et d’investir dans la recherche en efficacité énergétique et en énergie renouvelables. La nécessaire sobriété énergétique à venir implique également de supprimer la privatisation du marché de l’énergie. Sinon, on le voit bien depuis sa mise en place, tous les opérateurs, EDF compris, sont incités à pousser les consommateurs à consommer toujours plus, et investissent dans les technologies les plus hautement capitalistiques et les plus rentables à court terme, comme le nucléaire et le charbon (qu’ils veulent nous vendre comme propre) plutôt que de miser sur les énergies de demain. Cela implique la remise en cause des traités qui régissent actuellement l’Union Européenne et du Traité de Lisbonne qui au nom du principe de « concurrence libre et non faussée » interdisent le recours à des mesures véritablement écologistes et sociales.
Quelle mesure européenne pourrait être considérée comme prioritaire pour l’impact international qu’elle pourrait avoir vis à vis des pays du Sud ?
La réforme de la PAC serait un signe fort envoyé aux pays du Sud, alliée à la renégociation des accords de libre échange entre l’Union européenne et les pays en développement dans le cadre de l’OMC. Aujourd’hui, l’existence d’un marché mondial de l’agriculture, sur lequel entrent en concurrence des produits cultivés sur les terres arides et quasiment sans engrais du Burkina Faso avec ceux produits à grands renforts de technologie et de capitaux sur les terres grasses de l’Europe, du Brésil ou de l’Australie, est évidemment une catastrophe pour les pays en développement qui ne peuvent concourir à égalité. Résultat : 1 milliards de personnes ne mangent pas à leur faim dans le monde, dont 800 millions de paysans qui ne sont pas aidés par leurs Etats et souffrent de concurrence déloyale. C’est d’ailleurs le même mécanisme pour les produits manufacturés. Les pays en développement, sans possibilité de protéger leur industrie naissante, ne pourront jamais se développer.
Ainsi, au-delà de tous les fonds qui pourront être versés aux pays du Sud, il faut d’abord leur permettre de garantir leur souveraineté alimentaire et industrielle pour construire leur développement. Cela passe également par exemple par l’abandon des politiques de développement des agrocarburants, qui rentrent en compétition avec les cultures vivrières, et par des politiques volontaristes d’aide à l’agriculture paysanne biologique, au Nord comme au Sud.
Comment envisagez-vous la contribution et les mécanismes de réduction et d’adaptation dans les Pays du Sud auxquels se soumettront l’Europe et de la France pour la réalisation des objectifs de l’accord ?
Les pays du Sud doivent s’engager sur des objectifs en matière environnementale, mais ils doivent pouvoir décider eux-mêmes de leurs mécanismes d’adaptation au changement climatique. Les financements du Nord doivent donc transiter sous forme de subventions par un fonds onusien, géré démocratiquement, si possible en y associant la société civile, et non par de nouveaux prêts concédés par la Banque mondiale ou le FMI avec leurs critères habituels. Les taux de financement doivent être calculés pays par pays, en fonction de leur contribution au réchauffement climatique et de leur exposition au changement climatique. Des financements complémentaires peuvent être envisagés, notamment la taxe Tobbin sur les marchés de capitaux, afin de ne pas retomber dans le piège de l’APD qui, malgré tous les efforts et les effets d’annonce, reste bien en-deça des objectifs annoncés de 0,7% du PIB des pays.
Enfin, un accord doit être trouvé sur des mécanismes de compensation permettant aux pays du Sud de s’engager sur la préservation de biens publics mondiaux, comme par exemple la proposition de l’Equateur sur l’exploitation de ses ressources pétrolières.
Jugez vous nécessaire de mettre en place une fiscalité du carbone au niveau des états et de l’Europe ? Si oui, sous quelle forme la jugeriez vous la plus efficace pour le climat et le soutien aux pays du Sud ?
La fiscalité carbone a, selon ses promoteurs, un effet incitatif à réduire ses émissions. Et pourtant. les mécanismes de marché de type taxe carbone ne sont ni suffisants ni nécessaires pour changer les comportements des consommateurs. Il n’y a qu’à voir le prix du tabac... Les hausses successives réduisent pendant un temps la consommation, et celle-ci repart ensuite de plus belle quand les gens sont habitués au nouveau prix. La mise en place de la « taxe carbone » Sarkozy va pénaliser les petits consommateurs, qui n’ont pas les moyens de se déplacer en transports en commun et de rénover leur logement, sans leur donner les moyens de s’affranchir de cette dépendance. Elle est donc injuste socialement et inefficace écologiquement.
Nous devons réduire nos émissions de gaz à effet de serre (voir question 2) et réussir un nouveau « mix » énergétique qui combine sobriété, efficacité et ENR. La sobriété devra se mener comme une bataille culturelle. Elle sera difficile à obtenir car aujourd’hui toute la publicité et le marketing capitalistes poussent à dire que « + = mieux ». Mais cela ne se fera pas en taxant les gens d’un côté et en les faisant rêver sur des 4*4 à grands renforts de panneaux publicitaires de l’autre.
La réponse au défi climatique ne pourra donc passer que par une nouvelle répartition des richesses et la réduction des inégalités sociales. Entre autres mesures présentées dans la proposition de loi du PG sur la fiscalité écologique, figurent notamment à ce titre l’instauration du Revenu Maximal Autorisé (RMA) et l’étude pour la mise en place de premières tranches d’eau et d’énergie gratuites.
De toute évidence, nous vivons la fin de l’énergie bon marché. Et nous risquons de connaître un regain de tensions internationales pour l’accès à certaines ressources naturelles limitées et/ou en voie d’épuisement. Dans un contexte de dérèglement climatique et de pic du pétrole, le développement de géants économiques comme la Chine et l’Inde va accroître les tensions sur les marchés mondiaux pour l’accès à l’énergie et aux matières premières. L’Union européenne devra non seulement trouver les moyens d’assurer sa sécurité énergétique sans entrer dans les conflits mais aussi de garantir un prix maîtrisé de l’énergie pour ses habitants. Cela ne peut se faire que par la collectivité publique, seule à même de prendre en compte l’intérêt général, et ce, sur le long terme.
Etes vous favorables à la financiarisation du carbone telle qu’elle a été initiée dans le cadre du processus de Kyoto et si non, quelles mesures proposez vous si vous jugez opportun de donner un coût au carbone ?
La finance carbone n’est pas acceptable. Il est possible aujourd’hui de mesurer les émissions de GES sans leur donner un coût. Les objectifs de réduction doivent être pris en charge par les Etats en comptabilisant l’ensemble des émissions produites par leurs populations et leurs entreprises. Ensuite, chaque Etat est libre d’utiliser les moyens qu’il souhaite pour réduire ces émissions.
Plus généralement, la mondialisation libérale des échanges mise en place depuis le début des années 80 avec Reagan et Thatcher a fait exploser les émissions de GES en incitant les entreprises à délocaliser leurx chaînes de production dans les pays les plus avantageux pour leurs profits. Résultat : un jeans fait aujourd’hui 30 000 km pour être produit et un litre de yaourt 9 000 ! Avec autant d’effet de serre à la clé... Dès lors, la mise en place d’une taxe aux frontières de l’Europe, de type énergie-climat, ou tout simplement de nouveaux droits de douane (dont les recettes pourraient être affectées au développement des pays du Sud) peut être un des moyens de remettre en cause ce mouvement de mondialisation libérale. Ce n’est pas le seul.
Contacts : Parti de Gauche Elodie VAXELAIRE, Secrétaire nationale à la Planification écologique, 06 75 30 18 49 Mathieu AGOSTINI, Coordinateur Copenhague, mathieu.agostini gmail.com Corinne MOREL DARLEUX, Secrétaire nationale au Combat écologique
Parti Communiste Français
Quel serait pour vous un « bon accord » à Copenhague ? Et quel engagement de réduction des GES induirait-il pour la France et pour l’UE ?
Un « bon accord » devrait avant-tout pouvoir fixer les engagements contraignants sur le plan juridique de réduction d’émission de gaz à effet serre des principaux pollueurs de la planète. L’effort prioritaire est celui des pays développés qui représentent 25 % de la population mondiale et 50 % des émissions de gaz à effet de serre. L’objectif des pays développés, de l’Union européenne comme des États-Unis, doit pour être à la hauteur des enjeux se situer dans le haut de la fourchette 25-40 %. Ces pays doivent fournir un effort équivalent. Ils doivent par ailleurs apporter un soutien financier et technologique aux pays en développement pour permettre à ceux-ci d’atteindre leurs propres objectifs contraignants.
Quelle est la mesure prioritaire à mettre en œuvre pour engager le respect de cet accord nationalement et à l’échelle de l’Europe ?
Nous proposons la création en France d’un pôle public de l’énergie, point d’appui et levier pour un pôle public de coopération de dimension européenne. Il organiserait des actions directes pour la transformation du système productif et de consommation. Il développerait des interventions sur les gestions des entreprises pour les responsabiliser. En particulier, il ferait respecter des normes écologiques efficaces. Pour changer réellement la donne, il faut développer la recherche en multipliant par quatre les investissements dans l’efficacité énergétique et dans les technologies propres dans tous les domaines, en particulier dans les transports (fret ferroviaire, motorisation propre) et dans l’habitat (normes HQE). Nous proposons également la création d’une assemblée représentative de l’ensemble des chercheurs auprès du Parlement européen visant à organiser les coopérations et non la concurrence.
Quelle mesure européenne pourrait être considérée comme prioritaire pour l’impact international qu’elle pourrait avoir vis à vis des pays du Sud ?
L’Union européenne doit s’engager sur des propositions d’aide précises et chiffrées qui font défaut aujourd’hui. Nous proposons que cet engagement soit de 40 milliards d’euros par an. Mais le système de financement des investissements qui prévaut en Europe et en France bloque ce processus : les banques centrales n’ont pas pour mission de faciliter la réorientation des crédits vers ce type d’investissement utile ; en outre, la fiscalité favorisant les grandes fortunes et les enrichissements boursiers, les États se retrouvent avec peu de ressources à consacrer à ce type de mission. Il faut donc changer en profondeur la façon dont l’argent est utilisé à l’échelle de l’Europe et, en ce sens, il est urgent de remettre en cause l’indépendance de la BCE.
Comment envisagez-vous la contribution et les mécanismes de réduction et d’adaptation dans les Pays du Sud auxquels se soumettront l’Europe et de la France pour la réalisation des objectifs de l’accord ?
L’effort des pays émergents est incontournable, mais il doit être demandé suivant le principe de base de la convention de Rio de 1992 : « responsabilités communes mais différentiées des pays développés et en développement, ceux -ci agissant en fonction de leur capacités respectives ». C’est après avoir demandé à tous les pays développés de s’engager sur une pente de 25-40 % qu’on peut demander -15 - 30 % par rapport à la tendance aux pays en développement. On peut d’ores et déjà souligner les progrès importants accomplis par la Chine et l’Inde en matière d’énergies renouvelables et de dispositifs de lutte contre l’effet de serre. Les pays les moins avancés, qu’on trouve notamment en Afrique doivent être la préoccupation première : ce seront les premières victimes de l’effet de serre (sècheresses, maladies, migrations, zones cultivables moins étendues). Conformément au plan d’action adopté à Bali en décembre 2007, les pays développés doivent apporter un soutien financier et technologique aux pays en développement pour atteindre leurs objectifs contraignants : 120 milliards d’euros par an d’ici 2020 est l’objectif à atteindre.
Jugez-vous nécessaire de mettre en place une fiscalité carbone au niveau des États et de l’Europe ? Si oui, sous quelle forme la jugeriez-vous la plus efficace pour le climat et le soutien aux pays du Sud ?
Développer une fiscalité environnementale est utile. En France, elle existe déjà en partie avec des réductions d’impôt sur le revenu des ménages dès lors qu’ils investissent dans des technologies propres ou bien dans l’utilisation des énergies renouvelables pour leur habitation. Mais nous nous inscrivons contre la taxe carbone telle que récemment mise en place par le gouvernement. Aussi injuste que la TVA, elle contribue comme elle au transfert de l’assiette de la fiscalité, du capital vers les ménages. Compte tenu de l’enjeu considérable que constitue l’effort à produire pour rentrer dans les clous de la réduction de 40 % de l’émission des gaz à effet de serre, c’est à une autre échelle que doivent être mobilisés les financements. Si une taxation est envisageable, elle devrait introduire une modulation incitative de l’impôt sur les sociétés au lieu de taxer la dépense des ménages. Mais elle ne suffirait pas car elle peut être contournée et compensée de façon perverse. Il faudrait, au-delà, développer un nouveau crédit incitatif à taux d’intérêt très abaissé pour de nouveaux types d’investissements matériels et de recherche visant la réduction des pollutions et des émissions de gaz à effet de serre. Un fonds national pourrait agir dans ce sens en utilisant, précisément, une partie de l’argent public aujourd’hui gâché pour des exonérations de cotisations sociales patronales. Toutefois, on ne peut évidemment pas s’en tenir au cadre national. La réorientation de la construction européenne et des missions de la banque centrale doivent être au cœur de toutes les mobilisations. Il s’agit d’en finir avec l’exacerbation de la concurrence dans l’énergie et les transports, en finir avec les privatisations conduisant au dumping social et environnemental, au tout-camion pour la circulation des marchandises, au détriment du rail, du ferroutage et du fluvial. A l’inverse il faut développer des coopérations européennes entre services publics.
Êtes-vous favorables à la financiarisation du carbone telle qu’elle a été initiée dans le cadre du processus de Kyoto et si non, quelles mesures proposeriez-vous si vous jugez opportun de donner un coût au carbone ?
Combattre sérieusement le réchauffement climatique et préparer la révolution énergétique, c’est s’attaquer à la logique de la rentabilité qui caractérise le capitalisme financier mondialisé. L’instauration « des droits à polluer » dans l’industrie et les spéculations qui les accompagnent montre que ce système de quota échangeable est peu efficace : on ne peut compter sur le marché pour baisser les contributions des grands groupes et des pays. Il s’agit d’inventer un mode de développement et donc de production qui refuse et remplace l’actuel système productiviste capitaliste. Pour cela, il faut réfléchir à un type de productivité basé sur de nouveaux critères de gestion.
Nouveau Parti Anticapitaliste
Quel serait pour vous un « bon accord » à Copenhague ? Et quel engagement de réduction des GES induirait-il pour la France et l’UE ?
La première chose à dire, c’est qu’on sait déjà qu’il n’y aura pas de bon accord à Copenhague. Ce n’est pas faire preuve de pessimisme que de dire cela, mais les tendances qui étaient celles des négociations précédentes s’accentuent, les grandes puissances et les industriels refusant tout changement substantiel du système. A contrario donc de ce qui se profile, nous défendons donc l’objectif d’un traité international juste, solidaire et efficace, en prenant la mesure des ruptures à opérer pour atteindre cet objectif.
– Juste, c’est à dire qui fasse payer le coût des transformations à opérer par les riches, non par les pauvres, en finançant les mesures à partir des profits non des salaires.
– Solidaire, c’est-à-dire fondé sur le principe de responsabilité différenciée entre le Nord et le Sud, donc qui fasse payer le Nord pour le Sud dans la perspective du remboursement de la dette écologique contractée depuis des décennies, et qui organise les transferts de technologies et suspende les brevets. Cela implique immédiatement l’annulation de la dette financière.
– Efficace, c’est-à-dire faisant sien les objectifs du GIEC et se calant sur le haut des fourchettes des prévisions, mais aussi sans marché de droits à polluer et sans taxe carbone, instruments inefficaces écologiquement et socialement injustes. Nous exigeons donc que les objectifs de l’UE, et par conséquent de la France, soient de 40 % de diminution des émissions de gaz à effet de serre.
Quelle est la mesure prioritaire à mettre en œuvre pour engager le respect de cet accord nationalement et à l’échelle de l’Europe ?
Poser la question de LA mesure prioritaire limite fortement la portée de nos réponses, et ne prend pas en compte la complexité des problèmes. Nous préférons défendre un corps de revendications d’urgence en leur donnant une cohérence. Et même s’il fallait commencer à modifier en profondeur un secteur économique, cela affecterait nécessairement les autres. Ce serait donc démagogique de se baser sur une seule mesure phare. Pour que des objectifs ambitieux se concrétisent, il faut revenir sur les politiques climatiques actuelles, comme par exemple le paquet climat-énergie de l’Union Européenne, qui non seulement fixe des objectifs de réduction de GES trop faibles, mais qui cherche accentuer les mécanismes marchands, les droits à polluer à développer les agrocarburants ; le tout, bien sûr, en l’absence d’une quelconque dimension sociale. On pourrait dire des choses similaires du plan climat d’Obama, tant dans les objectifs que dans la manière de les atteindre. Nous devons opposer à cette logique, une série de ruptures dans l’ordre économique et productif, qui permettent à la fois de répondre aux besoins sociaux et d’enclencher un mouvement de décarbonisation de l’économie.
Impossible d’être exhaustifs en quelques lignes ; mentionnons seulement :
– Il faut résolument sortir du tout routier que ce soit pour le transport de marchandises ou pour le transport de personnes. Cela suppose un service public de transports en commun de personnes, qui les rende gratuits, en priorité pour les transports de proximité. La reconversion d’une grande partie de l’industrie automobile doit être engagée. S’agissant des marchandises, il faut en finir avec le tout camion. Le transport de marchandises par camion doit être réservé aux courtes distances, et donc interdit sur les longues distances, de même que le transit routier et pour les lignes aériennes court courrier. Un service public de transport unifié doit permettre d’organiser le transport des marchandises au-delà des trajets locaux. Un plan de reconversion des conducteurs routiers et autres salariés de ces entreprises doit être mis en place.
– On ne peut changer le système des transports sans bouleverser la production. Le développement fantastique des échanges croisés de marchandises dévoile l’aberration écologique et sociale du système de production et d’échanges. Il ne s’agit donc pas seulement de remplacer un mode de transports par un autre ; en effet, toutes les marchandises actuellement transportées ne pourront être mises sur des trains. Une grande partie de la production doit être relocalisée dans des circuits courts.
– L’agriculture doit avant tout remplir sa mission alimentaire, écologique, territoriale et sociale. Pour ce faire elle ne doit ni avoir comme objectif d’être concurrentielle dans un marché international, ni d’augmenter les rendements à l’aide d’une consommation trop importante d’intrants, ni de compromettre les équilibres futurs en inventant des OGM ou des agrocarburants. Il nous faut une agriculture qui permette aux producteurs de vivre décemment de leur travail sans être contraints d’intensifier leur production. Il faut favoriser l’installation massive d’agriculteurs pour permettre l’approvisionnement de proximité avec des produits de qualité pour tous et toutes, à des prix accessibles. Cela implique de sortir l’agriculture du cycle de négociations de l’OMC, de définir une nouvelle Politique Agricole Commune, avec des quotas de production et des aides soumises au respect de conditions sociales et environnementales de production.
– La grande distribution et le négoce doivent être réorganisés : leur passage sous contrôle public doit conduire à la relocalisation de la distribution et à la remise en cause du pouvoir économique de ce secteur qui étrangle les petits paysans tout en surexploitant ses salariés.
– Un grand service public du logement et de l’isolation doit être mis en place afin de planifier la rénovation écologique du parc existant, et d’imposer le respect des nouvelles normes de construction (généralisation des bâtiments à énergie positive). Une réorganisation du secteur de la construction doit s’accompagner d’une transformation complète des conditions de travail des salariés de la construction, notamment l’interdiction de la sous-traitance en cascade, et des formations sur l’utilisation de matériaux naturels ou de techniques d’isolation bio- climatiques.
– Un coup d’arrêt doit être porté à la dispersion de l’habitat.
– L’alternative énergétique doit combiner une réduction de grande ampleur de la consommation énergétique avec le développement massif des énergies renouvelables. Cela implique l’appropriation publique et sociale des grandes entreprises du secteur et leur intégration dans un service public unifié de l’énergie décentralisé et démocratique, c’est-à-dire contrôlé par les salariés et la population. Un plan de reconversion des industries polluantes doit être mis en place. Les contrats de travail doivent être maintenus, avec les rémunérations et l’ensemble des droits sociaux. Dans le même temps, il faut créer les milliers d’emplois nécessaires dans les domaines des énergies renouvelables et des économies d’énergie. Enfin, précisons que pour nous le nucléaire n’est pas la solution, mais bien une partie du problème. D’ure part le nucléaire ne peut prendre la relève des énergies fossiles comte tenu des réserves disponibles en aluminium, mais surtout cette énergie fait courir des risques graves non maîtrisés aux générations actuelles et futures (risque d’accident majeur, prolifération déchets).
Quelle mesure européenne pourrait être considérée comme prioritaire pour l’impact international qu’elle pourrait avoir vis à vis des pays du Sud ?
Là encore, difficile de condenser en une seule réponse. Se pose bien entendu la question du financement des politiques d’adaptation, mais également de la façon dont l’Union Européenne traite les pays du Sud dans ces politiques climatiques, en délocalisant ses objectifs de réduction de gaz à effet de serre, via les mécanismes de développement propre. Il faut stopper ces politiques, l’Union Européenne doit diminuer ses émissions de gaz à effet de serre à la source. C’est d’abord là la priorité. Elle devrait également rompre avec la mondialisation libérale, notamment à cause des flux-tendus et de l’explosion des transports routiers qu’elle induit, de façon d’une part à redonner aux cultures vivrières locales toute leur importance sans la mettre en concurrence avec l’agriculture productiviste subventionnée par l’UE ; d’autre part à réduire la logique exportatrice de l’agriculture des pays du Sud, dans l’objectif de leur souveraineté alimentaire et de diminution des flux de marchandises sur la planète. Mais si on ne veut pas se contenter de vœux pieux, il faut bien avoir conscience de la responsabilité majeure de l’Union Européenne dans cette situation, en tant qu’un des acteurs principaux de la mondialisation libérale. Il ne s’agit donc pas de demander à l’Union Européenne actuelle de prendre telle ou telle mesure, mais de se battre sur tout le continent pour une autre Europe.
Comment envisagez-vous la contribution et les mécanismes de réduction et d’adaptation dans les Pays du Sud auxquels se soumettront l’Europe et de la France pour la réalisation des objectifs de l’accord ?
Pour le moment, l’état des négociations sur les fonds de réduction et d’adaptation, tant leur financement que leur gestion, relève plus de l’impérialisme ou du néo-colonialisme que de la solidarité internationale. D’une part les pays où se trouvent les populations les plus affectées par les changements climatiques sont devoir participer à l’effort financier pour faire face à la situation produite par le mode de développement des pays industrialisés ; d’autre part, la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International veulent les mettre sous tutelle, avec probablement des nouveaux plans d’ajustement structurel. Changer de logique, c’est reconnaitre la responsabilité historique des puissances capitalistes dans cette situation. Cela passe donc par l’annulation de la dette financière des pays du Sud, la reconnaissance de la dette écologique envers les pays du Sud, qui induit un transfert massif d’argent sans contrepartie vers le Sud, autrement dit, un fonds d’adaptation international, financé par les pays développés, et géré par les peuples concernés, sachant que les politiques menées en la matière, et donc l’usage de ces fonds, doivent être coordonnées internationalement. Enfin, cela doit s’accompagner d’un transfert gratuit de technologies propres dans les secteurs publics des pays les plus pauvres, afin d’assurer une satisfaction des besoins, notamment en matière énergétique, tout en rompant avec le mode de développement, basé sur le gaspillage et l’irrationalité écologique.
Jugez vous nécessaire de mettre en place une fiscalité du carbone au niveau des états et de l’Europe ? Si oui sous quelle forme la jugeriez vous la plus efficace pour le climat et
le soutien aux pays du Sud.
Etes vous favorables à la financiarisation du carbone telle qu’elle a été initiée dans le cadre du processus de Kyoto et si non, quelles mesures proposez vous si vous jugez opportun de donner un coût au carbone ?
[Réponse aux deux questions]
Le protocole de Kyoto a ouvert une brèche qui conduit à marchandiser ce qui devrait être considéré comme un bien commun de l’humanité. Les négociateurs des grandes puissances cherchent aujourd’hui à accentuer, à ouvrir d’avantage cette brèche, pour faire de la finance carbone l’axe majeur des politiques climatiques, malgré son inefficacité et ses conséquences sociales. L’heure n’est donc pas à voir comment on pourrait donner un coût au carbone, ce qui serait entrer dans une logique économique néo-classique où tout peut être quantifié monétairement.
Quant aux politiques concrètement menées, marché des droits à polluer et taxe carbone ne sont pas des solutions. L’une est l’autre sont socialement injustes etinefficaces écologiquement. L’exemple du marché européen des permis montre combien ce mécanisme est peu efficace et combien il permet à certaines multinationales de réaliser des superprofits tout en continuant à polluer. De plus la connexion avec les mécanismes de flexibilité de Kyoto permet une défausse de la réduction des émission de GES vers les pays du Sud en reculant les mesures drastiques à prendre au Nord alors que celles-ci doivent être prises sans tarder. Quant à la taxe carbone, le projet du gouvernement Sarkozy montre de quel type de dispositif concret les classes dominantes actuelles peuvent accoucher : un prix dérisoire de la tonne carbone mais un dispositif injuste cependant. L’exemple suédois où le prix de la tonne est beaucoup plus élevé (il est égal aujourd’hui à ce qui est prévu en France en 2030) montre par ailleurs à quel point ce type de dispositif est peu efficace puisque les émissions n’ont pas significativement reculé.
Par contre, il est nécessaire de mettre en œuvre une fiscalité socialement juste, axée sur la taxation des profits des multinationales ou les transactions financières pour permettre de financer des mesures sociales et écologiques. Cela peut être coordonné au niveau mondial concernant par exemple le financement des fonds d’adaptation pour les pays les plus touchés par les changements climatiques. Deux précautions sont cependant à prendre. D’une part la taxation écologique des entreprises ne doit pas conduire à un allègement de leurs cotisations sociales. D’autre part, une telle taxation ne doit pas se transformer en principe payeur = pollueur ; en effet, une nouvelle fiscalité ne peut constituer une autorisation aux entreprises à ne pas changer profondément les modes de production.
Mais on ne peut réduire l’alternative à la question des taxes et de la fiscalité. L’alternative réelle passe en effet nécessairement par poser la question de la propriété des grands moyens de production et d’échange : seule leur maîtrise démocratique est de nature à permettre une réorientation rapide et drastique de la production et de la consommation, réorientation qui ne se fasse pas sur le dos des travailleurs de ces secteurs. La gauche et le mouvement écologiste doivent cesser d’éluder cette question sans laquelle aucune avancée significative durable n’est possible. Seule l’appropriation sociale et publique est de nature à permettre la transformation écologique et sociale de manière démocratique. Cette appropriation permet la mise en place d’une planification démocratique, outil indispensable à la réalisation du bouleversement nécessaire.
C’est seulement dans ce cadre général qu’une fiscalité reposant sur tous les consommateurs peut être envisageable : comme accompagnement du changement des comportements dès lors que des alternatives réelles sont mis à la disposition de l’ensemble de la population par exemple en termes de transport ou d’énergie. Autrement dit, les comportements qui doivent changer sont d’abord ceux des entreprises et de ceux qui décident des grandes politiques publiques. L’évolution des comportements collectifs et individuels doit être permise par des changements structurels, et non pas d’abord orientée par une fiscalité inégalitaire.
Les Alternatifs
Les Alternatifs apprécient de participer à la réflexion utile et stimulante qui est proposée par le collectif UCJS. En préambule, nous souhaitons faire valoir notre dû aux analyses diverses du problème, déjà existantes, et notamment celle d’Attac, analyses s’appuyant elles-mêmes sur les résultats et les préconisations du GIEC.
A ce titre, nous voudrions mettre en avant ce qui nous apparaît comme une insuffisante appropriation populaire des questions scientifiques et politiques autour du changement climatique. Cette appropriation nous semblerait un préalable à des réponses véritablement éclairées aux questions posées ici : nous sommes pour le moment tributaires des conclusions des scientifiques (dont le fameux « -40% » des pays développés est une illustration), sans maîtriser très bien le processus de réflexion qui permet d’aboutir à ces conclusions.
Selon nous, il faudrait « ouvrir les boîtes noires » des débats, afin de pouvoir mener une discussion sur des bases solides, dont les pourcentages idéaux de réduction, ou autres indicateurs synthétiques, seraient le point d’aboutissement. Nous croyons donc que la pression indispensable sur les négociations doit s’accompagner d’un processus visant à l’appropriation populaire des enjeux. Tel nous semble être l’une des missions des collectifs constitués autour de l’enjeu « changement climatique/justice sociale ».
Quel serait pour vous un « bon accord » à Copenhague ? et quel engagement de réduction des GES induirait-il pour la France et l’UE ?
Un bon accord à Copenhague porterait sur un engagement ferme des pays « développés » à réduire de façon significative les émissions de gaz à effet de serre : 40% par rapport à 1990, sans possibilité de report des émissions dans les pays du Sud ou d’Europe de l’Est par des mécanismes de flexibilité.
Il supposerait également une forte implication financière des pays développés pour l’adaptation des pays du Sud au changement climatique. Il permettrait également la coopération technologique entre Nord et Sud, et pas seulement le « transfert technologique », qui suppose que les technologies des pays du Nord sont universellement valables, et portent un modèle idéal pour toute la planète. Un tel cadre permettrait aux pays du Sud d’évoluer vers un modèle peu carboné qui serait décidé par eux et pour eux.
Cet engagement devrait prendre la forme d’un échéancier et d’un contrôle annuel (il ne se ferait pas seulement en référence à une échéance lointaine, de type 2020). Ce processus donnerait lieu à de lourdes pénalités pour les pays qui ne le respecteraient pas, permettant l’adaptation et le dédommagement pour les victimes du réchauffement, et la mise en œuvre de mesures énergétiques alternatives sous l’autorité d’un organisme international de régulation.
Nous ne nous croyons pas en mesure de « ventiler » l’engagement global de 40% entre les différents groupes de pays développés, et les différents pays, puisque nous constatons les incertitudes scientifiques qui existent sur l’impact respectif des différents types d’activités humaines (à titre d’exemple : élevage=18% des émissions mondiales de GES selon la FAO, novembre 2006 / 51% selon le Worldwatch Institute, novembre 2009), et en conclusion, sur les impacts et possibilités des différents pays. Nous préconisons une ouverture plus large des négociations pour traiter de ces questions.
Dans une perspective plus pragmatique, dans l’état actuel des choses, nous prenons acte de la mauvaise tournure que prennent les négociations pré-Copenhague, et nous considérons qu’il vaut sans doute mieux que les décisions importantes soient repoussées à plus tard, sous la pression populaire, plutôt que d’aboutir à un accord inefficace et injuste. Copenhague pourrait donc fixer les lignes d’un processus ultérieur de décision.
Quelle est la mesure prioritaire à mettre en œuvre pour engager le respect de cet accord nationalement et à l’échelle de l’Europe ?
Il paraît difficile de dégager une unique mesure qui permettrait le respect de cet accord. C’est justement un changement systémique de société, au niveau de l’Europe et des Etats, qui nous semble nécessaire et urgent. Nous ne croyons pas que ce changement ne puisse reposer que sur des mesures fiscales incitatives, comme la bourse du carbone ou les taxes nationales, mais que le changement climatique doit ouvrir à de vastes chantiers de réflexion et de décision, à tous les niveaux géographiques (Etats ; régions ; départements ; villes), pour permettre les réductions de gaz à effet de serre drastiques qui permettraient d’éviter le basculement dans un système climatique chaotique (au-delà de +2°C).
D’une manière générale, nous préconisons :
– Dans le domaine agricole, mutation vers une agriculture paysanne extensive et autosuffisante en termes d’intrants, qui irait de pair avec une réappropriation des territoires. Cette mutation irait de pair avec une diminution quantitative de l’élevage, et une transformation des modèles alimentaires (qui pourrait reposer sur des politiques concrètes en matière de restauration collective : bio ; local ; journées sans viande).
– Dans le domaine énergétique, application du scénario Négawatt avec développement des énergies renouvelables, économies d’énergie et amélioration de l’efficacité énergétique. Sortie du nucléaire. Développement du logement social à faible consommation énergétique.
– Dans le domaine des transports, relocalisation des activités agricoles et industrielles. Avancée de la gratuité des transports publics. Forte taxation des transports aériens internationaux, pour le moment non soumis au système des permis d’émission.
Quelle mesure européenne pourrait être considérée comme prioritaire pour l’impact international qu’elle pourrait avoir vis à vis des pays du Sud ?
Là encore, il nous semble qu’il est difficile de dégager une mesure unique. Il s’agit de revoir notre modèle de « développement » dans les pays riches, qui a actuellement des conséquences dramatiques dans les pays du Sud. A titre d’exemple dans le domaine agricole, appropriation des terres et déforestation en Amérique Latine, pour la production de nourriture animale, et d’agrocarburants pour les voitures.
Une transformation radicale de la PAC, vers le soutien une agriculture paysanne extensive et une diminution concomitante de l’élevage industriel, irait dans ce sens : moins d’importations de soja OGM (donc moins de transport) ; moins de déforestation au Sud ; moins d’élevage globalement au Nord (donc moins d’émissions de méthane et de protoxyde d’azote) ; possible réappropriation des terres par les pays du Sud, qui permettrait la souveraineté alimentaire.
Nous sommes bien conscients de nous situer ici dans un discours utopique, en rupture totale avec le modèle dominant néolibéral. Mais si nous devons nous fixer un horizon, alors c’est ainsi que nous nous situons.
Comment envisagez-vous la contribution et les mécanismes de réduction et d’adaptation dans les Pays du Sud auxquels se soumettront l’Europe et de la France pour la réalisation des objectifs de l’accord ?
Nous croyons qu’il est nécessaire pour les pays du Nord de reconnaître leur responsabilité dans la situation actuelle et dans les évolutions nécessaires ; et par ailleurs, la très grande vulnérabilité de la majorité des pays du Sud, à une crise qu’ils n’ont pas provoquée. A ce titre, nous croyons que les pays du Nord doivent s’engager financièrement, de manière sérieuse, pour aider à l’adaptation dans les pays du Sud au changement climatique.
En ce qui concerne les pays émergents, nous croyons qu’ils doivent au même titre que les pays « développés » aujourd’hui, évoluer vers un modèle faiblement carboné, qui est incompatible avec la croissance économique qu’ils connaissent actuellement.
Mais de manière générale, nous ne croyons pas que ce soit aux pays du Nord, auxquels nous appartenons, de prendre ces décisions qui impliquent les pays du Sud. Nous pouvons nous positionner en faveur d’un soutien financier, mais pour le reste, il s’agit aux pays du Sud de décider de leur modèle de « développement », en lien avec les enjeux climatiques. Ici encore, nous sommes conscients de prononcer de belles paroles en rupture avec le système actuel et qui participent d’une utopie, sans offrir les leviers nécessaires pour permettre à cette utopie d’advenir !
Jugez vous nécessaire de mettre en place une fiscalité du carbone au niveau des états et de l’Europe ? Si oui sous quelle forme la jugeriez vous la plus efficace pour le climat et le soutien aux pays du Sud.
Sur le principe, nous sommes favorables à une fiscalité du carbone, à condition qu’elle soit décidée démocratiquement, et pensée pour être écologiquement efficace et socialement juste. Une telle fiscalité devrait prendre en compte les diverses sources d’émission de GES : industrie mais aussi agriculture ; transports et notamment transports aériens ; déforestation. Dans notre mouvement, la question de la taxation écologique fait débat et nous n’avons pas encore dégagé d’éléments de fort consensus sur le sujet.
D’ores et déjà, quelques pistes :
* sur son prélèvement
– une fiscalité assise sur les revenus, plutôt que sur la consommation.
– une taxation progressive, qui prendrait en considération les émissions contraintes liées au cadre de vie (exemple : transport automobile en zone rurale) et porterait sur le « mésusage » (consommation « nécessaire » non taxée, consommation superflue taxée)
* sur sa réaffectation
– le financement de fonds contre la déforestation, ou de fonds d’adaptation et d’aide à la mitigation pour les pays du Sud (en cela, la taxe constituerait un soutien, comme l’énonce la question)
– le renforcement des services publics existants dans les pays « développés » (transport ; énergie ; habitat) et le développement de nouveaux services publics, à inventer dans le cadre d’une reconversion écologique des modes de vie (AMAP ; formation aux techniques d’agro-écologie...). Ces services publics pourraient être conçus sur une base décentralisée et participative.
Etes vous favorables à la financiarisation du carbone telle qu’elle a été initiée dans le cadre du processus de Kyoto et si non, quelles mesures proposez vous si vous jugez opportun de donner un coût au carbone ?
Dans notre mouvement, il n’y a pas consensus sur la pertinence d’un tel dispositif. De manière globale, nous ne sommes pas favorables à la financiarisation du carbone telle qu’elle a été initiée dans le cadre de Kyoto, puisqu’elle permet une spéculation sur les biens essentiels de l’humanité comme l’atmosphère ou la forêt, et qu’elle a jusqu’ici montré une grande inefficacité pour réduire les émissions de GES.
Nous sommes par ailleurs tou-te-s critiques des mécanismes de flexibilité comme les MOC ou les MDP, qui permettent la poursuite de l’évolution délétère des pays du Nord sans aucune remise en question, sur une base néocoloniale qui digère les enjeux écologiques à son service.
En conséquence, nous soutenons comme alternative l’élaboration d’un système juridique contraignant, fixant des normes d’émission à ne pas dépasser, supposant des pénalités lourdes en cas de dépassement. Un tel système supposerait la mise en place d’une nouvelle agence internationale chargée de le gérer. Nous approuvons la proposition d’Attac de la mise en place d’une « Organisation Mondiale de l’Environnement » à la mesure de l’enjeu climatique, qui permettrait d’administrer un tel processus.
Pour celles et ceux d’entre nous qui ne sont pas opposé-e-s à la financiarisation par principe, cette « financiarisation » devrait être conçue comme un simple outil dans le cadre d’une politique écologique globale, qui supposerait politique publique, délibération citoyenne et transformation du modèle occidental productiviste, et pas comme le socle ultime de la transformation du monde.
Fédération pour une Alternative Sociale et Ecologique
Quel serait pour vous un « bon accord » à Copenhague ? et quel engagement de réduction des GES induirait-il pour la France et l’UE ?
Stratégiquement :
1. une forte réduction des émissions de GES pour les pays développés, ceux de l’annexe 1
de l’accord de Kyoto (-40% en 2020 par rapport à 1990), les 3⁄4 au moins étant réalisés
de façon domestique
2. une reconnaissance de la dette climatique par les pays développés, à la hauteur des
émissions cumulées de chaque pays depuis le début de l’ère industrielle (1750)
3. une déclaration solennelle des pays en développement (annexe 2) quant à mettre en
œuvre un développement à bas contenu en carbone
4. instauration d’un fond pour l’application des plans d’actions des pays en développement
en faveur de l’atténuation des émissions de GES et de l’adaptation de ceux-ci aux effets de changements climatiques enclenchés. Ce fond doit être soumis à l’ONU et non aux institutions financières internationales dominées par les principaux responsables de la situation (FMI, Banque Mondiale)
5. Engagement sur des sources de GES à responsabilité internationale : transports aériens et marins internationaux, déforestation, mesures nationales visant à renoncer à exploiter une ressource à marché fortement internationalisé pour éviter les émissions de GES qui lui sont liées.
Pratiquement : compte tenu du peu d’espoir que laisse l’état des négociations (faiblesse des objectifs de réduction des émissions, faibles engagements en faveur du fond d’adaptation et d’atténuation), il ne devrait pas y avoir de signature d’un faux accord. Ce qui doit être signé, c’est une feuille de route pour reprendre les négociations avec engagement d’aboutir avant 2012. Les objectifs à atteindre sont ceux définis ci-dessus.
Quelle est la mesure prioritaire à mettre en œuvre pour engager le respect de cet accord nationalement et à l’échelle de l’Europe ?
Dans le plan d’action national et européen visant à atteindre les objectifs fixés à Copenhague (paquet « énergie-climat »), les mesures prioritaires concernent les sources les plus conséquentes de GES. Il n’est pas pensable de n’en choisir qu’une. Chacune des sources principales doit être affectée d’une mesure-phare :
Production d’électricité : installation des moyens de production les plus matures (éolien terrestre et marin, photovoltaïque, biomasse, méthanisation, géothermie...) Industrie : Bâtiment résidentiel-tertiaire : plan de traitement massif sur 10 ans des bâtiments dépendant du secteur public (HLM, locaux des collectivités locales et de l’Etat)
Transports : coup d’accélérateur sur les grands projets (Lyon-Turin...) et mise d’autres en chantier en lien avec les grands ports Européens, aide substantielle au développement de plateformes multimodales à l’intérieur des terres, (« autoroutes » ferroviaires européens, réseau européen de canaux)
Agriculture-alimentation : instauration d’une journée sans viande dans la restauration publique (et privée si possible), à l’instar des jeudis de la ville de Gand en Belgique. Aides pour les organisations collectives raccourcissant la chaîne entre producteurs et consommateurs (AMAP, Coopératives, Marchés locaux, etc... privilégiant l’alimentation végétarienne et bio). Déforestation : accord de réduction d’exploitation de grandes forêts équatoriales (Brésil, Cameroun...), avec compensations financières des revenus perdus et moyens de contrôle Mesures générales : instauration de fonds pour le climat, obligation pour les collectivités locales de plus de 3500 habitants de mettre en place un PCET (plan climat énergie territorial)
Pour introduire la mise en chantier de ce plan d’action, les mesures-phares immédiates peuvent être :
– un accord UE-Equateur pour la non-exploitation du pétrole dans les nouveaux champs (parc Yasuni)
– décision d’installation d’un parc d’éoliennes offshore (à l’image du projet décidé à l’entrée de la Tamise d’un parc de 1 GW)
– loi pour soumettre les collectivités locales à la définition et réalisation d’un PCET
Quelle mesure européenne pourrait être considérée comme prioritaire pour l’impact international qu’elle pourrait avoir vis à vis des pays du Sud ?
Etablir des accords UE-pays du sud mettant en place un mécanisme de compensation du renoncement à exploiter des ressources dont l’usage émet des GES (cf. pétrole en Equateur, déforestation...).
Comment envisagez-vous la contribution et les mécanismes de réduction et d’adaptation dans les Pays du Sud auxquels se soumettront l’Europe et de la France pour la réalisation des objectifs de l’accord ?
Arguments négatifs :
– mauvais signal d’une volonté de s’atteler au cœur du problème, l’intervention dans les
pays industrialisés, responsables historiques
Arguments positifs :
– bon signal auprès des 85% de la population mondiale, afin que leurs gouvernements s’engagent résolument avec l’assurance que les pays développés prennnent leurs responsabilités
– le développement des pays faiblement industrialisés doit se faire d’emblée avec les meilleures technologies
– il est plus rentable environnementalement et financièrement d’intervenir là où l’efficacité énergétique est la plus faible
Les aspect positifs l’emportent largement. Les risques de relâchement des pays industrialisés sur leur propre territoire seront contrebalancés par l’engagement de réaliser sur leur territoire les 3⁄4 des réductions d’émissions de GES qui leur incombent.
Jugez vous nécessaire de mettre en place une fiscalité du carbone au niveau des états et de l’Europe ? Si oui sous quelle forme la jugeriez vous la plus efficace pour le climat et le soutien aux pays du Sud.
En réalité, la fiscalité actuelle est fort injuste, avec des prélèvements progressifs (impôts directs sur les revenus) faibles, des prélèvements proportionnels aux revenus et même dégressifs (TVA) forts. Un nouveau système de prélèvements obligatoires doit être pensé dans le cadre d’une fiscalité rénovée et plus progessive.
En l’absence d’une telle perspective, et sur le principe, un effet prix étant complémentaire d’un règlement en économie de marché, il est bon d’instaurer une taxe. Celle-ci doit être :
– indépendante du marché, en particulier du yo-yo baissier des permis d’émission ;
– elle doit être envisagée indépendamment des prélèvements destinés à couvrir les besoins de l’Etat pour ses autres missions ou ceux des caisses de protection sociale. Son instauration ne doit donc pas être accompagnée d’allègements des autres
prélèvements, c’est-à-dire de privatisation de certains services sociaux, médicaux ;
– elle doit être d’un niveau suffisant et monter en puissance. En l’absence de connaissance suffisante de la question, les propositions Rocard/Quinion peuvent servir de base : 32 €/tonne CO2maintenant, augmentation jusqu’à 100 €/tonne CO2 en 2030. Cepedant, l’exemple Suédois semble indiquer qu’il faut aller plus loin, par exemple l’objectif 100 €/tonne CO2 devrait être réalisé d’ici 2020. D’autre part, la taxe doit concerner les autres GES et toute les énergies non renouvelables. Les opérations de remplacement de l’énergie non renouvelable seront temporairement subventionnées par un mécanisme fiscal.
– renforcer la progressivité de l’impôt direct et son importance relative dans l’ensemble des prélèvements obligatoires, instaurer une tranche gratuite d’électricité, le coût étant supporté par l’ensemble des consommations qui sont au-delà.
Etes vous favorables à la financiarisation du carbone telle qu’elle a été initiée dans le cadre du processus de Kyoto et si non, quelles mesures proposez vous si vous jugez opportun de donner un coût au carbone ?
L’économie de marché financiarisée actuelle nous a conduit à une profonde dépression et son cortège de maux sociaux qui afféctent bien plus les salariés, les précarisant de plus belle, que les traders, les banquiers, les stockoptionneurs, les parachutistes dorés et les actionnaires. Les mêmes mécanismes étant toujours à l’œuvre, malgré les promesses de moralisation d’un secteur qui n’en a rien à secouer, un marché mondialisé, titrisé des actions publiques contre les changements climatiques, risque de produire les mêmes effets, bulle spéculative et crise financière. Ce qui ne signifie pas qu’il faille renoncer à tout mécanisme de marché et financier, mais fortement les encadrer. Cela nécessite :
– une action publique, mondiale et nationale, relayée par les secteurs publiques les plus proches des usagers et citoyens afin d’entraîner ces derniers dans des démarches vertueuses, qui se traduira par une modification de mode de vie, de produire, de consommer. Les décisions en question sont de l’ordre réglementaire.
– En matière de permis d’émission : rapellons que ce n’est pas seulement un mécanisme de marché. En effet, le niveau de prix de la tonne CO2 est fonction de la quantité des émissions, fixée par les pouvoirs publics. Le prix moyen de marché du carbone n’existe pas. Le marché donne seulement l’opportunité à tout acteur de celui-ci de viser une situation intéressante en étant en dessous du prix moyen. Cela se percevra encore mieux lorsque les acteurs du dit marché devront acheter leurs émissions. C’est donc un système mixte. Le niveau parfois ridicule atteint par la tonne de CO2 est une conséquence du laisser-aller des pouvoirs publics beaucoup trop généreux en quantité totale d’émission. On peut donc garder le système en modifiant le mécanisme de fixation des quantités d’émissions visées.
– l’extension des permis d’émission à tous les GES et à toutes les énergies non renouvelables.
Association des Objecteurs de Croissance
Quel serait pour vous un « bon accord » à Copenhague ? Et quel engagement de réduction des GES induirait-il pour la France et l’UE ?
En tant qu’Objecteurs de Croissance nous n’attendons pas de bonnes solutions des Etats.et de la gouvernance mondiale
Un « bon accord » à Copenhague, répondant sérieusement à l’impasse environnementale dans laquelle nous sommes, n’est pas possible.
Au mieux, nous pourrions avoir des réformes d’accompagnement nous permettant de polluer un peu moins pour polluer un peu plus longtemps et ainsi permettre d’évacuer le débat en se donnant bonne conscience.
En effet, il est très difficile de trouver des réponses à un problème lorsque l’on ne correctement. Aujourd’hui le changement climatique, mais aussi la crise de la biodiversité, l’épuisement des matières premières, la crise économique, sociale, culturelle et politique sont en fait une seule même crise, une crise anthropologique.
Or, le débat sur les fondements de cette crise n’aura pas lieu, d’une part parce qu’il n’est pas prévu, d’autre part, parce qu’il irait à l’encontre même de la logique dans laquelle Copenhague est organisé : compétition économique entre les nations et poids des lobbies.
Quel est le véritable problème ? quel est le débat de fond ? c’est d’abord celui d’un modèle dominant et mondialisé de société, et l’enjeu c’est de rappeler qu’une croissance infinie dans un monde est une absurdité ! A partir de là, on pourrait commencer à réfléchir sur : Qu’est ce que l’on produit ? Comment ? Pour quel usage ?
De même, on pourrait se poser la question du partage équitable des ressources naturelles, de la sortie des guerres de prédations liées aux énergies et aux matières premières. On pourrait se poser la question de la solidarité,
à relocalisation, du ralentissement, de la réduction, au nord, de notre empreinte
écologique.
Quelle est la mesure prioritaire à mettre en œuvre pour engager le respect de cet accord nationalement et à l’échelle de l’Europe ?
Cette question n’a pas de sens, car il n’y aura pas d’accord sérieux à Copenhague, si tant est qu’il y ait un accord, ce dont nous doutons, car nos Etats sont dominés par le principe de la concurrence, pas celui de la coopération.
Par contre cela ne doit pas nous empêcher de continuer à « relocaliser Copenhague » pour faire pression sur les Etats, mais surtout continuer notre rupture dans nos vies quotidiennes, dans nos têtes, avec le mode de développement de type productiviste et capitaliste. Mais ça, ça existait avant Copenhague et ça existera après...
Copenhague, comme le Grenelle de l’environnement ne sera, au mieux que de la poudre aux yeux !
Quelle mesure européenne pourrait être considérée comme prioritaire pour l’impact international qu’elle pourrait avoir vis à vis des pays du Sud ?
La première des mesures que nous pourrions prendre, c’est d’une part d’empêcher les multinationales de piller, corrompre les dirigeants de ces pays, arrêter de soutenir les systèmes de domination archaïques et au contraire promouvoir les mouvements d’émancipation vers une civilisation du renouvelable, arrêter la « françafrique », investir dans la recherche pour vaincre les maladies comme le paludisme etc., interdire le commerce des ’armes, , aider à éradiquer la famine, l’analphabétisme, en particulier chez les femmes.
Même s’il faut garder son esprit critique nous avons aussi beaucoup à apprendre : des savoir-faire et des savoir-être des peuples indigènes. Une véritable « aide » aux pays du Sud serait d’ « aider » les pays du Nord à se convaincre de moins dépendre de l’« aide » déguisée des pays du Sud, autrement dit la fin de l’impérialisme... d’arrêter de piller, de corrompre et de coloniser leurs imaginaires.
Nous sommes 20% à nous approprier 87% des ressources naturelles. De plus nous avons une empreinte écologique d’au moins trois planètes. La question du changement climatique se situe d’abord dans les pays du Nord.
Donc cela doit passer par un changement radical de notre modèle de société et ainsi par une réduction drastique de nos consommations, donc du grand pillage organisé !
Comment envisagez-vous la contribution et les mécanismes de réduction et d’adaptation dans les Pays du Sud auxquels se soumettront l’Europe et la France pour la réalisation des objectifs de l’accord ?
On pourrait distinguer mécanismes induits de mécanismes produits :
MECANISMES PRODUITS :
La première aide devrait être la lutte contre la faim, pour l’autonomie alimentaire.
Ecoutons Jacques Diouf : « Et on a besoin de combien pour l’aide au développement [même si l’on peut critiquer la notion d’ « aide » et de « développement » mais il s’agit d’une citation et c’est le reste de la démonstration qui est intéressant] ? On a besoin de 44 milliards de dollars par an. On dépense chaque année, 1340 milliards de dollars pour acheter des armes. On ne peut pas dépenser 44 milliards pour la vie ?! » ou encore : « Rien que dans les pays de l’OCDE, on dépense chaque année, 365 milliards de dollars pour le soutien à l’agriculture dans des pays où la population agricole représente entre 2 et 4%, alors que dans les pays du tiers- monde, la population rurale représente entre 60 et 80%. » Tiré d’une interview à Euronews :
http://fr.euronews.net/2009/10/16/jacques-diouf-pour-lutter-contre-la-faim-utilisons-les- ressources-disponibles/
Par ailleurs, il faut mettre en place des mécanismes (planification mondiale, etc) pour laisser vivre et/ou gérer les ressources naturelles mondiales qui ne se renouvellent pas ou difficilement, les biens communs : les minéraux, la pêche, l’eau, l’air etc. mieux protéger la biodiversité via des organismes mondiaux gérés démocratiquement et pas par une poignée de pays les plus riches comme c’est le cas aujourd’hui.
Mécanismes INDUITS :
réduire considérablement nos dépenses d’armement et de publicité, prendre les mesures pour relocaliser nos économies,encourager les monnaies locales, mettre en œuvre une monnaie mondiale qui ne soit plus basée sur une devise comme le dollar, moins dépendre des ressources naturelles des pays du Sud, remettre en cause la division internationale du travail telle qu’elle est et le brevetage de tout ce qui est vivant, etc...
Jugez-vous nécessaire de mettre en place une fiscalité du carbone au niveau des états et de l’Europe ? Si oui sous quelle forme la jugeriez vous la plus efficace pour le climat et le soutien aux pays du Sud.
La taxe carbone est une décision d’action par les PRIX, elle concerne le POUVOIR d’ACHAT, or nous sommes contre la religion du « pouvoir d’achat » et pour le « pouvoir de vivre ». En l’occurrence, nous n’avons pas besoin d’une nouvelle fiscalité mais d’un nouveau mode de vie qui permettrait à la fois de VIVRE, c’est à dire d’avoir un POUVOIR DE VIVRE, un pouvoir sur
notre vie, et en même temps de ne pas générer des GES dangereux pour la survie de l’humanité.
Par ailleurs cette taxe est inefficace, combien de personnes vont réduire leur production de GES en réduisant leur usage de la voiture, etc...à cause de cette taxe ? très peu il faut vraiment être économiquement faible pour avoir un impact quelconque. Et justement les seuls qui pourraient y être ensibles ont déjà réduire leur train de vie, et indirectement, leur production de GES justement parce qu’ils sont pauvres. Dans « Le Monde » de mercredi
11 novembre il est question de 10 % de la population qui ne peut plus se chauffer l’hiver à cause de la pauvreté par exemple....alors taxe ou pas taxe ?
Le seul intérêt serai les revenus générés par cette taxe carbone A CONDITION qu’on les utilise pour développer les transports en commun, là où on peut se passer de voiture facilement, là ou habitent 80 % des gens, dans les grandes villes.
Quand on parle de cette nouvelle taxe, n’oublions pas non plus le contexte dans laquelle on l’a crée : d’un côté un bouclier fiscal pour exonérer d’impôts les plus riches, et d’un autre côté une taxe carbone qui va pénaliser les moins riches qui ont besoin d’une automobile pour se déplacer, notamment les 20 % de personnes habitant à la campagne, là où il est plus logique de se déplacer en voiture que de créer des transports en commun.
En conclusion : comme pour le Grenelle de l’environnement, il s’agit de duper et d’éviter tout débat de fond, de refuser toute réflexion radicale sur la situation dans laquelle nous nous trouvons, qui elle, est bien radicale.
Êtes vous favorables à la financiarisation du carbone telle qu’elle a été initiée dans le cadre du processus de Kyoto et si non, quelles mesures proposez-vous si vous jugez opportun de donner un coût au carbone ?
Non bien sûr, cela revient à faire confiance à la loi du marché, or elle est la cause du problème. Cette taxe ne s’occupe pas des façons dont nous allons réduire la production de GES (car il n’y a pas que le CO2 mais aussi le méthane par exemple) Elle accepterait qu’on continue d’en produire à condition qu’on puisse la mettre sous le tapis...
Par ailleurs, le marché du CO2 revient à traiter la Terre comme une ressource économique constituée de matières mortes, alors que la Terre est autre chose qu’un simple stock de matières premières. C’est un ensemble vivant qui contient des êtres vivants, à commencer par les êtres humains et qui ne peut être géré comme un être mort.
Cette vision revient aussi à accepter que ce soit le travail qui domine la Terre et que celle-ci ne soit qu’une entité au service du travail et donc du capital, considéré comme une accumulation de travail mort. Pour nous, la richesse ce n’est pas la valeur-travail, c’est d’abord la valeur-TERRE, sa diversité, un environnement sain, une vision globale au lieu du nationalisme engendré par le culte de la valeur-Travail qui ne peut que générer la concurrence et les guerres pour s’approprier les ressources naturelles.
Nous devrions insister sur le rôle particulier de la France dans le « marché du carbone ». L’un des leaders de ce marché est la Caisse des Dépôts. Ce marché n’est que le marché des droits à polluer.
Association d’Objecteurs de Croissance (AdOC)
http://www.adoc-france.org/