Besancenot tourne la page de la LCR pour écrire celle du NPA
PARIS, 3 fév 2009 (AFP) - Sortie gagnante d’une extrême gauche éclatée à la présidentielle 2007 (4,08%) et forte de l’image hyper-médiatique de son porte-parole Olivier Besancenot, la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) s’apprête à se transformer en Nouveau parti anticapitaliste (NPA).
Le congrès de fondation du NPA, qui revendique environ 9.000 militants (contre 3.200 à la LCR) se tiendra du 6 au 8 février à la Plaine-Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), juste après la dissolution de la Ligue (5 février). « Le NPA, c’est un outil politique plus adapté à la période politique dans laquelle on est », explique à l’AFP M. Besancenot, « à l’aise comme un poisson dans l’eau » dans un contexte de « crise du capitalisme ». « Ce n’est pas une rupture, mais un mélange de vieux et de neuf » pour « faire un parti dont la gauche révolutionnaire a besoin au XXIe siècle », ajoute le porte-parole du parti trotskiste bientôt dissous. « Notre logique politique, c’est de dépasser la LCR et prendre le meilleur des traditions du mouvement ouvrier, qu’elles soient trotskistes, socialistes, communistes, libertaires, guévaristes » ou issues de l’écologie radicale, répète-t-il. Avec une ligne claire : l’indépendance totale vis-à-vis du Parti socialiste.
Prenant le contre-pied d’un PCF affaibli, le NPA rejette toute idée de gouvernance avec « les sociaux-libéraux » pour mieux peser à gauche. Pour Alain Krivine, fondateur de la LCR, « à gauche, il y a le PS d’un côté, le NPA à l’opposé et des groupes qui se cherchent un peu ». « Le NPA, c’est une vraie recherche de l’opposition à Nicolas Sarkozy ». Le projet de faire un nouveau parti, « on le défend depuis le début des années 90, après la chute du Mur du Berlin », raconte M. Besancenot. Après des tentatives avortées de 1990 à 2005, « on a senti une opportunité avec l’élection présidentielle de 2007 ». « Il y avait tellement de monde dans les meetings » de la LCR, se souvient le facteur de Neuilly : « on ne pouvait pas repartir comme avant ». « La situation est aujourd’hui mille fois plus favorable pour créer un parti politique, entre les attaques fortes de la droite, une gauche qu’on n’a jamais vue aussi minable, plus un porte-parole qui réussit à incarner les attentes », juge M. Krivine. Le très médiatique Besancenot est en effet la deuxième personnalité politique préférée des Français, derrière Nicolas Sarkozy et devant Ségolène Royal, selon le baromètre annuel du JDD. Popularité que n’a pas entamée l’affaire Rouillan (cofondateur d’Action directe, soutien du NPA).
Après 40 ans d’existence, « la Ligue » n’existera donc plus jeudi. C’est en avril 1969 que la Ligue communiste a été créée. Deux mois plus tard, le tout jeune Alain Krivine, 28 ans menait sa première campagne présidentielle (1%). Dissoute en juin 1973 après une manifestation contre un meeting d’extrême droite à Paris, ses militants ne tardent pas à fonder la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) fin 1974. « Jusqu’à présent, c’était le ministère de l’Intérieur qui dissolvait les partis politiques », sourit M. Krivine, « pas nostalgique » de la LCR. Reste la question du nom du futur parti qui remplacera la LCR. NPA, pas NPA ? Une vingtaine d’idées ont été retenues, les militants devront trancher samedi. Ils devront également décider de rallier ou pas le « front de gauche » constitué autour du PCF et du Parti de Gauche pour les Européennes de juin.
Pour M. Besancenot, « qualitativement et quantitativement, le Congrès est déjà réussi mais le défi, c’est de savoir ce qui va en rester sur le long terme ».
jud/cgd/bfr
Qui sont les militants du Nouveau parti anticapitaliste ?
PARIS, 3 fév 2009 (AFP) - Qu’ils soient trotskistes, syndicalistes, écologistes radicaux, ou anti-sarkozistes venant pour la première fois frapper à la porte d’une organisation politique, les militants du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) ont un désir commun : changer la société.
Avec environ 9.000 adhérents revendiqués, soit trois fois plus qu’à la trotskiste LCR (3.200) bientôt dissoute, le NPA recrute large.
« Parmi les nouveaux adhérents, on a énormément de gens écœurés par Nicolas Sarkozy. Pour beaucoup, c’est une première expérience politique », résume à l’AFP Alain Krivine, fondateur de la LCR qui s’amuse de se retrouver dans un parti où « les gens ne s’appellent pas +camarade+ ». « Il y a pas mal de syndicalistes aussi », ajoute Olivier Besancenot, lui-même adhérent de Sud, qui se défend de faire du NPA un « parti fourre-tout ». Ce qui rassemble ces militants, c’est l’envie de changer en profondeur la société actuelle.
Avec la crise, « on se rend compte que beaucoup de problèmes sont une conséquence du capitalisme et ça m’a radicalisé », explique Florent Kaisser, 26 ans, un « thésard » en informatique, militant de l’association altermondialiste Attac qui a récemment rejoint le NPA « après avoir hésité à aller au MoDem ». « On voit bien que le capitalisme a ses limites et s’enrichir sans entraves me pose problème », assure Julien, étudiant infirmier à Paris, novice en politique et particulièrement concerné par le « service public de santé ». « Le NPA va devenir ce qu’on a envie qu’il devienne. Je regarde, je me forme, je vais devenir de plus en plus actif », dit-il.
Des « écoles de formation » sont d’ailleurs prévues pour les nouveaux militants, selon M. Besancenot. Et puis, le « charismatique » facteur de Neuilly « a notre âge et il est au courant de nos problèmes », « on n’a pas de mal à s’identifier à lui », précise Julien. « Moi, je m’en fous de Besancenot », lance Muriel Bombardi, 38 ans, qui a adhéré à la LCR en octobre, en vue d’intégrer le NPA. « Il est brillant mais je n’ai pas rejoint le mouvement pour lui », assure cette assistance sociale de Bobigny (Seine-Saint-Denis). Elle fait partie de ces « orphelins » des partis politiques « traditionnels » qui ont trouvé dans le NPA l’organisation qui leur manquait. « J’avais des luttes individuelles et la volonté de changer radicalement la société mais rien de construit », explique-t-elle : « l’élection de Nicolas Sarkozy m’a motivée à m’impliquer politiquement ». « C’est le seul parti qui pouvait me convenir » car « il mixe le côté révolutionnaire, l’écologie radicale et une meilleure répartition des richesses », dit-elle. Ce qui lui plaît au NPA ? « L’idée de pouvoir reprendre nos vies en main ». Françoise Planchard, elle, a participé à la campagne de José Bové lors de la présidentielle 2007, aux côtés des Alternatifs près de Montauban (Tarn-et-Garonne). Si cette chômeuse de 51 ans a rejoint le NPA, c’est pour son « orientation politique » mais aussi parce qu’elle en avait « marre des groupuscules et des petits scores de moins d’1% ». Elle a « le sentiment que le NPA va continuer à se développer » et peut-être un jour, « prendre le pouvoir ».
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Dernière réunion des comités NPA avant le congrès fondateur du 6 février
(La Voix du Nord)
La LCR est (presque) morte, vive le NPA ! Hier, les comités du Nouveau Parti anticapitaliste de la métropole lilloise se sont réunis à la mairie de quartier de Lille-Sud pour leur congrès local de fondation.
Au programme : une réflexion sur l’amendement des textes fondateurs et d’orientation et l’élection des délégués qui seront présents les 6, 7 et 8 février pour la fondation nationale.
Dernière ligne droite pour les comités de la métropole avant le grand saut national. Dans moins de trois semaines, le NPA prendra la relève de la Ligue communiste révolutionnaire, qui sera officiellement dissoute le jeudi 5 février. Hier, dans la salle de la maison de quartier, les comités locaux débattaient du mode d’emploi et de l’orientation à donner au parti embryonnaire. Parmi les militants, des « vieux de la vieille » autrefois encartés au PCF, passés à « la ligue » et prêts aujourd’hui pour le NPA comme Dominique, Anthonie, Jean. Mais aussi des jeunes, anciens LCR ou nouvelles recrues comme Vincent, Damien ou Ameline. « Il y a des vieux militants comme moi et Jean, et puis il y a les jeunes qui reprennent les idées qu’on défendait déjà il y a 50 ans », se rassure Dominique, satisfait de la relève. Pour tous, le NPA porte la réponse de « la lutte contre le capitalisme pour réagir à la conjoncture actuelle et préserver les acquis sociaux ». Vincent, la trentaine, ingénieur en industrie textile au chômage, se définit comme « un citoyen classique » qui a rejoint le parti « après avoir assisté à la conférence d’Olivier Besancenot à Lille, au Splendid, en février 2008 ». Ameline, 18 ans et demi, a déjà un long passé politique derrière elle. « Dans la famille, on est très politisé, mais plutôt PCF ou LO. Moi, j’ai choisi la section jeune de la LCR à 13 ans, et maintenant le NPA. »
Retour aux textes
Après la proposition des amendements, l’heure est au vote à main levée. Marc précise : « On propose de remplacer « socialisme » par « écosocialisme » dans les principes fondateurs. » Vote et rejet de la salle. Les choses se corsent lorsqu’il s’agit de développer un paragraphe. « C’est page 12, Amendement 40, 3e colonne, 4e paragraphe », détaille Élie, qui perd la moitié de l’assemblée. Au terme des votes, quatorze des dix-sept amendements proposés aux « camarades » sont renvoyés pour être discutés au comité national début février. Un travail final sur les textes « qui a commencé il y a quatre mois », explique Jean-Jacques, membre lillois, « avec déjà trois allers-retours des textes entre ici et Paris ». Pour lui, deux débats sont en cours, « celui sur le recours ou non à l’écosocialisme », une notion altermondialiste ; mais aussi celle de l’utilisation du terme « révolutionnaire » dans le futur nom du parti. Charge aux huit délégués locaux élus de défendre les amendements votés. Réponse les 6, 7 et 8 février au grand congrès national de fondation du parti où sera validé l’ensemble des textes.
* Publié par La Voix du Nord le 18/01/09 par Marie Castro
lille lavoixdunord.fr
Avenir du NPA : succès, puis effondrement, selon le politologue Raynaud
PARIS, 3 fév 2009 (AFP) - Philippe Raynaud, professeur de Sciences politiques à l’université de Paris-II Panthéon-Assas, juge que le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) aura « de beaux jours pendant deux ou trois ans », mais est menacé de « s’effondrer avant la présidentielle » de 2012.
Q : Le NPA est-il une LCR « bis » ?
R : « Depuis les années 80-90 et le déclin du communisme, donc de l’idée révolutionnaire, la LCR qui est plus moderne que les deux autres partis trotskistes français (LO, POI), a un problème d’identité. Une partie minoritaire des militants considèrent que le logiciel bolchévique est périmé et sont prêts à se fondre dans un mouvement altermondialiste assez large. Le courant majoritaire, dont Olivier Besancenot, veut maintenir un trotskisme classique en élargissant ses bases. D’un point de vue interne, le moyen de garder l’ambiguïté, c’est de créer un Nouveau parti anticapitaliste. Le NPA, ce n’est plus officiellement un parti trotskiste. Il s’agit d’occuper une place qui serait culturellement celle des »gauchistes d’autrefois« et politiquement celle du Parti communiste français, mais sans vouloir gouverner ».
Q : Le NPA bénéficie-t-il de la crise économique ?
R : « C’est leur pari. Tout le monde a un discours sur le thème +il faut sauver le capitalisme contre les dérives récentes+. Le NPA va être le seul à dire que c’est du capitalisme que nous vient tout le mal. Ils essaient de combler ce vide politique. Je n’y crois pas, parce qu’en France, la sensibilité antilibérale est très forte mais la sensibilité anticapitaliste moins. La LCR, c’est un anticapitalisme radical : ils pensent que la propriété privée doit à peu près disparaître ».
Q : Quel avenir pour le NPA ?
R : « Le déclin radical du PCF, le recentrage des Verts et le manque de dynamisme du Parti socialiste lui ouvrent un boulevard. Dans un premier temps, le NPA aura un assez joli succès, notamment aux élections européennes où il fera cavalier seul sous prétexte qu’ils sont une organisation unitaire et large. D’ici deux ans, je parie qu’au lieu des 9.000 militants actuels, ils ne seront plus que 5.000, à cause de la difficulté à faire cohabiter des militants issus d’un parti très structuré et fondamentalement fermé comme la LCR avec des gens beaucoup moins structurés, sans expérience militante, qui vont se décourager. Ceux qui entrent au NPA en 2009 ne trouveront peut-être pas aussi séduisant qu’aujourd’hui de s’opposer à une alliance avec le PS (pour battre Nicolas Sarkozy) en 2012. Le NPA a de beaux jours pendant deux ou trois ans, mais cela va s’effondrer avant la présidentielle ».
jud/cgd/bfr