Pour la première fois, l’organisation trotskiste d’Olivier Besancenot a tenu hier une réunion nationale consacrée au projet de création d’un nouveau parti. La LCR veut notamment s’ouvrir aux jeunes de tous horizons.
« Je ne vous appelle pas camarade, car moi je ne suis pas de la LCR... » En prenant la parole lors d’un débat sur le nouveau parti que veut lancer Olivier Besancenot, Abdel, 27 ans, marque d’entrée sa différence. Venu en car d’Avignon, ce jeune homme issu du milieu associatif n’appartient à aucun mouvement.
Parmi les deux cents personnes présentes hier à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), quelques-unes ont le même profil que lui. Justement ceux qui intéressent Besancenot. Car pour concrétiser son projet, le postier de Neuilly sait qu’il doit attirer au-delà des rangs de la Ligue communiste révolutionnaire. Il veut aussi casser l’image, visible lors des congrès, de « militants cinquantenaires, plutôt blancs et plutôt enseignants ». Devant l’assistance, le leader d’extrême gauche décrit un des objectifs : devenir « l’outil » de la génération des émeutes de banlieue en 2005 et des manifs anti-CPE (le contrat première embauche de 2006).
« Cette démarche est intéressante, car ni le PS, ni le PC ni même la LCR ne répondent à ce qu’on attend, nous jeunes des quartiers » confie Abdel. Plus loin, Samira et Karima, Toulonnaises de 20 ans, avouent qu’elles ne s’étaient jamais senties concernées par la politique. « Besancenot est celui qui nous correspond le mieux » assurent-elles. Certains ont quand même déjà milité. Ainsi, Karène, 29 ans, était au Mouvement jeunes communistes (MJC). « Mais je n’ai plus trop d’illusions dans le PC... » souffle-t-elle. Des trotskistes de Rennes s’avouent, eux, un peu déçus car pour le moment, chez eux, l’idée de nouveau parti ne séduit pas au-delà de la LCR. « Mais il paraît que ça prend mieux dans d’autres villes » se consolent-ils. Tous pourront se compter lors d’une réunion nationale en juin qui précédera le congrès fondateur du nouveau parti d’extrême gauche en décembre.
Mais avant, l’une des difficultés sera de réussir à mêler les militants de la LCR et les nouveaux venus qui veulent « foncer ». Hier lors du débat, le clivage s’est fait sentir. Les premiers monopolisent la parole. Des étudiants de Nanterre, de la Sorbonne, de Rouen font de longs discours. « La prise de tête, ils nous gavent » commente Abdel d’Avignon qui finit par avoir le micro. « Je n’ai rien compris au trois quarts de ce que vous avez dit », lance-t-il, gentiment provocateur. Lui veut du concret : « On n’est pas là pour faire les fans de Besancenot, il faut qu’on soit des Olivier dans nos quartiers. » « J’espère qu’on ne va pas faire que parler pour rien et qu’on va se réveiller » conclut-il, très applaudi. Mais aussitôt, Emilien (LCR) enchaîne en dissertant sur le marxisme, l’appropriation des moyens de production... Long soupir d’Abdel.