1) José Bové envisage à nouveau d’être candidat dans
la foulée d’un appel sur Internet ayant rassemblé 25000
signataires et d’une réunion d’une partie du mouvement
issu du 29 mai. Si elle se prétend unitaire, sa candidature
ne l’est pas. En effet, les principaux courants politiques du
non de gauche (PRS, PCF, LCR, sans parler des républicains
de gauche...) sont divisés et soutiennent des candidats
différents. Et cette division se répercute évidemment
dans les militants ayant formé les collectifs du 29 mai et
ceux encore présents dans les collectifs. La réunion de
Montreuil n’était représentative que d’une partie du mouvement.
Une partie du mouvement qui n’a jamais discuté
démocratiquement de cette candidature. Le calcul à courte
vue de certains est de penser que l’écho médiatique de
José Bové peut régler les désaccords politiques existant....
ou pour d’autres il est de penser que ces désaccords
ne sont que des « réflexes d’appareil » et que les militants
inorganisés des collectifs vont imposer l’unité «
malgré les appareils »... sans régler les problèmes politiques.
Il suffirait en substance de faire confiance à la dynamique
pour imposer rien moins que le retrait de Buffet et
Besancenot, le retour des militants de PRS. Pourtant, ce
n’est pas en comptant sur l’audience médiatique d’un
homme providentiel ni sur le succès d’une pétition électronique
que ces divergences seront réglées. La candidature
de José Bové n’est qu’une candidature de plus qui va
renforcer l’éclatement des forces du non de gauche.
D’ailleurs, cette candidature Bové devient pour beaucoup
une candidature pour « faire payer le PCF et la direction
de la LCR. »
Dit autrement : José Bové, militant écologiste radical,
n’est dès lors qu’un candidat de plus, celui d’un des courants
politiques du non de gauche.
2) Les clarifications politiques nécessaires à ce que la
LCR s’engage avec d’autres dans une candidature
unitaire — à savoir : une attitude d’indépendance claire avec la
direction du PS — n’a pas pu se faire pendant des mois.
C’est pour cela que nous avons engagé depuis plusieurs
semaines la campagne Besancenot, une campagne qui
s’est installée dans l’opinion, qui a été l’objet de l’édition
d’un matériel et d’un planning diversifié d’interventions
(meetings, médias etc…). Si les clarifications que nous
demandions avaient été faites en temps utile, nous aurions
pu aboutir. Des camarades de la minorité nous disent
aujourd’hui, après nous avoir dit pendant des mois que
nous étions à côté de la plaque, que des garanties auraient
été apportées.
Il est vrai qu’un des textes de la réunion des 20 et 21
janvier dit : « La candidature de Ségolène Royal qui
accentue le caractère social-libéral de la campagne du
PS, tourne le dos aux exigences populaires et aggrave le
divorce entre la colère sociale et l’offre politique. Son
orientation sociale-libérale démontre l’impossibilité d’envisager
un accord gouvernemental ou parlementaire avec
le PS. Sa direction joue sur le réflexe « ne pas recommencer
le 21 avril 2002 » et tente de culpabiliser les électeurs
anti-libéraux, alors que ce n’est pas la multiplication des
candidatures anti-libérales en 2002 qui a causé l’échec de
Jospin, mais le bilan de la gauche plurielle ».
D’abord, ce passage est contredit par un autre, adopté
dans la « motion présidentielle » des 20 et 21 janvier – et
qui, elle, a été abondamment diffusée à la presse et dans
les réseaux - qui indiquant que la candidature Bové se base
sur les « 125 propositions » ainsi que sur le texte
« Ambition et stratégie », celui précisément dont la LCR
avait, en septembre dernier, souligné l’ambiguïté. Il est
donc à noter que, du point de vue de leurs textes de référence,
les candidatures de Buffet et de Bové se situent
dans le même cadre ...
Mais quand bien même, pourquoi diable ne pas l’avoir
fait avant ? Pourquoi avoir dit en chœur, depuis des mois,
quand il était encore possible de changer, que nos prévenances
n’étaient que des pinaillages pour masquer des
logiques d’appareil ? Personne ne peut être naïf au point
de ne pas voir qu’il s’agit là d’une inflexion d’opportunité,
destinée à nous placer dans la difficulté...
D’ailleurs, si nous n’avons pas pu aboutir quand cela
était possible, c’est parce que les dirigeants du PCF mais
aussi de sensibilités et mouvements que l’on retrouve
aujourd’hui dans le soutien à Bové ne partagent pas notre
position. Du côté d’Alter-Ekolo, par exemple, qui pèse
lourd dans l’entourage de Bové, on a affirmé à plusieurs
reprises qu’il fallait conditionner vote au second tour et
participation gouvernementale à des mesures politiques
que le PS s’engagerait à transformer en loi une fois
acquise une majorité au Parlement. Cela pose la question
de la fiabilité du personnage Bové qui a tout de même par
le passé indiqué, juré, craché, qu’il ne serait candidat que
si Fabius, Buffet et Besancenot ne l’étaient pas ! Puis ...
que si Buffet et Besancenot ne l’étaient pas. Aux régionales
en 2004, dans sa région, José Bové a appelé à voter
pour… Frêche. Quelles garanties pouvons-nous avoir,
aujourd’hui, sur le profil, les thèmes de campagne de cette
candidature… Défiance déplacée ? Alors, pourquoi plusieurs
intervenants - comme Yves Salesse, par exemple -
ont-ils eux-mêmes cru bon de rappeler Bové aux 125 propositions
?
3) Ceux qui pensent que la candidature Bové ferait
faire un pas en avant vers la nouvelle force politique anticapitaliste
se trompent et en seront pour leurs frais. Car ce
n’est pas le projet de Bové et de son entourage. Ces camarades
ne veulent pas construire une nouvelle force politique
: tout simplement parce qu’ils pensent qu’il n’y en
pas besoin, que l’on peut intervenir sur le champ politique
à partir d’un groupe restreint, disposant d’un bon carnet
d’adresse médiatique, d’un certain sens de l’initiative
« numérique » et de l’appui d’une nébuleuse aux contours
politiques très flous.
La genèse de ce projet est, de ce point de vue, déjà tout
un programme avec sa pétition Internet que nul ne peut
contrôler, où l’on règle les choix d’orientation et de candidature
d’un simple clic de souris, où l’on vote par acclamation,
où l’on siffle ceux qui émettent des réserves,
comme les « républicains de gauche », Yves Salesse ou
Clémentine Autain.
Et ces camarades ne veulent pas que cette nouvelle
force politique soit anticapitaliste, plaçant la lutte des classes
au centre de l’action politique, car globalement, ses initiateurs
sont plutôt d’essence « écolo-libertaire ».
4) Il ne fait aucun doute que Bové et son entourage
veulent aller jusqu’au bout. Rien ne garantit que cela sera
finalement le cas. Les obstacles sont multiples. Dans les
collectifs, des oppositions sont nées qui pensent que, loin
de faire avancer l’unité, la candidature rajoute confusion
et division, qu’elle insulte l’avenir, qu’un résultat électoral
décevant risquerait de minorer les combats – utiles, par
ailleurs – que Bové incarne et les causes qu’il défend. Et
les promoteurs du projet vont avoir un œil attentif sur les
sondages, dont les chiffres qu’ils annonceront pèseront
lourd dans la décision de poursuivre ou de stopper. Et
aura-t-il ses 500 signatures ? Rien de moins sur.
Comme il est dit précédemment, nous avons engagé
notre campagne depuis plusieurs semaines. Nous ne pouvons
pas et nous ne devons pas faire machine arrière pour
plusieurs raisons :
– Le profil et la candidature de José Bové n’a pas la
même fonctionnalité que celle d’Olivier Besancenot qui
incarne avec plus de netteté le renouvellement, l’indépendance
vis-à-vis du PS, l’alternative anticapitaliste, les
aspirations des salariés, des jeunes, des chômeurs et tout le
spectre de leur lutte, du CPE, à la grève de 2003, y compris
en passant par l’altermondialisme. Olivier Besancenot
a un profil politique que personne d’autre n’a : un jeune,
un travailleur. Et c’est un bon candidat, efficace dans les
médias comme dans les meetings.
– Il n’est pas du tout évident, ni écrit à l’avance, que sur
son nom Bové réunisse plus de suffrages que Besancenot.
Et quand bien même les sondages nous l’indiqueraient,
pourquoi nous retirerions-nous au nom de cela alors que
nous avons décidé de maintenir la candidature d’Olivier
quand elle ne faisait que 0,5 % dans les sondages en 2002
et que ces mêmes sondages annonçaient Arlette Laguiller
à 10 % ?
Si nous baissons la garde, le risque est fort que nous ne
parvenions pas à rassembler les 500 signatures, désormais
à notre portée si nous poursuivons et accentuons notre
effort, sans pour autant que Bové ne soit d’ailleurs assuré
de trouver les siennes. Il ne nous resterait plus qu’à commenter
le match entre Buffet et Arlette. Dans ce cas, on
aura tous l’air fin le 22 avril au soir.
Ainsi, Olivier Besancenot, avec la LCR, continue évidemment
sa campagne pour défendre, face à Sarkozy et à
l’extrême droite, un projet anticapitaliste, un projet alternatif
aux alliances institutionnelles autour du PS, sans
lequel les espoirs issus du 29 mai ne trouveront pas de réalisation.
5) Ces soubresauts, ces retournements sont, bien
entendu, liés au fait que la recomposition politique connaît
une nouvelle accélération, nourrie par la crise du PCF et la
volonté de s’engager sur le terrain électoral de milliers de
militants jusque là inorganisés. Mais toutes les forces qui
interagissent dans cette recomposition ne vont pas dans le
même sens et ne vont pas dans le bon sens. Certains cherchent
à unifier toutes les forces à gauche du PS, d’autres
veulent une nébuleuse mouvementiste écolo-radicale,
d’autres encore une convergence républicaine de gauche
et keynésienne. Il existe aussi un courant plus radical qui
aspire à une nouvelle force politique anticapitaliste. Ces
projets sont contradictoires et la phase dans laquelle nous
sommes toujours est celle de la confrontation entre ceux-ci.
Vouloir les faire maturer de façon précipitée est inefficace.
Cela prendra du temps. Pour que cela avance dans le
sens que nous souhaitons, celui du dégagement d’une nouvelle
force anticapitaliste – et chacun des trois termes est
important -, il faut que celui qui porte nettement ce projet
puisse le défendre avec le maximum d’audience. De ce
point de vue, à quoi cela servirait t-il que nous disparaissions
au profit d’un Bové qui, pour éminemment respectable
qu’il soit, n’a pas le même projet que nous ? Et qui, de
Bové ou de Besancenot, « parle » le mieux à ces milliers
de militants électeurs et sympathisants communistes
aujourd’hui déboussolés ?
Pour les législatives, nous pouvons reposer à nouveau
le débat. Nous allons nous préparer à être présents partout.
Mais, dans le même temps, nous engagerons le débat avec
tous les mouvements organisés qui se situeront sur le terrain
de la stricte indépendance vis-à-vis du PS. Si la droite
était défaite, il est évident que cette discussion aujourd’hui
virtuelle prendrait des tours pragmatiques et concrets à
l’heure où le PS cherchera une majorité au Parlement pour
mener sa politique social-libérale. Mais si nous ne sommes
pas présents à la présidentielle, nous ne pèserons pas
grand chose aux législatives…
C’est pour ces raisons que, plus que jamais, la priorité
des priorités, reste le recueil des parrainages.
Communiqué de la LCR sur la candidature Bové
Le janvier 22 2007
José Bové vient d’annoncer sa candidature. Ce n’est qu’une candidature de plus qui va renforcer l’éclatement des forces du non de gauche.
L’arc des forces du 29 mai n’a pas pu se rassembler autour d’un projet politique commun pour les prochaines échéances électorales. Ce n’est pas en comptant sur l’audience médiatique d’un homme providentiel ni sur le succès d’une pétition électronique que ces divergences seront réglées. La LCR avait posé depuis un an la question fondamentale de l’indépendance vis-à-vis du PS. Ceux-là mêmes qui n’avaient pas voulu clarifier cette question, écartant la LCR pour préserver la direction du PCF, ne l’ont pas fait davantage lors de la réunion de ce week-end. Aujourd’hui, ces désaccords se maintiennent et les principaux courants politiques du 29 mai ont fait des choix différents que ce soit PRS, le PCF ou les républicains de gauche.
Dès lors, s’annoncer comme le candidat unitaire n’a pas plus de légitimité que l’auto proclamation de Marie-Georges Buffet. Ni vis-à-vis de tous ceux et celles qui se sont engagés dans la bataille du non de gauche ni vis-à-vis de la plupart des collectifs antilibéraux qui, au cours des derniers mois n’ont jamais voté sur cette nouvelle candidature, ce qui va les diviser davantage. José Bové, militant écologiste radical, n’est dès lors qu’un candidat de plus, celui d’un des courants politiques du non de gauche.
Olivier Besancenot, avec la LCR, continue évidemment sa campagne pour défendre, face à Sarkozy et à l’extrême-droite, un projet anticapitaliste, un projet alternatif aux alliances institutionnelles autour du PS, projet sans lequel les espoirs issus du 29 mai ne trouveront pas de réalisation.