Mexico,
Le retour du gouverneur de l’État mexicain d’Oaxaca, Ulises Ruiz, a nécessité une opération policière d’envergure pour décapiter la direction du mouvement et répandre la peur. Le 25 novembre dernier, six jours avant l’investiture de Felipe Calderón, la septième gigantesque marche contre le gouverneur a été violemment refoulée par la police avec l’aide des paramilitaires. Le bilan est lourd pour l’Assemblée populaire des peuples d’Oaxaca (Appo), avec près de 200 détenus et 60 disparus. Les arrestations quotidiennes ont abouti à celle de son dirigeant le plus en vue, Flavio Sosa, immédiatement transféré dans une prison de haute sécurité à Mexico. Les dirigeants des organisations sociales, indigènes, politiques et toutes les coopératives qui composent l’Appo, sont menacés et intimidés.
Pour des raisons non éclaircies, 141 prisonniers - 107 hommes et 34 femmes - ont été transférés dans une prison de l’État du Nayarit à 1 200 kilomètres d’Oaxaca. 36 d’entre eux, vus par la Ligue mexicaine des droits de l’Homme, présentent des traces de torture. « Les détenus sont transférés pour occulter les preuves de torture et de mauvais traitement », a déclaré, à sa sortie de prison, Yessica Sanchez, présidente de la Ligue pour Oaxaca. Avant d’ajouter : « Il s’agit d’un conflit politique, ce sont des militants sociaux et des citoyens, non des délinquants. Certains sont totalement étrangers au conflit, ce qui prouve les arrestations aléatoires. »
Le sort de quelque 200 détenus fait l’objet de vives inquiétudes pour les organisations de défense des droits de l’Homme. 16 jours après les faits, la plupart n’ont toujours pas pu communiquer avec leur famille. Ceux qui ont été vus par la Ligue sont terriblement effrayés, en mauvaise condition physique et leurs témoignages et ceux de leurs proches sont accablants. Selon l’expertise de la Ligue et les témoignages recueillis, « le 25 novembre fut une opération très violente, organisée pour saboter un mouvement ».
À Oaxaca, la répression a permis de préserver l’alliance conclue entre le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI) de Ulises Ruiz et le Parti d’action nationale (PAN) du président Calderón, afin que ce dernier puisse être investi devant le Congrès le 1er décembre dernier. Pendant sa campagne, le nouveau président avait annoncé une politique de mano dura (« main dure »). Son premier geste dans ce sens fut la nomination du ministre de l’Intérieur, Francisco Ramírez Acuña, accusé par les organisations des droits de l’Homme d’avoir organisé « l’arrestation et la torture des opposants au sommet Union européenne-Amérique latine en 2004 ». Un dur de dur... Le 22 décembre sera une journée internationale de mobilisation pour Oaxaca.