Démarrée le 3 mai, la grève des chômeurs se manifeste sous différentes formes d’actions purement revendicatives ou bien festives et conviviales afin de dédramatiser la situation vécue quotidiennement par les chômeurs et précaires.
Ainsi, à Lille, un apéro organisé devant Pôle emploi a vu une petite dizaine de militants trinquer avec les chômeurs présents : « À nos luttes... À nos luttes futures et solidaires pour l’emploi ! », à Bordeaux, avec un pique-nique revendicatif devant le Pôle emploi, ou encore à Lyon, où une pétition de 1 500 signatures, demandant notamment l’arrêt des radiations et le maintien des indemnités pour les chômeurs en fin de droits, circule via une tournée des agences. À Montreuil, un piquet de grève permanent constitue un centre névralgique dans la ville. À Rennes, d’où est parti le mot d’ordre de grève, un Pôle emploi a été déménagé pour protester contre l’envoi de la police dans cette agence le jour précédent, alors que des chômeurs et précaires ne faisaient qu’accompagner des usagers dans le labyrinthe administratif du Pôle. De même, à Montpellier, Perpignan, Nice, Nancy, Tours, Caen, Nantes, Brest, Lannion… de multiples actions ont été menées dans les Pôles emploi, les Caisses d’allocations familiales (CAF), les administrations, les organismes de formation ou les boîtes de coaching, afin de dénoncer le recours massif à la sous-traitance par Pôle emploi.
Occupations de Pôle emploi ou de CAF
Les occupations de Pôles emploi ou de CAF se multiplient ainsi dans toute la France, permettant au passage de débloquer des dizaines de dossiers (rétablissement de l’ARE, de l’ASS ou du RSA, annulation des indus, re-calcul à la hausse des allocations…). Ces intrusions ne sont pas du goût des directions de Pôle emploi dont la réponse immédiate est de renvoyer les conseillers chez eux ou de fermer les agences. Tout « sans-emploi » étant considéré de fait comme un fraudeur potentiel, les contrôles incessants et les courriers menaçant de radiation ne cessent d’augmenter. D’où une certaine tension latente entre les chômeurs et les salariés de Pôle emploi, qui voient leurs conditions de travail se dégrader et se trouvent dans l’incapacité d’exercer correctement leur boulot. C’est la raison pour laquelle certaines agences se sont mises en grève de manière sporadique, et un appel national à la grève a été lancé pour le 8 juin. Les agents réclament de fait la titularisation de tous les CDD et autres contrats précaires, et dénoncent le recours aux heures supplémentaires servant à combler le retard de traitement des dossiers. Ici ou là, les mouvements de chômeurs se joindront aux salariés de Pôle emploi pour afficher leur solidarité et faire entendre et partager leurs propres revendications. Tous les militants du NPA sont invités à « prendre part activement à ces actions et à les soutenir partout » et à « construire des collectifs de chômeurs là où il n’y en a pas ». C’est le sens du vote du CPN des 29 et 30 mai pour un appel à la grève des chômeurs, s’inscrivant ainsi dans une série de mobilisations initiée par des collectifs de précaires et chômeurs. Seule la convergence des luttes permettra d’abattre la frontière entre chômeur et salarié. La grève des chômeurs aura au moins permis de rendre visibles celles et ceux qui n’apparaissent que dans les chiffres du chômage.
La grève des chômeurs et précaires est aussi le refus d’accepter, comme l’ont dit les chômeurs qui se sont invités sur le plateau de France 2, « n’importe quel travail de dix heures par semaine payé une misère dans les secteurs les plus difficiles ». C’est aussi dénoncer l’exploitation salariale des populations les plus défavorisées, notamment les habitants des quartiers populaires, où le taux de chômage atteint des sommets. Mais c’est aussi une manière de ne pas rester isolé, de « sortir des eaux glacées du calcul égoïste dans lesquelles on nous plonge ». La grève des chômeurs et précaires, c’est décider ensemble d’enrayer une machine à précariser, en imposant aux Pôles emploi ou CAF l’arrêt des radiations, la fin de l’offre raisonnable d’emploi, du suivi mensuel personnalisé, l’arrêt du 3949… et lutter contre la culpabilisation qui est faite sans arrêt aux chômeurs et précaires. C’est de ces multiples constats de dysfonctionnement qu’est partie la lutte des chômeurs et précaires, en prenant appui sur différents collectifs existants ou constitués depuis les Marches contre la précarité. Sous la forme de collectifs d’individus ou à travers la participation de diverses organisations (AC !, Apeis...), la volonté est la même de faire vivre ce mouvement, au cours d’assemblées générales, de réunions publiques, de débats sur la notion de « travail » et sur ce que peut signifier une grève des chômeurs quand il n’y a pas d’autre lieu à occuper que les Pôles emploi ou les CAF, pour faire entendre ses revendications non pas de manière individuelle, comme c’est le cas le plus souvent, mais de manière collective. Une grève qu’il s’agit de ré-inventer tous les jours afin de construire de nouvelles formes de luttes et de résistance.
Sylvain LG, Commission précarité
* Paru dans Hebdo TEAN 59 (10/06/10).
Libérez les chômeurs et les précaires arrêtés
Communiqué du NPA
Les associations de précaires, et de chômeurs, soutenues par différentes organisations et associations, ont occupé une partie du siège national de Pôle emploi, à la Porte des Lilas, pour dénoncer la situation intolérable des chômeurs et des précaires du fait de la politique du gouvernement et du Medef qui protègent les banques et veulent faire payer la crise aux salariés en détruisant tous les droits sociaux à commencer par le droit à un travail stable et bien rémunéré.
La police a procédé à un important déploiement de force et a interpelé de nombreux manifestants pour les emmener dans différents commissariats.
Le NPA, solidaire de l’action menée par les chômeurs et les précaires, exige leur libération immédiate et l’absence de toute poursuite à leur égard.
Le 3 mai 2010
Réception chez la Marquise
Pari réussi pour le collectif de l’Appel et la pioche : près de 600 personnes sont venues le 15 mai chez la Marquise de Sévigné, place des Vosges à Paris, pour le Plan de relance contre la précarité. De 11 heures à minuit, le squat de Jeudi noir a accueilli des ateliers, projections, débats et concerts, ainsi qu’une quinzaine d’associations, organisations, partis, collectifs et syndicats autour du thème de la précarité. Qu’est-ce qu’un désobéisseur ? Comment organiser des pique-niques dans les supermarchés ? Comment s’organise la lutte des sans-papiers ? Quels aspects revêt la précarité dans le domaine de la santé ? « Chômeur » peut-il être un statut ? Pourquoi et comment les femmes sont-elles les premières victimes de la précarité ? Comment user des médias sans se faire abuser ? Quelle alternative politique contre la précarité ? Ce dernier débat rassemblait les représentants de la gauche anticapitaliste : Clémentine Autain (Fase), Ian Brossat (PCF), Éric Coquerel (PG), Guillaume Davranche (AL) et Anne Leclerc (NPA). Si des divergences de point de vue demeurent, tous les participants de cette journée festive et militante sont bien décidés à mettre la précarité « hors-la-loi ».
* Paru dans Hebdo TEAN 56 (20/05/10).
Chômeurs : grève contre l’isolement
Depuis une semaine, une série d’actions mobilise chômeurs et précaires sous le symbole de la « grève des chômeurs ».
À Rennes, Brest, Quimper, Tours, Caen, Nantes, Paris, Nice, Bordeaux, Montpellier, Montreuil et bientôt Lille, la grève revêt peu à peu ses formes originales : déménagement du mobilier à Rennes, occupation de la caisse d’allocation familiale à Brest, piquet de grève dans la rue piétonne de Montreuil. À Paris, l’occupation du siège de Pôle emploi a été suivie de 97 arrestations qui ont entraîné, le lendemain, une motion unanime des syndicats de Pôle emploi (SNU-FSU, Solidaires, CGT, FO) soutenant les revendications des chômeurs.
Lancé par le collectif de Rennes – qui avait organisé des actions et manifestations importantes en décembre 2009 –, appuyé sur la coordination bretonne – dont le collectif de Brest avait occupé pendant huit jours la mairie en décembre –, ce mouvement reprend les acquis des Marches contre le chômage et les précarités de fin 2009. Soutenu par la Coordination des intermittents et précaires d’Île-de-France (CIP-IDF), il a été rejoint par AC ! et diverses organisations de soutien aux chômeurs. Malheureusement, les anciennes associations de chômeurs (Apeis, CGT Chômeurs) en sont encore absentes.
La grève, c’est le refus, sous toutes ses formes, du contrôle que met en place Pôle emploi. C’est le refus du travail imposé, avec les « offres raisonnables d’emploi », déqualifiées, partielles, précaires et très éloignées du domicile. C’est, comme le réclame le tract de Nice, le « blocage de la machine à précariser » pour réclamer l’arrêt des radiations et des autres harcèlements.
Comme le dit un manifestant de Nantes, « la grève, c’est l’occasion de s’organiser collectivement, de faire plier la machine Pôle emploi – en accompagnant les chômeurs en cas de problèmes par exemple – et de lutter contre l’individualisation, la culpabilisation et l’exploitation des chômeurs avec des boulots précaires. Ce n’est plus un chômeur face à Pôle emploi mais un + un + un... Pas forcément avec des revendications à la clé mais surtout la volonté de s’unir pour inverser le rapport de forces en notre faveur. »
Cette grève marque une nouvelle étape dans la remobilisation des chômeurs et précaires. Elle doit être soutenue par le maximum de forces dans notre pays.
Louis-Marie Barnier
Extraits de l’appel à la grève lu, lors de l’intervention inattendue d’un collectif à l’émission « L’objet du scandale » sur France 2 :
« Franchement, nous avons mieux à faire que de vendre notre temps de vie pour un salaire de misère, à des entreprises qui décident à notre place quoi et comment produire. Avec ou sans emploi, à la retraite ou plus jeunes, nous voulons un revenu garanti pour tous et toutes, inconditionnel, qui nous permette de vivre et ne plus penser le travail comme ce que nous avons ou n’avons pas, mais comme ce que nous faisons. Que mille collectifs fleurissent sur les décombres du plein emploi. Inventons ensemble la grève des chômeurs et précaires ! »
* Paru dans Hebdo TEAN 55 (13/05/10).
Solidarité avec les grévistes du Samu social
Communiqué du NPA
Depuis le 31 mars, le Samu social de Paris est touché par une grève. C’est la première fois, depuis sa création, en 1994, que cet organisme qui vient en aide aux déshérités connaît un conflit social qui débouche sur une grève.
La précarité au travil est largement répandue au Samu social. Seule une minorité des salariés bénéficie d’un CDI. Les trois-quarts restant sont cantonnés aux CDD pendant plusieurs années. S’ajoutent à cette situation précaire, des bas salaires et des heures supplémentaires ou des primes non payées.
La crise économique décuple le besoin de personnels d’organismes sociaux au contact de populations frappées par la misère.
Les moyens financiers de l’état, de la ville de Paris doivent être à la hauteur des besoins.
Pour le NPA, cette grève est à rapprocher du mouvement qui a mobilisé les salariés d’Emmaüs il y a quelques semaines.
La crise économique a des répercussions qui touchent les conditions d’embauche, les conditions de travail, les salaires dans le mouvement associatif, les organisations caritatives.
C’est pourquoi, le NPA soutient les grévistes du Samu social ainsi que leurs revendications.
Le 12 avril 2010