« En fait, toutes les difficultés commencent. » Daniel Cohn-Bendit n’aime rien mieux que prendre tout le monde à contre-pied. Dès 20 heures, sur le plateau de France 2, il a donc préféré évoquer, plutôt que la victoire de la gauche, les défis qui l’attendent. "Parce que si on ne veut pas
refaire le coup de 2004, où on gagne pour perdre tout à la présidentielle après, il faut vraiment travailler à un projet."
Le projet en question, pour lui, c’est avant tout celui d’un « grand parti écologiste » pérenne. Il lancera lundi un « appel du 22 mars » dans ce sens, dans le quotidien Libération. Mais au-delà, la question qui va désormais occuper les esprits à gauche, c’est bien la présidentielle de 2012 et les moyens de la gagner.
Dans 19 régions sur 22, socialistes, écologistes et Front de gauche ont su s’allier pour l’emporter au second tour. Un plébiscite de l’alliance à gauche, que nombre de personnalités aimeraient voir prospérer. Dimanche soir sur les plateaux de télévision, nombreux étaient les dirigeants de gauche à afficher leur volonté d’union. Tel Bertrand Delanoë, qui appelle, sur TF1, à « préparer l’alternative unie de tous les progressistes et les écologistes », car « c’est comme cela que l’on peut donner une perspective à la France ».
« CE JOLI MOT D’UNION »
Christophe Borgel, responsable des élections au PS, implore : « il faut garder comme la prunelle de nos yeux l’unité retrouvée et la faire persévérer ». Insistant sur un « score historique pour la gauche, le plus important depuis le début de la Ve République », Harlem Désir juge qu’il « ne nous donne que des devoirs, devoirs d’unité, de combativité et de créativité ».
Martine Aubry, quant à elle, s’est félicitée de ce « joli mot d’union » mis « au cœur de la gauche ». "Les Français nous aiment unis.
La gauche solidaire qui renoue avec les Français en ce premier jour de printemps doit encore se consolider et s’étendre« , a-t-elle ajouté. »Gauche solidaire« : le vocable a été brandi par la première secrétaire du PS tout au long des régionales, comme un héritage de cette »gauche plurielle" qui gouverna le pays de 1997 à 2002.
Mais au-delà des postures, reste à construire des accords. Et les questions sont nombreuses : les primaires du PS seront-elles ouvertes à des candidats d’autres partis ? Ceux-ci y participeront-ils ? Le Front de gauche n’a pas tranché la question, mais pencherait plutôt vers une candidature en propre. Daniel Cohn-Bendit s’est fait le chantre d’une solution pour son parti, peu habitué à des scores princiers à la présidentielle : monnayer son alliance avec le PS dès le premier tour contre l’assurance d’avoir des sièges de députés. Jusqu’ici, l’idée faisait plutôt grincer des dents chez les écologistes. Fera-t-elle son chemin ?
Enfin, plus important sans doute que tout le reste : le PS qui chante les louanges de l’union parviendra-t-il à surmonter d’abord ses propres divisions ? Renforcée par son score plébiscitaire face à Dominique Bussereau, Ségolène Royal a déjà amorcé son retour sur la scène nationale. Et laisse planer la menace de se présenter quoi qu’il arrive en 2012. Avec ou sans le parti.
Samuel Laurent