Si la poussée du PS est manifeste, ce n’est pas le seul enseignement des régionales pour la gauche. En accordant 12, 47 % des suffrages à Europe Écologie et 6,95 % au Front de gauche présent dans dix-sept régions (dont trois en alliance avec le NPA), électrices et électeurs de gauche ont voulu marquer leur préoccupations écologistes et sociales à des socialistes sourds à ces aspirations.
Même si son score est inférieur à celui obtenu aux européennes, le rassemblement Europe Écologie s’installe au plan électoral comme la seconde force politique à gauche. Les raisons de ce succès sont multiples. Au premier plan, des préoccupations écologistes fortes dans la population, liées pour l’essentiel à l’inquiétude sur l’avenir de l’humanité du fait de la crise climatique. Même si le programme des Verts et de leurs alliés ne porte pas une réponse à la hauteur des enjeux ce qui supposerait de rompre avec le modèle de production capitaliste, il n’en demeure pas moins qu’ils incarnent l’écologie plus que quiconque. Les écolos captent en même temps une aspiration au
renouvellement de la classe politique même si cela ne correspond pas à la réalité car les principaux responsables de ce courant politique sont largement mouillés dans le jeu institutionnel, en alliance avec le PS, dans les conseils régionaux sortants et au gouvernement entre 1997 et 2002.
Du côté du Front de gauche, le résultat est plutôt bon dans le contexte. Il est difficile de comparer d’une élection à l’autre car en 2004, le PCF a présenté des listes indépendantes dans sept régions alors que le Front de gauche était présent cette fois dans dix-sept d’entre elles. Mais pour prendre deux exemples comparables, le PCF perd en pourcentage en Île-de-France, en Auvergne et en Limousin (ici malgré une alliance large allant jusqu’au NPA) et gagne des points en Aquitaine. Aux régionales, le Front de gauche enregistre une moyenne de 6,95 % contre 6,45 % aux européennes mais avec des résultats très contrastés et des pointes dans les bastions traditionnels PCF. Le fait est qu’en choisissant l’alliance avec le Parti de gauche, le PCF, lors de ces deux élections, a enrayé son déclin continu entamé dans les années 1980 sans pouvoir toutefois inverser la courbe et rencontrer une dynamique nette.
« (Les) élus (du Front de gauche) agiront sans trêve pour que les régions soient des boucliers face à la politique antisociale du pouvoir et des lieux d’innovation pour des politiques alternatives au libéralisme » indiquait l’éditorialiste de l’Humanité, le 16 mars. Un discours déjà entendu en 2004 quand le PCF, allié du PS, prenait la direction d’une écrasante majorité de régions et qui ne s’est pas traduit dans les faits.
Le Front de gauche est confronté à d’épineuses questions. Celle du leadership entre Jean-Luc Mélenchon et les dirigeants communistes avec une concurrence qui ira crescendo en avançant vers les présidentielles. Celle des rapports avec le PS, tant le risque est fort de décevoir les espoirs populaires dans un gouvernement d’union de la gauche relooké. Malgré tout, nous sommes prêts à la fois à poursuivre le débat avec le Front de gauche sur les perspectives politiques et à agir ensemble pour bloquer la politique de Sarkozy tout de suite, et d’abord en œuvrant au succès de la mobilisation pour la défense des retraites.
Fred Borras