J’ai décidé de quitter le PCF. Ce qui motive mon départ
c’est, précisément, ma volonté de rester fidèle à mes
idées et à mes engagements communistes.
Pour moi, le communisme c’est d’agir avant tout pour le
rassemblement des citoyens et des forces pour
permettre la transformation sociale et écologique. Or, le
comportement du PCF, depuis plusieurs années, tourne
le dos à ces objectifs.
Plutôt que contribuer à inventer un mouvement
totalement ouvert aux forces et surtout aux citoyens qui
ont des engagements politiques en dehors des partis
politiques qu’ils jugent trop sclérosants, il s’entête à ce
que le rassemblement se fasse autour de lui, dans le
cadre de rapports de forces et de domination. Ainsi, il
tourne résolument le dos aux forces prêtes à se
mobiliser ensemble face à l’horreur sociale morale,
écologique et économique dans laquelle nous baignons
ou plutôt nous nous enlisons. Et pourtant, ces forces
sont très diverses et de très nombreux citoyens sont en
attente de formes de rassemblement qui respectent leur
intelligence, leur savoir faire, leurs idées, leur envie de
décider, leur regard sur le monde, leur liberté.
Le PCF n’est plus ce qu’il a été et depuis longtemps. Les
jeunes, les intellectuels qu’il avait massivement
rassemblé l’ont déserté. La classe ouvrière ne lui fait
plus confiance. Cette asphyxie lente et profonde aurait
dû le conduire à tenter de se réoxygéner par une
politique de rassemblement avec d’autres forces dont il
aurait accepté qu’elles lui apportent ce qui cruellement
s’échappait inexorablement. C’est le contraire qui s’est
produit. Après avoir empêché une candidature unitaire
des antilibéraux aux dernières élections présidentielles,
le PCF s’entête à nouveau à ce que le rassemblement
se fasse autour de lui pour les élections régionales.
J’avais encore par naïveté ? par optimisme inconsidéré ?
pensé que le PCF proposerait à ses partenaires du
Front de Gauche Patrick Braouezec comme tête de liste
en Ile-de-France.Tout le monde reconnaît ses capacités
à rassembler. Sa détermination à porter la lutte contre
les inégalités est appréciée. Son engagement à mettre
la banlieue, sa créativité, la promotion de sa
multiculturalité au cœur des enjeux de Paris Métropole
aurait été un véritable atout pour faire entendre la voix
d’un territoire régional juste et équilibré. Et bien non, le
choix du PCF reste un choix étroit. En proposant son
futur secrétaire national, il se trompe d’enjeu et casse
l’éventuelle dynamique qui aurait pu s’instaurer. Ce n’est
même pas un retour en arrière, mais une fuite en avant
réitérée dans le sectarisme. C’est un nouveau gâchis.
Autre sujet, tout aussi décisif pour moi, la gestion de
l’eau. J’ai déjà eu l’occasion de dire que j’en voulais à
la direction du PCF d’avoir contribué à ce que des élus
de la région parisienne favorisent le renouvellement du
plus gros contrat européen d’une multinationale de l’eau
et empêchent la gestion en régie publique et la baisse
du prix de l’eau. Tous ceux avec qui nous menons ce
combat ont été choqués, meurtris, volés d’une possible
victoire.
Alors, moi qui suis COMMUNiste et pour qui la gestion
en COMMUN des biens qui nous sont COMMUNs est le
minimum du COMMUNisme que dois-je faire ? Être
fidèle au parti ou fidèle à mes idées ? Au PCF, il ne
devrait pas y avoir d’intérêt supérieur à l’intérêt général,
mais il arrive malheureusement souvent que des
intérêts, jugés comme ceux du Parti, passent avant
l’intérêt général. Trop souvent !.Et les combats qui me
tiennent le plus à cœur ne sont pas portés par le PCF,
c’est le moins que l’on puisse dire. Je dois donc en tirer
les conclusions, la meilleure façon, pour moi, d’être
communiste est de ne pas rester membre du PCF. Ceci
n’altère pas l’estime que j’ai pour nombre de militants du
PCF et la confiance que j’ai en Christian Favier pour sa
manière ouverte et rassembleuse d’exercer, bien à
gauche, la Présidence du Conseil Général du Val-de-
Marne.
Il y a plusieurs mois des militants d’Europe Écologie
m’ont proposé, en tant que militant communiste, d’être
candidat à côté d’eux, sur la liste que va conduire Cécile
Duflot pour les élections régionales. Je décide
d’accepter et veux dire pourquoi.
Chacun connaît mes engagements dans le domaine
social notamment à Vitry où je suis élu local et dans le
domaine écologique comme militant et Vice-Président
du Conseil général. La politique, pour moi, c’est à la fois
des convictions, de l’ouverture aux idées des autres et
des actes concrets. Comment pourrais-je être insensible
à la possibilité ouverte notamment en cas de victoire
d’Europe Écologie de contribuer à traduire des idées et
des combats auxquels je crois pour l’Ile-de-France. S’il y
a une population qui a besoin que l’on fasse coïncider
urgences sociales et urgences écologistes c’est bien
celle de la région parisienne.
Comment pourrais-je être insensible à cette main
tendue, alors que je côtoie souvent des militants
d’Europe Écologie et que j’apprécie chez nombre
d’entre eux la détermination qu’ils mettent à mener leurs
combats ? Même si certains ne se réclament pas de la
lutte contre le système capitaliste, leurs actions
concrètes contestent ce mode de développement. Et
pour moi, ça compte beaucoup. La question de mettre
en accord ses actes avec ses paroles a évidemment une
dimension morale extrêmement précieuse, mais elle est
surtout au cœur de notre capacité ou non à changer les
choses. Il m’arrive encore souvent d’entendre dire que
modifier son mode de vie, ses comportements n’est pas
suffisant. Certes ! Mais c’est absolument indispensable
si on veut être capable de changer davantage. Comme
le disait Gandhi : « vous devez être le changement que
vous désirez voir en ce monde ! » Oh je sais, on me dira,
et on me dit déjà, Cohn Bendit, ses appels du pied au
centre… je ne les approuve pas. Mais Europe Écologie
c’est aussi Augustin Legrand et son engagement pour
les mal logés, Éva Joly et sa détermination sans
concession contre les paradis fiscaux, Philippe Mérieux
et ses idées novatrices pour l’école, José Bové et ses
combats écologiques contre les OGM… et tous ceux qui
avec eux se reconnaissent dans ces espoirs. Je sais les
contradictions que cela induit. Elles ne me font pas peur
bien au contraire. Je n’adhère pas à un nouveau parti.
Je participe à la démarche ouverte d’Europe Écologie
qui consiste à mettre ensemble des militants de réseaux,
d’associations, de partis, des experts, tous convergents
mais tous différents. Créer de la confrontation provoque
de l’intelligence et de l’imagination et peut-être une
audace qui a quitté depuis un bout de temps la gauche
classique. Cela me plait et je souhaite, sans en être sûr,
que cette démarche inventive et inédite réussisse.
En bref, pour ma part, je ne suis ni en attente de
quelque chose de chimiquement pur, ni béat devant
cette construction récente. Ce qui m’intéresse par
contre, c’est qu’il y a là des ingrédients qui créent de la
vie au cœur des enjeux sociaux et écologiques, du
débat, de la dynamique.
Ce qui est sûr, c’est que nous sommes très nombreux à
chercher à ouvrir une vraie alternative à Sarkozy en
s’attaquant à la racine capitaliste des inégalités sociales
et à la racine productiviste des dégâts écologiques et
climatiques. Nous le faisons en des endroits divers et de
façon différente. Chacun répond à sa manière à sa
recherche d’efficacité politique. Continuons à en
débattre, à nous rencontrer. Faisons-le sans esprit de
boutique, de concurrence et de division. Et nous nous
retrouverons car il le faut absolument.
Jacques Perreux