Pourquoi avez-vous organisé la contestation contre les JO et des rassemblements sur le passage de la flamme ?
Il Gabrio - La première chose est de rétablir un fait historique. Le rituel du porteur de la flamme à travers le pays fut créé par les nazis, lors des JO de 1936. Par conséquent, parler de paix et de fraternité est une hypocrisie notamment dans un contexte mondial de développement de l’ultralibéralisme, de guerre et de racisme. Plus fondamentalement, les JO sont l’occasion d’un étalage indécent de sponsors qui ont du sang sur les mains, comme General Electric, qui fournit les moteurs d’avions qui bombardent la population civile en Irak, ou la Finmeccanica, qui est une industrie d’armes. Ajoutons la mort de quatre ouvriers sur les chantiers de construction des sites au cours de l’année 2005, et on comprend alors aisément notre slogan : « Torino 2006 Giochi sporchi » (« Jeux dégueulasses »). Giovanni comunisti - La gestion de l’événement démontre l’objectif de la classe dominante italienne et notamment turinoise. Le projet de la bourgeoisie turinoise (FIAT notamment) est de transformer Turin en liquidant, à terme, sa tradition industrielle de délocaliser les sites de production et de ne conserver qu’une vitrine commerciale de la FIAT.
Les habitants de la vallée de Susa, opposés au TGV ont aussi organisé des blocages sur le parcours de la flamme. Voyez-vous un lien avec la contestation olympique ?
Giovanni comunisti - Le même problème démocratique s’est posé. Aucune consultation populaire n’a été organisée concernant le projet du tunnel pour le futur TGV italien (TAV) et l’organisation des JO à Turin. Quinze milliards d’euros pour le TAV et 4,5 pour les JO. Le service public des transports est moribond et le gouvernement s’escrime à dilapider l’argent public dans des projets pharaoniques. Les JO sont le relais de cette politique. De plus, la militarisation de la vallée et de Turin nous semble grotesque et dangereuse. Pour les JO, l’armée a, par exemple, installé deux batteries de missiles à Turin. Hélicoptères (Eurofighter de Dassault), flics armés de mitraillettes à tous les coins de rues, tout ceci pour faire régner la trêve olympique (ou l’état d’urgence !).
Plus généralement, qui a participé aux rassemblements à Turin ?
Il Gabrio - Les manifestations ont été organisées par la mouvance « antagoniste » (No global, autonomes, disobbedienti, gauche radicale...). Par ailleurs, de nombreuses délégations de secteurs ouvriers traditionnellement combatifs à Turin ont participé aux rassemblements. Cependant, cette contestation se confronte au consensus olympique largement partagé par tous les secteurs de la société.
Quelle est l’attitude des partis de gauche par rapport aux mobilisations anti-JO ?
Giovanni comunisti - Les Verts sont restés silencieux. Les communistes italiens [PDCI, scission de droite de Refondation communiste], fidèles à eux-mêmes, sont en faveur de ce genre d’événements, en vertu du développement du pays. DS [équivalent du PS] fait partie de l’organisation des JO. Le cas de Refondation est plus ambigü. À Turin, la partie institutionnelle (élus) s’est déclarée opposée aux actions de blocage mais, généralement, les militants supportent mal de voir leur ville aux couleurs de Coca-Cola ! Quant à Bertinotti, premier secrétaire de Refondation, c’est un pas en avant, deux pas en arrière. Prisonnier de son accord électoral avec la social-démocratie italienne en vue d’une participation au futur gouvernement Prodi, sa position varie d’un jour à l’autre.