TOKYO CORRESPONDANCE
La course à la présidence sud-coréenne pourrait bien vivre un tournant décisif. Depuis le début de la campagne, le Grand Parti national (GPN), formation d’opposition de tendance conservatrice, est donné largement vainqueur du scrutin du 19 décembre. Son candidat, Lee Myung-bak, est en tête des sondages avec plus de 40 % des intentions de vote.
Or les partis de la majorité, proches de l’actuel président Roh Moo-hyun, retrouvent l’espoir. Lundi 12 novembre, le Nouveau Parti démocrate unifié (NPDU) et le Parti démocrate ont ainsi annoncé leur fusion pour former un « bloc libéral », qui devrait se doter d’un candidat unique.
Ce rapprochement intervient alors que la dynamique de victoire du GPN s’enraye depuis le 7 novembre, jour où Lee Hoi-chang, l’un des fondateurs du GPN, a fait savoir qu’il se lançait à son tour dans la campagne. Cet ancien juge de la Cour suprême avait pourtant annoncé sa retraite de la vie politique, après deux échecs aux présidentielles de 1997 et 2002.
La stratégie de Lee Myung-bak se trouve bouleversée par cette candidature surprise. Rompant avec les clivages traditionnels, il a choisi d’orienter sa campagne sur les questions économiques. Ses partisans, les plus centristes du GPN, apprécient son pragmatisme et ne s’opposent pas à sa volonté de poursuivre la politique de rapprochement avec la Corée du Nord.
A l’inverse, Lee Hoi-chang fait figure de conservateur dogmatique, attaché à une posture de fermeté vis-à-vis de Pyongyang. Ses soutiens se comptent parmi les franges les plus à droite du GPN. Justifiant sa candidature, il a critiqué Lee Myung-bak, dont l’attitude à l’égard de Pyongyang serait « vague », manquant de fermeté « pour empêcher un désastre nucléaire et dénuée de vision pour réaliser une paix sincère ». Lee Hoi-chang a par ailleurs précisé qu’il voulait « mettre fin (à ce) régime gauchiste ». Ses chances de succès ne sont pas minces car il reste populaire.
Dans le même temps, Lee Myung-bak subit une érosion de sa cote dans l’opinion. Il est soupçonné d’implication dans les manipulations de bilans financiers du fonds BBK, dans lequel il avait investi. Lee Bang-hoo, secrétaire général du GPN, a d’ailleurs laissé entendre que Lee Hoi-chang avait décidé de se porter candidat car il « aurait reçu des preuves de l’implication de Lee Myung-bak ».
Le candidat officiel du GPN peine également à obtenir le soutien de son opposante lors des primaires, Park Geun-hye. Celle-ci, populaire au sein du parti, pourrait donc jouer les arbitres. Conscient de ce pouvoir de nuisance, Lee Myung-bak lui a promis la présidence du GPN au cas où il remporterait l’élection. Rien ne dit que cela sera suffisant.