On entend trop souvent des autorités intellectuelles ou religieuses, à commencer par le très catholique pape du Vatican, prétendre que l’Occident chrétien serait intrinsèquement démocratique, civilisé, rationnel, à la différence de l’Orient (musulman). Considérons ici que le refus de la torture est un signe positif de civilisation, en espérant que cette affirmation ne sera pas jugée trop arbitraires par nos critiques. Et présentons comme pièce au débat les résultats, publiés le 19 octobre, d’un sondage commandité par la télévision britannique BBC.
Ce sondage a été réalisé auprès de 27.000 personnes dans 25 pays. Il cherche à mesurer l’approbation, dans l’opinion publique, du recours à la torture. Si 59% des sondés s’y déclarent opposés, 29 % y sont favorables « dans certains cas ». Aucune frontière de civilisation n’explique dans quels pays l’approbation de la torture est forte. Le pourcentage d’opinions favorables est en effet le plus élevé en Israël (43%) et en Irak (42%), aux Philippines et en Indonésie (40%), en Russie et en Chine (37%), ainsi qu’aux Etats-Unis (36%). Occident et Orient, sphères chrétiennes, juives, musulmanes et confucéennes se retrouvent pêle-mêle dans le peloton de tête.
Les résultats du sondage de la BBC reflètent évidemment les poids des situations (guerres, attentats…), mais aussi des politiques poursuivies par les gouvernants et, osons le mot, par les classes dominantes. Le taux élevé d’approbation aux Etats-Unis, par exemple, ne se comprend pas sans la campagne acharnée menée depuis des années en faveur de la torture par le fort croyant président Bush. En ce domaine aussi, si essentiel à la défense des droits humains les plus élémentaires, l’ennemi est à combattre dans tous les pays.