BERLIN CORRESPONDANTE
L’essentiel était de retrouver un semblant d’unité. Les dirigeants du parti de la gauche radicale allemande, Die Linke, sont parvenus à apaiser leurs troupes, réunies en congrès à Berlin samedi 20 et dimanche 21 juin pour adopter leur programme électoral.
Depuis plusieurs semaines, ce parti, qui a obtenu un résultat décevant aux élections européennes du 7 juin, était en proie à des querelles internes : départs fracassants de personnalités, luttes entre les courants pragmatiques et fondamentalistes, critique croissante à l’encontre de leur chef Oskar Lafontaine, ancien patron des sociaux-démocrates (SPD).
Deux ans après la fusion entre le WASG, qui regroupait des syndicalistes déçus du SPD et altermondialistes, et du PDS, héritier de l’ancien Parti communiste est-allemand, la gauche radicale n’est pas au mieux de sa forme pour se lancer dans la bataille des élections législatives du 27 septembre.
« C’est en nous battant côte à côte que nous pourrons réussir », a lancé M. Lafontaine aux 562 délégués réunis. Gregor Gysi, chef du groupe parlementaire Die Linke au Bundestag et ancien dirigeant du PDS, a été plus direct : « Je voudrais que nous touchions les électeurs, et non pas que nous nous occupions de nous. » Son appel a été accueilli par un tonnerre d’applaudissements.
CONFLITS INTERNES
Le patron de la gauche radicale, qui espère être élu ministre président de la Sarre après les régionales du 30 août, a préféré jouer la carte du consensus. Il a énoncé les thèmes habituels du parti, « contre le montant actuel des indemnités de chômage longue durée, contre la retraite à 67 ans », les entrecoupant de messages électoraux - « les profiteurs du capitalisme doivent payer pour la crise » - et d’attaques à l’encontre de tous les partis.
De nombreux élus, notamment de l’est de Allemagne, où Die Linke réalise souvent de très bons scores, réclament davantage de réalisme pour ne pas barrer la route à d’éventuelles coalitions avec le SPD. A l’image d’Angelika Gramkow, maire de la ville de Schwerin, en ex-RDA : « Le pragmatisme n’est pas toujours apprécié dans certains courants de notre parti », a-t-elle déploré. A l’opposé, d’autres courants tels que la plateforme communiste dirigée par la députée européenne Sahra Wagenknecht, refusent de faire le moindre compromis, quitte à rester un parti d’opposition.
Ces conflits internes ont porté préjudice à Die Linke lors des européennes. Le parti avait espéré au moins 10 % des voix, il n’a recueilli que 7,5 % des suffrages. De plus, il doit constater que la récession n’alimente pas forcément son discours. « Il nous faut être concrets, et pas seulement se contenter de condamner le capitalisme, surtout quand on sait que la majorité de la population n’a pas une attitude anticapitaliste », explique Klaus Ernst, vice-président du parti et ancien membre fondateur du WASG.
Depuis plusieurs mois, Die Linke stagne, baisse dans les sondages. Elle est créditée de 8 % à 11 % des intentions de vote alors qu’il y a un an, les enquêtes d’opinion lui attribuaient jusqu’à 15 % des voix. Pour le 27 septembre, le parti table sur 10 % et plus.
Pour mieux faire entendre sa voix, Die Linke a adopté un programme électoral qui radicalise son discours. Parmi les propositions : un salaire horaire minimum de 10 euros (alors qu’elle n’évoquait que 8 euros en 2008), une indemnité de chômage longue durée qui atteigne 500 euros, un impôt sur les millionnaires et un plan d’investissements de 100 milliards d’euros pour l’éducation, le climat, les transports et la santé. Le parti souhaite également créer de nouvelles formes de protestation politique, et modifier la législation de manière à permettre l’organisation de grèves générales sur le modèle de la France.