Le président sud-coréen Lee Myung-bak a suscité une nouvelle polémique en jouant du pardon pour « relancer l’économie ». Mardi 12 août, la Maison Bleue (présidence sud-coréenne) a dévoilé la liste des personnes qui seront amnistiées le 15 août, jour anniversaire de la libération (en 1945) qui s’accompagne traditionnellement d’une grâce présidentielle.
Parmi les 341 864 bénéficiaires figurent des fonctionnaires, des politiciens et des dirigeants de petites et moyennes entreprises. Sont aussi concernés des grands patrons de chaebols (les conglomérats locaux) comme Chung Mong-koo, PDG du constructeur automobile Hyundai, condamné pour corruption et Chey Tae-won, ancien responsable du géant du pétrole SK Energy, reconnu coupable de manipulations comptables et trafics d’actions. Kim Seung-youn, ex-président du groupe pétrochimique Hanwha, condamné pour enlèvement et violences sur des employés de bar, bénéficie également du pardon présidentiel.
La décision du chef de l’Etat répond à un courrier des principales organisations patronales. Elles demandaient l’amnistie de 106 dirigeants, un geste à leurs yeux indispensable pour restaurer le moral des milieux d’affaires. Pour justifier l’amnistie, le porte-parole de la présidence, Lee Dong-kwan, a souligné la nécessité de « favoriser l’unité nationale » et de « résoudre les questions prioritaires de relance de l’économie et de création d’emplois ». « Le président espère que ce pardon accordé aux grands patrons servira à dynamiser les investissements », a-t-il précisé. Le produit intérieur brut sud-coréen n’a progressé que de 4,8 % sur un an au deuxième trimestre, contre 5,8 % entre janvier et mars. La consommation, minée par les inquiétudes des ménages dans un contexte d’inflation élevée, a reculé de 0,1 %, une première baisse depuis 2003.
Les milieux d’affaires ont aussitôt salué la décision du président. La puissante Fédération des industries coréennes a même promis de contribuer à l’amélioration de l’économie en multipliant investissements et créations d’emplois.
Mais les critiques fusent. « Cette amnistie va renforcer le sentiment selon lequel les riches s’en tirent toujours quoi qu’ils fassent », a estimé dans un communiqué le Parti démocrate, principale formation d’opposition. Kim Yoo-joung, sa porte-parole, craint une « perte de confiance dans la justice ». L’opposition accuse le président Lee, proche des milieux d’affaires, d’abuser de son autorité à des fins politiques. Au sein même du Grand Parti national (le GPN au pouvoir), la grâce ne fait pas l’unanimité. Son Kwang-ho, membre du conseil suprême du GPN, reproche un « manque de considération des sentiments de la population » et rappelle qu’« être favorable aux milieux d’affaires ne signifie pas soutenir des entrepreneurs ayant enfreint la loi ».
La polémique s’ajoute aux soucis rencontrés par le chef de l’Etat depuis son arrivée au pouvoir en février. Outre les manifestations contre la décision d’autoriser les importations de boeuf américain, il fait face à des affaires de corruption, l’une impliquant Kim Ok-hee, une cousine de son épouse.