Vivement critiqué par son voisin afghan pour sa politique de réconciliation nationale avec les talibans pakistanais, qui contribuerait à la multiplication des attentats en Afghanistan, le premier ministre pakistanais, Yousouf Raza Gilani, a écarté, le 8 juillet, les accusations de laxisme. « Le Pakistan a souffert plus que tout autre du terrorisme et le combattra avec une poigne de fer (...). Pourquoi déstabiliser l’Afghanistan, il est dans notre intérêt que ce pays soit stable. »
Le ministre des affaires étrangères pakistanais, Shah Mehmoud Qureshi a justifié au Monde, « cette stratégie de dialogue qui répond à nos besoins de sécurité ». Pour autant, a-t-il ajouté, « nous ne négocions pas avec les terroristes et nous ne le ferons jamais ».
Néanmoins, le nouveau gouvernement pakistanais, en fonction depuis la fin mars, doit déjà faire face à un bilan contrasté de cette stratégie du dialogue destinée à restaurer la paix civile. Le cessez-le-feu, signé, en avril, avec Baitullah Mehsud, chef du Mouvement des talibans pakistanais, installé dans le Sud-Waziristan, face aux provinces afghanes de Khost et du Paktika, a été rompu le 29 juin.
Cette décision a fait suite à l’annonce, par le gouvernement, d’envoyer de nouveau l’armée pakistanaise dans la région comprise entre Peshawar et le passage frontalier de Khyber, au nord-ouest du pays, dans la zone tribale qu’elle avait désertée. Face à la détérioration de la situation et aux pressions des Etats-Unis, qui ne cachent pas leur inquiétude face aux conséquences de cette réconciliation, Islamabad ne pouvait rester sans réaction. Attaques de convois de l’OTAN sur la voie menant à l’Afghanistan, kidnappings, menaces sur la ville de Peshawar qui compte deux millions d’habitants, la pression était trop forte.
Le chef des insurgés locaux, Mangal Bagh, a assuré qu’il n’était pas membre du Mouvement des talibans pakistanais et qu’il agissait pour son propre compte. Mercredi 9 juillet, les autorités de la région de Khyber ont indiqué que la paix était revenue au terme d’un nouvel accord avec les chefs tribaux qui s’étaient engagés à restaurer l’ordre. « Nous ne négocions qu’avec les chefs des tribus », a insisté le ministre des affaires étrangères pakistanais.
Mais cette stratégie connaît des ratés. Non loin de Peshawar, dans la vallée de Swat, les autorités pakistanaises s’inquiètent des suites de l’accord de paix signé le 21 mai avec les combattants islamistes. Le 26 juin, des activistes locaux ont saccagé et brûlé le seul hôtel de la station de ski de cette ancienne destination touristique. Les talibans ont démenti toute implication mais deux jours plus tôt, ils brûlaient cinq écoles de filles dans la vallée et la même semaine, des hommes armés prenaient le contrôle d’une école primaire de Mingora, principale ville de la vallée de Swat. « Nous ne contrôlons plus la région, les activistes font la loi là-bas », a assuré, à Reuters, le chef de la police locale.
La recherche par Islamabad d’appui auprès des chefs tribaux dans les zones tribales n’est pas sans risque pour leurs nouveaux alliés. Fin juin, dans le Sud-Waziristan, une vingtaine de fidèles du chef Bitani, qui soutient le gouvernement Gilani, ont été tués par les partisans de Baitullah Mehsud.