L’Union européenne s’apprête à renforcer ce lundi 15 octobre les sanctions économiques à l’égard du régime militaire birman, par une interdiction d’importations touchant le bois, les pierres précieuses et les métaux. Le gaz, en revanche, serait exclu des nouvelles dispositions. Les seuls revenus du projet Yadana, dont le principal opérateur est Total, ont pourtant rapporté à la junte birmane 350 millions d’euros en 2006 selon l’aveu même du directeur général du groupe pétrolier. Christophe de Margerie admet par ailleurs dans un entretien accordé au Monde le 6 octobre 2007 que « Total, pas plus que d’autres compagnies, ne peut demander au gouvernement ce qu’il fait de cet argent. » Un autre argument évoqué dans cet entretien est que « l’opposition birmane n’a pas demandé le retrait de Total lorsqu’elle a été reçue par M. Sarkozy » le mercredi 26 septembre. C’est désormais chose faite. Le gouvernement birman en exil (NCGUB) mentionne dans une lettre adressée le 10 octobre
au président de la République française et à son ministre des Affaires étrangères sa volonté de voir « gelées ou abandonnées toutes les activités liées au gaz » [1].
Si Total n’a pas à interférer dans l’affectation des revenus du gaz par la junte, la communauté internationale peut elle décider de les contrôler. Cette possibilité est d’ailleurs prévue par la Charte de l’ONU : il s’agit du versement sur un compte séquestre des revenus d’exportation, en l’occurrence du gaz. Ces fonds seraient désormais gérés par les parties en conflit et la communauté internationale. Cette initiative présente des avantages considérables : elle oblige à la négociation, ce que la junte a toujours refusé depuis près d’une vingtaine d’années. En outre, elle ne lèse ni le client thaïlandais EGAT qui continuera à bénéficier des approvisionnements énergétiques birmans, ni la population birmane qui aura enfin quelques retombées positives de l’exploitation de ces ressources.
Dernier avantage, ceux qui s’opposent pour diverses raisons à une politique de sanctions envers le régime birman seront certains de ne pas léser la population.
Christophe de Margerie sera auditionné le mardi 16 octobre par la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale sur la stratégie du groupe Total en Birmanie. Il serait souhaitable qu’à cette occasion le directeur général du groupe pétrolier puisse s’exprimer sur les deux perspectives (compte séquestre et/ou retrait) qui s’offrent à son projet birman.