La décision de la Chambre des députés et du Sénat de rejeter le décret présidentiel relatif à l’augmentation de l’impôt sur les opérations financières (IOF) a montré un revirement complet du Congrès vers une rupture frontale avec le gouvernement. Il l’a fait en rejetant une mesure timide, indiquant qu’il n’accepte aucune taxation ou impôt sur les secteurs les plus riches de la société. Dominé par le Centrão et l’extrême droite, le Congrès révèle dans ce litige sa nature : une institution nourrie par le clientélisme, agent direct des intérêts de la bourgeoisie, qui est menée par le système du rentier et l’agro-industrie.
Dans ces conditions, les présidents de la Chambre et du Sénat ont œuvré pour imposer cette défaite au gouvernement. Dans le même temps, ils ont montré qu’il existe une tendance de ces secteurs politiques à s’orienter vers une ligne plus conservatrice d’opposition au gouvernement Lula, même si beaucoup de ces secteurs font partie du gouvernement.
Cette dynamique indique qu’un secteur prépare l’actuel gouverneur de São Paulo, Tarcísio de Freitas (Républicains), comme candidat privilégié de la bourgeoisie, avec le soutien des banques, des grands propriétaires terriens et des structures prédatrices telles que les grandes sociétés financières et minières – la collusion des banques, des milliardaires, des prédateurs du Bois, des BigTechs et des Bets [plate-formes de paris en ligne ndt]. C’est une option qui voit d’un bon œil le plan Milei – un néolibéralisme plus pur, sans la moindre concession, sans discours de conciliation, mais avec une confrontation plus directe contre les intérêts populaires et les droits du peuple.
Ce qui n’est pas encore résolu, c’est le poids du bolsonarisme dans cette coalition. On note toutefois une volonté de réduire ce poids, même si Bolsonaro s’efforce encore de faire partie de cette alliance, lui donnant un aspect plus réactionnaire, même si, en soi, la candidature de Tarcísio reflète déjà les intérêts les plus réactionnaires de la société brésilienne.
Cette voie est pavée par la chute de popularité de Lula et l’affaiblissement du « bolsonarisme dur » : l’arrestation et la fuite de Zambelli, la tenue d’un rassemblement très faible – le plus faible depuis de nombreuses années – dimanche dernier sur l’avenue Paulista. Cela explique ce qui s’est passé ces derniers jours au Congrès. Une nouvelle conjoncture politique s’ouvre et il faut y réagir, en commençant par l’appel à la rue le 10 juillet.
La politique du gouvernement
La nouveauté de la situation est que, pour la première fois, le gouvernement Lula commence à opter pour une confrontation avec l’orientation du Congrès, sous la pression du Centrão. Au cours des deux dernières années et demie, le gouvernement a tenu une ligne de collaboration avec le Congrès, de partenariat, de concessions, sans mener aucune lutte politique contre ceux qui le dominent. Lula a déjà perdu une occasion en « laissant mijoter » la confrontation avec le bolsonarisme après le 8 janvier, en ne menant pas une lutte conséquente autour sur la ligne « pas d’amnistie ». Et, tragiquement, une partie importante des partisans du gouvernement a voté pour l’augmentation du nombre de parlementaires aux côtés de la droite conservatrice.
Aujourd’hui, cette ligne semble remise en question, notamment avec l’orientation prise par Guilherme Boulos – une réorientation qui vient manifestement du cœur du gouvernement – qui appelle à une manifestation contre le Congrès le 10 juillet. Sur les réseaux sociaux, une vaste campagne est engagée, impliquantant aussi la direction du PT. Il est important de dénoncer le Congrès comme une institution corrompue et parasitaire, ainsi que de désigner les banques et les grands milliardaires comme responsables de « l’ajustement » budgétaire et des inégalités criantes qui marquent le Brésil en 2025.
D’autre part, on ne peut accepter que l’ajustement soit payé par les plus pauvres, comme c’est le cas avec le BPC, les attaques contre l’éducation, la hausse des taux d’intérêt et plus généralement les mesures fiscales promues par l’équipe qui est en charge de l’économie.
La gauche socialiste doit intervenir dans cette nouvelle situation politique en prenant pour axe la lutte contre le Congrès, en dénonçant sa nature et en défendant un programme d’agitation qui frappe fort les super-riches et bataille pour imposer dans les rues un rapport de forces qui pourrait commencer à peser dans les manifestations du 10 juillet.
Un Congrès ennemi du peuple travailleur
Notre prochaine tâche centrale sera donc de mobiliser pour faire du 10 juillet un événement marquant contre le Congrès ennemi du peuple. Nous mettrons en lumière ce que ce Congrès a fait en tant qu’agent de la bourgeoisie, comme dans le cas de la tentative d’augmenter le nombre de député.e.s. Cela montre qu’il s’agit d’un Congrès qui cherche simplement à maintenir les privilèges et à défendre les riches.
Sans même parler des avantages et des privilèges liés aux salaires élevés, alors que la majorité de la population gagne le salaire minimum, se voit confisquer sa retraite et souffre de la hausse des prix des denrées alimentaires. Un Congrès qui s’est accaparé une partie du budget public, par le biais des amendements scandaleux que le PSOL a dénoncés à juste titre et qui sont basés sur les distorsions les plus diverses de la volonté populaire. Une caste qui vit aux dépens de la majorité du peuple et qui se soucie surtout de renouveler sans cesse ses propres mandats et de servir les riches dans tous les domaines.
Dans le même temps, nous appelons le gouvernement à être cohérent dans sa lutte contre le Centrão. Lula devrait rompre ses accords avec ceux qui l’ont poignardé dans le dos et continueront de le faire : faire appel à une chaîne de télévision nationale pour dire les choses telles qu’elles sont, limoger les ministres nommés par le Centrão, défendre un programme de mesures telles que la taxation des grandes fortunes, appliquer les promesses sur l’exonération de l’impôt sur le revenu et faire en sorte que la bataille contre l’échelle 6×1 soit réellement efficace.
Notre programme
Nous allons nous mobiliser dans les rues et sur les réseaux sociaux avec un programme simple mais direct, en nous rangeant aux côtés du peuple dans cette bataille. Un programme qui taxe les plus riches, fait pression pour la réduction des taux d’intérêt, réalise un audit de la dette publique et montre à la société qui sont les bénéficiaires de la hausse des taux d’intérêt et de la dette publique. Qui impose les dividendes et les bénéfices. Aux États-Unis, le taux est de 40 % sur les dividendes et les bénéfices. Ici, il n’existe pas de telle taxation, ni sur les grandes fortunes. Exiger du gouvernement des projets clairs et qu’il discute avec la société de leur nécessité pour qu’il y ait effectivement une redistribution des revenus.
Dans le même temps, notre position en tant que regroupement indépendant doit être de continuer à mobiliser contre les mesures d’ajustement mises en œuvre par le gouvernement lui-même, malheureusement contre les intérêts populaires, comme l’élaboration du cadre fiscal proposé par le gouvernement fédéral et approuvé par le Congrès, avec pour unique exception le vote en opposition du PSOL. Ce cadre fiscal a pour conséquence des tentatives constantes de réduction du plafond constitutionnel des investissements dans l’éducation et la santé et des pressions de la bourgeoisie pour réduire les prestations sociales, le programme Bolsa Família, etc. Des pressions qui, dans le cas du Bénéfice des Prestations continues (BPC), ont conduit le gouvernement à proposer et à mettre en œuvre des réductions importantes. Cela ne peut pas continuer. Il faut affronter la bourgeoisie, et le gouvernement ne peut pas s’attaquer à la classe ouvrière s’il veut vraiment s’en prendre à celle-ci.
Il faut également mettre en place une politique de contrôle des prix des denrées alimentaires, qui sont l’autre contrainte qui pèse lourdement sur le portefeuille des travailleurs.
Un changement de cap effectif est nécessaire. Une confrontation avec le Congrès signifie des mesures claires en faveur des intérêts du peuple. Avec la fin du cadre fiscal et l’abandon des propositions de coupes dans l’éducation et les prestations sociales, telles que celles présentées dans la mp 1303/25 et le décret 12534/25.
Il nous faut continuer à suivre de près cette situation pour savoir si le gouvernement poursuivra dans la voie de la lutte, s’il sera vraiment cohérent ou s’il optera pour la conciliation comme il l’a fait jusqu’à présent. Quelles que soient les prochaines mesures prises par le gouvernement, il faut une politique qui affirme la nécessité de cette confrontation et qui soit à l’avant-garde du processus de mobilisation.
Nous serons aux côtés du PSOL avec un bloc indépendant lors de la manifestation du 10, tout en restant bien sûr à l’avant-garde de la défense des intérêts populaires, raison pour laquelle nous soutenons également le Manifeste pour la défense de l’éducation, signé par un certain nombre d’acteurs et d’acrctrices du monde de l’éducation, parmi lesquels le président de l’Andes, et des structures qui y sont influentes, comme des secteurs du SEPE de Rio de Janeiro, de l’APEOESP, de l’Andes et du mouvement syndical en défense de l’éducation, contre les coupes budgétaires et contre l’ajustement.
Secrétariat national du MES
30 juin 2025
Europe Solidaire Sans Frontières


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