Des camions transportant des maisons mobiles sont alignés du côté égyptien du poste-frontière de Rafah avec la bande de Gaza le 13 février 2025. Israël a déclaré le 14 février que les engins lourds nécessaires pour nettoyer les débris de guerre et les bulldozers alignés au poste-frontière de Rafah entre l’Égypte et Gaza ne seraient pas autorisés à passer par Rafah. (Photo AFP)
Israël conditionne la deuxième phase de l’accord au désarmement du Hamas et à son éloignement de la bande de Gaza
Dans un développement récent, Israël a conditionné le passage à la deuxième phase de l’accord à des exigences que le Hamas considère comme inacceptables, notamment le désarmement de la résistance et l’éloignement du Hamas de la bande de Gaza. Le mouvement a affirmé que ces demandes relèvent de la « guerre psychologique absurde », insistant sur le fait que la résistance ne quittera pas Gaza et que son désarmement est hors de question. Il a également souligné que toute disposition concernant l’avenir de la bande de Gaza doit être décidée uniquement par un consensus palestinien, sans ingérence extérieure.
Par ailleurs, des responsables du gouvernement de Benjamín Netanyahou ont déclaré qu’il existe de profondes divergences entre les deux parties et que parvenir à la deuxième phase de l’accord semble quasiment impossible. Ces responsables ont précisé qu’Israël ne fera aucune concession sur ses demandes et que la seule option envisageable est la prolongation de la première phase (A) de l’accord, en intégrant davantage d’otages israéliens dans la liste humanitaire.
Dans le même contexte, une délégation israélienne de négociation est partie aujourd’hui pour Le Caire afin de discuter des détails de la première phase du cessez-le-feu. Un responsable israélien a révélé que les négociations porteront sur l’introduction de maisons mobiles dans la bande de Gaza, précisant que l’occupation est prête à faire entrer 300 unités résidentielles à ce stade. Toutefois, ce nombre reste largement insuffisant pour répondre aux besoins d’un seul camp de réfugiés, parmi les nombreux camps dispersés à travers le territoire, où des centaines de milliers de déplacés ont trouvé refuge après la destruction de leurs maisons.
Situation humanitaire catastrophique : Gaza sous le poids de la guerre, du froid et de la faim
La souffrance des habitants de Gaza se poursuit dans un contexte de crise humanitaire catastrophique. Avec les destructions massives des infrastructures et l’effondrement des services essentiels, la vie devient de plus en plus difficile pour des centaines de milliers de citoyens.
Dans ce cadre, de grandes quantités de carburant ont été acheminées vers la centrale électrique située au centre de la bande de Gaza, permettant à la compagnie d’électricité de commencer la réparation de certaines lignes qui n’ont pas été complètement détruites. Cependant, l’ampleur des dégâts sur le réseau électrique est immense, rendant le rétablissement de l’électricité dans les foyers un travail de longue haleine qui pourrait prendre des années.
Simultanément, une puissante dépression météorologique a frappé Gaza dans la nuit d’hier, aggravant davantage les souffrances des habitants, en particulier ceux qui vivent dans des camps de déplacés et des tentes de fortune. Les fortes pluies et vents violents ont inondé ces abris précaires, transformant le sol en marécage de boue, rendant la vie insupportable, aggravée par le froid glacial et l’absence totale de moyens de chauffage.

Face à cette catastrophe, la colère des citoyens est montée d’un cran, notamment parmi ceux qui sont retournés dans leurs quartiers dévastés du nord et du sud de la bande de Gaza. Ils n’ont trouvé que des ruines, confrontés à une réalité encore plus cruelle : aucun abri, pas d’eau potable, et des rues toujours bloquées par les décombres qui rendent les déplacements extrêmement pénibles.
Avec l’accumulation des crises, la détresse des habitants ne cesse de croître. Les fortes pluies et le froid mordant ont contribué à une dégradation rapide des conditions sanitaires, provoquant la propagation de maladies dans un environnement privé des besoins les plus élémentaires pour la survie.
Extraction des corps sous les décombres après des mois de bombardements
La tragédie humanitaire ne cesse de s’aggraver avec la découverte continuelle de corps sous les ruines depuis plusieurs mois, conséquence des bombardements israéliens qui ont détruit les équipements de la défense civile dédiés au déblaiement des gravats.
Les familles endeuillées vivent toujours sous le choc, plongées dans une souffrance incommensurable, entourées de scènes de désolation et de destruction. Beaucoup subissent de graves traumatismes psychologiques, incapables de retrouver et d’inhumer dignement leurs proches laissés sous les décombres de leurs maisons détruites.

Après d’intenses efforts diplomatiques, l’entrée de deux bulldozers égyptiens spécialisés dans l’évacuation des débris et l’aménagement des routes a finalement été autorisée. Ces engins entameront leurs opérations dans le nord de la bande de Gaza, visant à dégager les ruines et récupérer les corps encore ensevelis sous les bâtiments détruits.
Cette avancée, bien que tardive, constitue un soulagement partiel pour les habitants qui espèrent enfin offrir à leurs proches un enterrement digne. Cependant, les besoins en équipements restent énormes, alors que les souffrances des familles continuent de croître jour après jour.
Poursuite des violations israéliennes et obstruction à l’entrée de l’aide humanitaire
Malgré l’accord de cessez-le-feu, l’armée israélienne a continué de violer ses propres engagements à plusieurs reprises cette semaine, entraînant la mort de plusieurs civils et les blessures d’autres dans différentes zones de la bande de Gaza. Ces violations répétées suscitent des inquiétudes croissantes quant à un possible effondrement de l’accord, d’autant plus qu’Israël maintient une position rigide, poursuivant ses attaques ciblées sur certaines zones.
Par ailleurs, Israël continue d’entraver l’évacuation des patients et des blessés nécessitant des soins médicaux à l’étranger. Les autorités israéliennes ont reporté le départ de dizaines de malades et de leurs accompagnateurs, ce qui a aggravé leur état de santé et mis leur vie en danger.

Cette obstruction ne se limite pas aux patients : le passage de Kerem Shalom a également été soumis à des restrictions strictes sur l’acheminement de l’aide humanitaire. Israël n’a permis l’entrée que de 180 camions sur les 600 convenus, soit à peine 30 % du volume attendu au cours des deux derniers jours, selon le bureau des médias gouvernemental de Gaza. Cette réduction drastique des approvisionnements a exacerbé la crise alimentaire et la pénurie des biens essentiels, rendant la situation encore plus insoutenable pour les habitants de la bande de Gaza.
Le bilan de l’agression israélienne s’alourdit alors que le blocus et les crimes se poursuivent : depuis le 7 octobre 2023, 48 271 morts et 111 693 blessés, faisant de cette attaque l’une des plus meurtrières contre des civils dans l’histoire contemporaine. Ces chiffres accablants illustrent l’ampleur de la tragédie que vivent les Palestiniens de Gaza, confrontés à une guerre d’extermination systématique dont le but est d’anéantir toute forme de vie dans le territoire assiégé.
Israël a transformé la bande de Gaza en la plus grande prison à ciel ouvert au monde, soumettant ses habitants à un blocus implacable depuis 18 ans. Cette situation a engendré une détérioration sans précédent des conditions humanitaires, plongeant près de deux millions de déplacés – sur une population totale de 2,4 millions d’habitants – dans des conditions catastrophiques, avec un manque délibéré de nourriture, d’eau et de médicaments. Malgré les appels internationaux incessants, Israël continue de pratiquer une politique de famine et de privation à l’égard des civils, perpétuant ainsi des crimes d’une ampleur inouïe contre une population sans défense.
Alors que les efforts diplomatiques se poursuivent pour tenter d’aboutir à un accord global qui soulagerait les souffrances des habitants de Gaza, l’intransigeance d’Israël bloque toute avancée significative. Entre bombardements, siège et déplacements forcés, Gaza demeure une plaie ouverte au cœur du monde, où ses habitants endurent une guerre impitoyable sous le regard passif de la communauté internationale.
Abu Amir, le 20 février 2025
(Voir aussi les chroniques et articles postés par Brigitte Challande du Collectif Gaza Urgence déplacé.e.s quotidiennes sur le site d’ISM France et du Poing, article hebdomadaire sur le site d’Altermidi, et sur l’Instagram du comité Palestine des étudiants de Montpellier..)
Contribuer à la collecte Urgence guerre à Gaza
• UJFP. 20 février 2025 :
https://ujfp.org/temoignage-dabu-amir-le-20-fevrier-2025-quen-est-il-de-la-deuxieme-phase-de-laccord-a-gaza/
Le secteur agricole : entre destruction et famine délibérée

Serres détruites par l’armée d’occupation à Gaza.
Une guerre d’anéantissement ciblant l’agriculture
Au cours de son agression continue contre la bande de Gaza pour le quinzième mois consécutif, Israël a détruit plus de 75 % des terres agricoles de Gaza, selon les rapports de terrain et les statistiques du ministère de l’Agriculture. Dès les premiers instants de l’assaut, les forces israéliennes ont systématiquement détruit les terres agricoles au bulldozer et ciblé les infrastructures agricoles, en particulier dans les zones frontalières, qui constituent la principale source de nourriture de la population de Gaza.
Le secteur agricole est un pilier vital de l’économie de Gaza, contribuant à hauteur de 11 % au produit intérieur brut (PIB), selon le Bureau central palestinien des statistiques. Les exportations agricoles représentent 55 % des exportations totales de Gaza, soit 32,8 millions de dollars par an. Les principaux produits agricoles comprennent les légumes et l’horticulture, les tomates représentant 33,1 % du total des exportations agricoles, suivies de près par les concombres avec 33 %. Ces chiffres mettent en évidence le rôle crucial du secteur, non seulement dans la fourniture de nourriture, mais également dans la création d’emplois et dans le soutien du cycle économique palestinien.
Nord de Gaza et Khan Younis : zones agricoles sinistrées
Les zones du nord de Gaza ont été les plus touchées, puisqu’elles représentent 33 % de la superficie totale cultivée en légumes et en grandes cultures, et fournissent 30 % des besoins alimentaires de Gaza. Dans le même temps, Khan Younis a subi d’importantes destructions, avec plus de 90 % de ses terres agricoles endommagées, ce qui a entraîné l’effondrement de la production alimentaire dans la région.
Les régions du nord et du centre de Gaza ont une importance stratégique pour l’agriculture, représentant 63 % de la superficie totale des terres agricoles et fournissant auparavant de la nourriture à plus de 2,3 millions de Palestiniens.
Cependant, les destructions ne se sont pas limitées aux terres agricoles ; les arbres fruitiers ont également été délibérément ciblés, en particulier les oliviers, qui constituent 60 % des vergers de Gaza. Les statistiques indiquent que 31,3 % de ces arbres se trouvaient à Khan Younis, tandis que 22,3 % se trouvaient dans le nord de Gaza, ce qui souligne que l’attaque israélienne n’était pas seulement militaire mais une attaque économique intentionnelle contre les bases agricoles de Gaza.
Des millions de dollars de pertes quotidiennes et une destruction systématique des infrastructures
Selon le ministère de l’Agriculture, les pertes quotidiennes de production agricole dues à la guerre sont estimées à 2 millions de dollars. Ces pertes vont au-delà des dégâts aux cultures pour inclure la destruction des installations de stockage, des équipements agricoles, le bulldozer des terres agricoles et l’interdiction pour les agriculteurs d’accéder à leurs terres. Si l’on prend en compte la destruction des infrastructures agricoles, les pertes totales pourraient dépasser un quart de milliard de dollars. Ces chiffres continuent d’augmenter.
Secteur de la pêche : ciblage systématique et destruction totale
L’industrie de la pêche à Gaza n’a pas été épargnée, bien qu’elle soit un moyen de subsistance essentiel pour plus de 4 054 pêcheurs, dont près de la moitié réside dans le nord de la bande de Gaza. Avant la guerre, la production annuelle de poisson de Gaza était d’environ 4 600 tonnes, mais elle s’est complètement arrêtée en raison de l’attaque.
Les rapports de terrain confirment que 98 % du secteur de la pêche dans la ville de Gaza a été détruit, y compris le port maritime de Gaza et plus de 900 bateaux. En outre, 70 % des bateaux de pêche et des infrastructures de Rafah et Deir al-Balah ont également été anéantis. Le blocus naval imposé par Israël a rendu impossible l’accès des pêcheurs à la mer, ce qui a conduit à l’effondrement total de cette industrie vitale.
L’élevage à Gaza : un secteur au bord de l’extinction
Le secteur de l’élevage a subi des pertes dévastatrices, conduisant à sa destruction quasi totale. La guerre a anéanti l’industrie de la volaille, soit par des bombardements directs, soit en raison de la pénurie d’aliments pour animaux, privant Gaza de sa capacité à assurer son autosuffisance en viande de volaille et en œufs.
Avant la guerre, Khan Younis représentait 26 % de la production de volaille de Gaza, tandis que le nord de Gaza en contribuait à hauteur de 25 % au total. Le secteur de l’élevage a également subi d’énormes pertes en bovins, ovins et caprins, qui étaient la principale source de viande rouge dans la région. On estime que le Nord de Gaza abritait auparavant 44 % de la population totale de chèvres de Gaza, 48 % de son bétail et 42 % de ses ruches, ce qui souligne l’ampleur des destructions infligées au secteur de l’élevage de Gaza.
La famine comme arme de guerre : un crime contre l’humanité
Dès le début de l’assaut, Israël a imposé un siège complet à Gaza, coupant la nourriture, l’eau, l’électricité et le carburant, en violation flagrante du droit international humanitaire. Avant la guerre, les terres agricoles du nord et du centre de Gaza produisaient 60 000 tonnes de légumes et de cultures de plein champ, mais les forces israéliennes empêchaient les agriculteurs d’accéder à leurs terres, privant les habitants de denrées alimentaires essentielles.
Cette stratégie utilise délibérément la famine comme arme, ce qui constitue une violation flagrante de l’article 54 du Protocole additionnel des Conventions de Genève de 1949, qui interdit explicitement la famine comme méthode de guerre.
Malgré les interdictions claires du droit international, Israël agit au-dessus de toute responsabilité, encouragé par le silence mondial. Dans une déclaration choquante et sans précédent, le ministre israélien de la Guerre a annoncé publiquement la coupure de la nourriture, de l’eau et de l’électricité à Gaza – une forme inouïe de punition collective qui vise à soumettre et à affamer des millions de Palestiniens, dont la moitié sont des enfants.
Les agriculteurs de Gaza : la résilience au milieu des ruines
Malgré des destructions inimaginables, le secteur agricole de Gaza conserve le potentiel d’une reprise rapide – à condition qu’un soutien immédiat soit disponible. Les agriculteurs palestiniens, qui ont enduré plus de 16 ans de siège, ont prouvé leur résilience face aux guerres, aux crises et à l’étranglement économique. Même au milieu de la guerre en cours, de nombreux habitants de Gaza se sont tournés vers la culture des terres dans la partie occidentale de la bande de Gaza, s’efforçant d’assurer un niveau minimal de sécurité alimentaire.
La relance du secteur agricole nécessite un soutien urgent aux agriculteurs, notamment la fourniture de semences, d’équipements agricoles et la restauration des infrastructures détruites, ainsi que la promotion de méthodes agricoles durables. Une attention particulière doit être accordée aux projets agricoles à petite échelle, qui ont historiquement servi de bouée de sauvetage en temps de crise et de conflit.
Le secteur agricole de Gaza n’est pas seulement une source de nourriture, c’est un fondement de résilience et de survie. Malgré les efforts systématiques d’Israël pour l’éradiquer, la détermination des agriculteurs palestiniens reste inébranlable. Les terres qu’Israël a rasées à plusieurs reprises fleuriront à nouveau, comme elles l’ont toujours fait.
• UJFP. 19 février 2025 :
https://ujfp.org/analyse-dabu-amir-le-19-fevrier-le-secteur-agricole-entre-destruction-et-famine-deliberee/