Le 18 septembre, Brice Hortefeux, le ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Codéveloppement - bref le commissaire de Sarkozy aux rafles - présente son projet de loi à l’Assemblée nationale. Le collectif Uni(e)s contre une immigration jetable (Ucij) appelle à se rassembler devant, place Édouard Herriot, le même soir à partir de 18 heures [1].
C’est une première échéance importante, puisque ce projet est examiné selon la procédure d’urgence - « l’identité nationale » n’attend pas ! Un débat à l’Assemblée nationale, un autre au Sénat fin septembre, pas de navette parlementaire. Si les deux Chambres ne s’entendent pas sur la même version de la loi, le gouvernement mettra en place une commission de conciliation, et le vote définitif et sans débat aura lieu début octobre.
Le projet Hortefeux n’est pas un simple dispositif de plus contre les sans-papiers. Il revendique explicitement la volonté de réduire drastiquement l’immigration familiale, désignée comme « subie » et nuisible, au profit d’une immigration professionnelle « choisie », qui doit désormais représenter 50 % des entrées en France, au lieu de 7 % actuellement. Dans l’exposé des motifs, l’immigration familiale est artificiellement opposée à l’immigration économique, comme si les familles immigrées étaient constituées d’assistés, de parasites, sans aucune intention de travailler. Le regroupement familial n’a-t-il pas été désigné par les discours de droite comme l’origine des révoltes des quartiers populaires en décembre 2005 ?
Les dispositions du projet Hortefeux n’ont nullement pour but de faciliter « l’intégration » - concept en soi fort contestable - des familles immigrées, mais uniquement d’ériger des obstacles insurmontables : ressources exigées supérieures à 1,2 Smic selon la taille de la famille, connaissance préalable de la langue de Molière et des « valeurs de la République » - allez savoir ce que cela veut dire dans la bouche d’Hortefeux - pour le conjoint et les enfants de plus de 16 ans avant même d’avoir foulé le sol français. Tout le monde sait pourtant qu’une langue ne s’apprend bien que par immersion, et que l’insertion dans une société suppose qu’on s’y trouve déjà. Mais le seul but de ces nouvelles conditions est de décourager les migrants indésirables [2].
Certes, l’utilitarisme migratoire était déjà au centre de la loi Sarkozy adoptée en 2006. À croire qu’on n’en fera jamais assez contre les invasions barbares qui menaceraient l’identité nationale. Les conséquences les plus certaines des dispositions proposées par Hortefeux seront de légitimer la xénophobie - indispensable au gouvernement dans la perspective d’une séduction renouvelée de l’électorat lepéniste aux municipales - et d’augmenter le nombre de sans-papiers.
Pas de doute que la Chambre bleu horizon approuvera le dispositif Hortefeux. La mobilisation n’est pas dictée par l’illusion de convaincre les députés réactionnaires. Elle vise à renforcer et à faire converger les résistances. Celle des collectifs de sans-papiers, qui cherchent la voie de leur unité. Celle des écoles, lycées et quartiers avec le Réseau éducation sans frontières (RESF). Celle des salariés sans papiers, qui mettent en cause leur surexploitation, de Buffalo Grill à Paristore. Celle des salariés de l’Ofpra, de l’Inspection du travail, des services publics, d’Air France, qui refusent d’être instrumentalisés dans la chasse aux sans-papiers. La condition du succès de cette mobilisation dépend largement d’une implication plus massive du mouvement syndical.
Après le 18 février, de nouvelles échéances se profileront. L’ouverture de la Cité de l’histoire de l’immigration, début octobre, donnera l’occasion de contester, comme les historiens démissionnaires, les conceptions gouvernementales présentant les nouveaux venus comme une menace pour « l’identité nationale ». Le collectif Uni(e)s contre une immigration jetable prépare une journée nationale de mobilisations, sans doute le 13 octobre.
Emmanuel Sieglmann
* Rouge n° 2218 du 13 septembre 2007.
Communiqué de la LCR
Ignoble !
Après Brice Hortefeux rappelant à l’ordre les préfets qui ne font pas du chiffre dans les expulsions d’immigrés, c’est au tour de Thierry Mariani, député UMP, d’enrôler les tests génétiques pour s’opposer au regroupement familial. Nonobstant le fait que cette proposition de loi est contraire à l’article 16 du Code civil, vouloir enrôler la science au service d’une politique anti-immigrée relève d’une politique digne de la colonisation.
En fait, le gouvernement Sarkozy-Fillon, s’ingénie à multiplier les obstacles pour réduire à néant le regroupement familial au profit du pillage des cerveaux et des qualifications. Après la maîtrise préalable du français, à une demande de visa, voici maintenant les tests ADN pour vérifier la légitimité de la filiation biologique, à charge bien sûr du demandeur qui devrait remettre son sort entre les mains de laboratoires américains ou européens.
La LCR dénonce ce projet de loi raciste qu’il faut absolument bloquer, appelle au rassemblement unitaire, le 18 septembre, devant l’Assemblée nationale, contre les rafles et les expulsions, et réaffirme son exigence de régularisation de tous les sans-papiers.
Le 13 septembre 2007.