Le soutien que nous pouvons apporter passe par la participation à des campagnes unitaires, de solidarité concrète, humanitaire comme on dit pour toutes ces zones géographiques où des personnes humaines tentent de survivre dans des conditions abominables. Notre soutien s’intègre au travail effectué dans le cadre du Réseau syndical international de solidarité et de luttes, que Solidaires coanime. D’ailleurs, des camarades de Solidaires, et d’autres organisations de ce Réseau syndical international de solidarité et de luttes, sont ces jours-ci à Rio pour les manifestations et rencontres organisées contre le sommet du G20. Ce n’est pas à côté du sujet : la mainmise des pseudos « grands de ce monde » sur des peuples comme celui d’Haïti est au cœur du problème.
La violence, la place prise par les gangs, sont des vrais sujets qu’il n’est pas question d’occulter. Déjà au moment de la chute du dictateur Jean-Claude Duvalier - dictateur héréditaire, couvert par bien des « démocraties », dont la France où il trouva refuge durant 25 ans, échappant ainsi au jugement pour « crimes contre l’humanité » – déjà en 1986 donc, les bandes armées s’étaient transformées en structures paramilitaires et sont devenues un acteur important de la vie sociale et un interlocuteur privilégié du pouvoir.
Certains gangs sont protégés et financés par des membres de la police et des gouvernements successifs, ce qui leur permet de contrôler actuellement plus d’un tiers du pays et des quartiers entiers de Port-au-Prince.
Mais on ne peut pas occulter la responsabilité des états colonialistes, impérialistes dans ce qu’est Haïti. Ce sera sans doute dit et redit lors de cette soirée, mais la dette illégale et illégitime payée à la France par Haïti illustre cet état de fait.
Depuis des années, Haïti est déstabilisé par une crise politique : la très récente destitution du Premier ministre en est un exemple mais un exemple parmi bien d’autres. Surtout, cette crise politique existe, certes, mais il y a aussi des crises humanitaire, socio-économique et sécuritaire. Les exigences du Fonds monétaire international, le FMI, ont très largement contribué à la situation dramatique que le peuple haïtien connait depuis maintenant des années. L’Etat haïtien contribue activement à cette politique. La pauvreté atteint un niveau qu’on a du mal à concevoir. On ne peut même pas parler de système de santé publique ou d’éducation, tellement tout cela a été détruit, toujours sous l’effet des politiques capitalistes, colonialistes, impérialistes. Derrière les termes comme « l’ajustement structurel » c’est la misère, le choléra, la violence, la mort. Le taux d’inflation dans le pays était de 33,98% en 2022 et 36,81% en 2023 ; 129,13 points sur les 5 dernières années ; ce sont les chiffres d’experts en la matière (FMI, OCDE et Banque mondiale). La conséquence de ces politiques orchestrées par les institutions financières des capitalistes c’est aussi, selon des chiffres récents, 700 000 « déplacé⸳es internes », dont on imagine les conditions de vie, de survie plutôt. 700 000 en rapport à la population haïtienne, c’est à peu près comme s’il y avait plus de 4 millions de personnes « déplacées » en France. De même les 8 000 victimes de violence dénombrées depuis le début de l’année 2024 - 8 000 morts - cela équivaut à près de 50 000 personnes à l’échelle de la France.
L’intervention de forces militaires étrangères pour « rétablir l’ordre démocratique » comme disait Biden – c’était donc avant Trump ou plus exactement entre Trump et Trump -, l’intervention de forces militaires, n’est évidemment pas une solution soutenable. Pas plus qu’en Palestine ou en Ukraine, l’occupation militaire, le colonialisme, l’impérialisme ne sont acceptables en Haïti !
Si la communauté internationale veut vraiment aider Haïti autrement que par des déclarations compassionnelles, elle doit imposer l’annulation totale et immédiate de la dette publique extérieure du pays, l’abandon des politiques économiques dites libérales, mais aussi exiger le remboursement de la dette illégale payée par Haïti à la France ainsi que la restitution des 500 mille dollars (de l’époque) constituant les réserves d’or volées dans la Banque nationale de la République d’Haïti, en décembre 1914, par les Américains, après dix ans d’occupation. La France et les Etats-Unis ont colonisé et occupé le pays et, loin de contribuer à son émancipation ensuite, la France et les États-Unis se sont octroyés des dédommagements (dédommagements de quoi !) démentiels !
Il est clair que pour une partie de celles et ceux qui prétendent diriger le monde, la faute originelle du peuple haïtien réside dans sa victoire contre l’esclavage et dans l’établissement de la première République d’un peuple Noir. Capitalisme, exploitation, colonialisme, racisme, c’est cela qui prévaut et qui conduit à la catastrophe que nous connaissons.
Pour en revenir à ce qui est possible de faire, il y a bien évidemment les campagnes unitaires, les soutiens humanitaires, la solidarité concrète, comme je le disais au début de cette intervention. En tant qu’organisation syndicale, parce que nous nous adressons aux travailleuses et aux travailleurs, nous avons quelques responsabilités spécifiques :
D’abord faire connaitre et soutenir les positions, les demandes, les revendications des organisations syndicales qui luttent sur place, dans des conditions dont chacun et chacune comprend la difficulté.
Ensuite, informer de la situation dans ce pays, de la situation du peuple haïtien. Sur ce sujet, comme sur bien d’autres, il est important qu’une information non biaisée, authentique, circule.
L’Union syndicale Solidaires – comme sans aucun doute bien d’autres forces syndicales françaises – est disponible pour contribuer à ce que naisse ou renaisse un Haïti digne, souverain et libre de toute occupation !
L’Union syndicale Solidaires
