J’ai fait la connaissance de Catherine au comité chili, au comité de soutien à la lutte révolutionnaire du peuple chilien, en 1973 ou 1974. Marie-Noëlle m’a dit un soir : je te présente Catherine, une grande militante très investie sur la Palestine. Ça a été le début d’une longue et profonde amitié de cinquante ans. J’ai appris après à connaître sa vie militante. Sa première manif à 19 ans, en 1961, à Paris contre la guerre d’Algérie. Ses années d’enseignante « pied-rouge » en Algérie de 1962 à 1965. L’éblouissement de mai 1968. Son expulsion d’Algérie, en juillet 1976. A partir de 1977, Catherine sera toujours attentive et présente auprès du Cedetim et de la rue de Nanteuil.
Catherine poursuit de front son engagement pour la Palestine et son métier d’enseignante-chercheuse de sociologue. C’est une sociologue engagée et militante. Elle travaille sur les conditions ouvrières et sur les luttes ouvrières, on devrait plutôt dire pour les luttes ouvrières. Ses publications en témoignent avec parmi beaucoup d’autres : sur Renault et l’Etat entrepeneur ; sur les égoutiers de Paris, sur Montefibre, sur la Montedison, sur les cercles de qualité dans la sidérurgie, sur la propriété ouvrière du taudis à la propriété, sur a précarité avec « vivre au minimum », sur l’histoire du militantisme.
Elle travaille et milite avec Pierre Bourdieu. Pour Catherine, il n’y a pas de frontière entre le travail et l’engagement. Elle participe aux engagements de Pierre Bourdieu et elle a toute sa confiance. Elle s’engage avec Pierre Bourdieu en soutien à l’Appel aux intellectuels et grévistes du 7 décembre 1995. C’est, il faut le rappeler, en 1995, déjà, une lutte contre la réforme des retraites du plan Jupé. Elle est présente, le 12 décembre 1995, devant les grévistes de la gare de Lyon, au moment du discours de Bourdieu qui fustige la noblesse d’état. Elle organise avec Pierre Bourdieu les mobilisations pour le Kosovo, en 1999, au moment du démantèlement de la Yougoslavie. Catherine sera très affectée par le décès de Pierre Bourdieu en 2002.
La rencontre avec Ilan, dans les années 1975, a marqué un tournant dans la vie de Catherine. Non par rapport à la Palestine et au peuple palestinien qui a toujours occupé une place centrale dans leurs deux vies. Mais avec l’arrivée de Marianne, devenue Mariam, et d’Emmanuel, qui ont bouleversé et transformé la vie de Catherine. Ses enfants ne l’ont pas amené à abandonner ses engagements, au contraire, elle et il, l’ont amené à les assumer avec plus de profondeur.
Les dernières années ont été difficiles. Catherine marchait difficilement et supportait difficilement de limiter ses engagements. Elle devait contenir son impatience ce qui ne l’empêchait pas de suivre l’actualité avec la volonté de s’investir et de s’engager.
Celles et ceux qui l’ont connu et aimé garderont de Catherine le souvenir d’une femme libre et engagée. Catherine n’était pas un long fleuve tranquille ; c’était un torrent impétueux capable de prolonger ses impatiences par de solides engagements.
5 décembre 2025
Gustave Massiah