Des Palestiniennes au milieu des décombres dans le camp de réfugiés de Jabaliya, dans la bande de Gaza, le 1er novembre 2023. (Photo by Bashar TALEB / AFP) PHOTO BASHAR TALEB/AFP
Dans sa requête devant le tribunal onusien, citée par The Times of Israel, l’Afrique du Sud affirme que depuis le lancement de son offensive contre le Hamas à Gaza en octobre, Israël “s’est livré, se livre et risque de continuer à se livrer à des actes de génocide contre le peuple palestinien à Gaza”.
Elle estime que le terme de “génocide” est justifié car les actions de l’État hébreu “sont commises avec l’intention spécifique requise […] de détruire les Palestiniens de Gaza en tant que partie du groupe national, racial et ethnique plus large des Palestiniens”.
“La conduite d’Israël […] constitue une violation de la Convention sur le génocide”, soutient encore Pretoria.
Cette requête “est la dernière mesure en date prise par l’Afrique du Sud pour faire pression sur Israël afin qu’il mette fin à sa guerre contre Gaza”, remarque le site Middle East Eye. “Le mois dernier, les députés du pays avaient voté en faveur de la fermeture de l’ambassade israélienne à Pretoria et de la rupture des relations diplomatiques avec Israël jusqu’à ce qu’un cessez-le-feu soit instauré”.
Le président sud-africain Cyril Ramaphosa, ardent défenseur de la cause palestinienne, “compare la politique israélienne à Gaza et en Cisjordanie occupée avec le régime d’apartheid de ségrégation raciale imposé par la minorité blanche [d’Afrique du Sud], qui a pris fin en 1994”, explique Al-Jazeera. “Plusieurs organisations de défense des droits de l’homme ont déclaré que la politique israélienne à l’égard des Palestiniens relevait de l’apartheid”, soutient la chaîne qatarie.
“Mesures provisoires”
Le New York Times observe que “les allégations de crimes de guerre commis par Israël et par des groupes militants palestiniens dans les territoires occupés par Israël depuis 1967 font déjà l’objet d’une enquête de la Cour pénale internationale (CPI), indépendante de l’ONU”.
“Mais l’impact de cette enquête reste flou car Israël n’est pas [signataire du Statut de Rome] et ne reconnaît pas la compétence de la CPI”, poursuit le quotidien américain. “Israël est en revanche signataire de la Convention sur le génocide, aux côtés de l’Afrique du Sud”, ce qui a permis à cette dernière de “porter l’affaire devant la CIJ”.
Cette requête, comme toutes les autres portées devant la CIJ, “ne sera probablement pas résolue avant plusieurs années”, souligne The Guardian. “Mais l’Afrique du Sud a demandé à la Cour de se réunir dans les prochains jours pour émettre des ‘mesures provisoires’ appelant à un cessez-le-feu”.
La CIJ est habilitée à ordonner des mesures d’urgence. Mais à l’instar de ses décisions finales, censées être juridiquement contraignantes, elle n’a aucun moyen de les faire appliquer : en mars 2022, elle avait ainsi ordonné à la Russie de mettre fin à son offensive en Ukraine mais Moscou avait simplement ignoré la décision.
Les ordonnances de la CIJ ne sont pas pour autant sans impact : elles peuvent “contribuer à changer l’opinion publique internationale”, assure Middle East Eye. Or le simple fait de poser la question d’un éventuel génocide commis par Israël “pourrait nuire gravement à la réputation internationale de l’État hébreu”.
“Exploitation ignoble” de la CIJ
Par la voix de Lior Haiat, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Israël a rejeté “avec dégoût” les accusations de l’Afrique du Sud, les qualifiant de “diffamation sans fondement légal”, et assurant qu’il “respectait le droit international dans sa guerre contre le Hamas à Gaza”, rapporte Ha’Aretz.
“La prétention de l’Afrique du Sud est dépourvue de fondement à la fois factuel et juridique et constitue une exploitation ignoble et méprisante de la Cour”, a jugé le porte-parole.
Les bombardements aériens et l’invasion terrestre de Gaza par Israël, en réponse aux attaques terroristes meurtrières et aux enlèvements du Hamas le 7 octobre, “ont entraîné une dévastation généralisée dans la bande côtière densément peuplée, suscitant un tollé au sein des organisations humanitaires et de la communauté internationale”, relève CNN.
La chaîne américaine observe en outre que “de nombreuses bombes utilisées à Gaza” sont capables “de tuer ou de blesser des personnes dans un rayon de 300 mètres”. Des bombes “normalement utilisées avec parcimonie par les armées occidentales, affirment les experts”, le droit international humanitaire interdisant “les bombardements aveugles”.
L’attaque sans précédent du Hamas sur le sol israélien, le 7 octobre, avait fait environ 1 140 morts. Selon le dernier bilan du ministère de la Santé sous l’autorité du Hamas, la riposte israélienne aurait fait à ce jour plus de 21 500 morts côté palestinien, dont 40 % d’enfants.
Le Courrier international