Depuis plus de vingt-six (26) ans maintenant, le soi-disant conflit ou chevauchement des lois régionales et nationales pour les Peuples indigènes n’a toujours pas été résolu.
Dès 1996, nous avons demandé la délivrance d’un certificat de revendication de domaines ancestraux (Certificate of Ancestral Domain Claim, CADC) basé sur le DAO n° 02 à PENRO Maguindanao, mais en vain. Cette demande a été suivie d’une demande unifiée de reconnaissance territoriale (CADT) dans le cadre de la loi sur les droits des peuples indigènes (IPRA), sous l’égide de la Commission nationale des peuples indigènes (National Commission on Indigenous Peoples, NCIP), en 2005. Dix-sept (17) ans plus tard, le 2 septembre 2019, le bureau régional 12 de la NCIP a finalement soumis les rapports d’enquête sur les revendications des domaines ancestraux de Tëduray et de Lambangian (TLADC) au bureau des domaines ancestraux de Manille pour examen et approbation.
Cependant, le premier Parlement de l’Autorité de transition Bangsamoro (Bangsamoro Transition Authority, BTA) a publié la résolution n° 38 demandant instamment à la NCIP de CESSER le et de SE DESISTER du processus de délimitation et de délivrance des CADT pour les Tëduray et les Lambangian dans la province de Maguindanao, le 25 septembre 2019. Pour nous, il s’agit d’un déni de notre droit à la protection de notre Fusaka Ingëd (domaine ancestral) et d’une entrave à notre pleine participation à la prise de décision en termes de formulation de plans d’aménagement du territoire, de programmes et d’activités autorisées par la loi sur le territoire que nous revendiquons.
Cette triste situation ne nous a pas empêchés de rechercher ce qui est bon pour nous et nos domaines ancestraux. Nous souhaitons ardemment protéger notre domaine ancestral par tous les moyens légaux possibles et nous avons donc demandé à l’Hon. député Romeo Saliga du premier parlement de la BTA d’adopter une résolution visant à « institutionnaliser, promouvoir et soutenir les Gardes forestiers des peuples indigènes dans les zones de domaines ancestraux », en proposant des activités telles que, mais sans s’y limiter, les suivantes : mener des activités de protection des forêts, de surveillance et d’application de la loi en coordination avec les organismes d’application de la loi et les collectivités locales ; coordonner les réunions du Sanggunian Bayan [conseil de la jeunesse] et du conseil du Barangay [unité administrative locale] sur les questions de protection des forêts dans leur zone d’affectation et y assister ; mener des enquêtes sur les occupants des forêts dans leur zone d’affectation ; participer aux réunions, à l’évaluation des activités et aux séances de planification avec les fonctionnaires et le personnel du ministère de l’Environnement et d’autres partenaires xxx. Toutefois, la résolution n’a pas été soutenue ni adoptée par le Parlement de Bangsamoro.
D’autre part, le NCIP met en œuvre les onze (11) éléments constitutifs d’un domaine ancestral résilient, réactif et pertinent couvrant les questions relatives à la structure politique indigène, aux organisations de peuples indigènes, à la délimitation des CADT/CALT, à la gestion des domaines ancestraux, au développement durable des domaines ancestraux et à l’élaboration d’un plan d’action pour les domaines ancestraux ; plan de développement durable et de protection des domaines ancestraux ; CLIP ; IPMR ; formulation des MOA/MOU/MOC ; coopératives ; et système de défense des domaines ancestraux.
Notre désir de participer pleinement est grand, mais l’interrelation ou l’arrangement entre les structures administratives régionale (MIPA ) et nationale (NCIP) dans la mise en œuvre des pouvoirs et des fonctions sur les structures des peuples indigènes (IPs/ICCs/NMIPs) au sein de la région BARMM n’est pas clair pour nous jusqu’à aujourd’hui. Le NCIP, par exemple, a délivré un certificat de confirmation pour nos peuples indigènes (IPs) en 2017 et par l’OSCC en 2007, mais les fonctionnaires et le personnel régional du MIPA sont occupés à organiser un autre groupe de IP qu’ils prétendent être des peuples indigènes bangsamoro appelés Conseils tribaux dans la région de BARMM - un programme qui a rendu les minorités non musulmanes (NMIP) plus vulnérables à l’exploitation, créant davantage de divisions parmi les dirigeants pour affaiblir leurs structures et le processus de prise de décision. Cela ne veut pas dire que la MIPA en tant qu’institution est mauvaise ; elle devrait néanmoins étendre son soutien aux groupes de peuples indigènes (IPs) déjà organisés dans la région.
La pleine participation des IPs/ICCs/NMIPs à la gestion collective et à la protection des domaines ancestraux par le biais de la structure politique indigène et des Organisations de peuples indigènes au sein de la région BARMM aurait pu être renforcées si les mécanismes susmentionnés avaient été mis en place, alors que le Code des Peuples indigènes n’a pas encore été adopté.
Le typhon Paeng a dévasté les Fusaka Ingëd (domaines ancestraux) des régions de Tëduray et de Lambangian et les régions voisines. Certes, nous ne pouvons blâmer personne pour cette tragédie, car il s’agit d’une calamité naturelle. Cependant, nous ne pouvons pas éviter de revoir l’intention de la loi sur les IPs/ICCs élaborée il y a 25 ans, qui dit en partie « reconnaître, protéger et promouvoir les PA/ICC xxx ». Avec les mécanismes ajoutés, mais non limités aux références susmentionnées, comment se fait-il que les IPs/ICCs de BARMM, communément connus aujourd’hui sous le nom de peuples indigènes non moros (NMIPs), attendent toujours la mise en œuvre de la loi dans son esprit et sa lettre ?
Plus précisément, dans la région de Barroma, les peuples indigènes sont victimes de meurtres, de déplacements dus aux guerres et aux conflits armés, des conflits fonciers et maintenant du typhon mortel Paeng. Les Tëduray et les Lambangian comptent simplement leurs victimes et ne peuvent pas réagir ni se préparer collectivement en utilisant les structures et les systèmes reconnus, protégés et promus par la loi. Cela est dû au fait que le ministre responsable de l’administration régionale MIPA n’a pas réagi de manière efficace pour nous consulter et promouvoir notre bien-être général en tant qu’administré.es.
Concrètement, si le domaine ancestral des Tëduray et des Lambangian avait été attribué en temps voulu, nous aurions pu mettre en place les mécanismes nécessaires prévus dans l’IPRA et dans le BOL, surnommé IPRA+++ par les dirigeants du MILF [Moro Islamic Liberation Front] et les défenseurs des peuples indigènes.
Ainsi, les éléments suivants auraient pu être pris en considération en collaborant avec les Peuples indigènes :
• Les victimes du typhon Paeng au Point Zero étaient sur un site de réinstallation pour les NMIP déplacés à localisé à Tinabon, barangay Kusiong, DOS, Maguindanao. Si le traitement du plan de relocation avait suivi une procédure régulière, avec la participation des IPs-IPOs et des agents chargés des revendications de domaines ancestraux, la tragédie d’aujourd’hui n’aurait peut-être pas eu lieu ou aurait eu moins d’impact.
• Il aurait pu être tenu compte des tabous ou des actes interdits en Tëduray et en Lambangian et suivre strictement les protocoles coutumiers dans la conduite du spectacle de l’administration régionale MIPA intitulé « Tribo Ko, Suot Ko » si la direction du MIPA et les organisateurs du spectacle avaient dûment consulté les praticiens coutumiers et les « Këmamal Këadatan » (chefs spirituels) sur ce qu’il faut faire et ne pas faire dans leurs pièces de théâtre, leurs concours, leurs prix/cadeaux et autres représentations le 27 octobre 2022, à la veille de l’inondation de Nuro à Upi, Maguindanao del Norte.
• En ce qui concerne la protection de la forêt et de l’environnement, il convient de noter qu’en 2016, le Timuay Justice and Governance (TJG) [une structure représentative des peuples indigènes] des Tëduray et des Lambangian, a organisé une « Lakbay Tribo Para sa Gubat » (marche tribale pour la forêt) traversant les zones forestières d’Upi et d’Upi Sud pendant trois jours, pour faire campagne en faveur de l’arrêt de l’exploitation forestière. Il nous a fallu des années de dialogues et de négociations pour mettre fin à l’exploitation forestière, mais il est trop tard, car la forêt a disparu. Cette initiative aurait pu être couronnée de succès si les agences gouvernementales pour les peuples indigènes et les bureaux de l’environnement l’avaient pleinement soutenue.
Dans ces circonstances, nous appelons :
1. Le gouvernement et les acteurs non étatiques à intervenir systématiquement auprès des victimes du typhon Paeng dans certaines parties des cinq (5) municipalités situées dans les zones de revendication des domaines ancestraux, en particulier au point zéro ;
2. Le NCIP pour accélérer le processus de délimitation des domaines ancestraux (TLAD maintenant que le NCIP au niveau national et le MIPA-BARMM au niveau régional ont signé un protocole de coopération à partir du 5 novembre 2021 ;
3. Le Sénat, par l’intermédiaire de l’honorable Robinhood Padilla, de procéder à l’enquête et aux investigations prévues :
3.1. Aide à la législation - pour résoudre lesdits conflits de lois entre la/les loi(s) sur l’autonomie de Bangsamoro et les lois et politiques nationales pour les peuples indigènes ;
3.2. Mettre fin à des décennies de confusion et de déni des droits des Peuples indigènes au Bangsamoro ;
3.3. Rendre justice aux pratiques injustes commises à l’encontre des IPs/NMIPs.
12 novembre 2022
Task Force Barat
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Personne de contact : Leticio Datuwata, TJG Timuay Labi
Numéro de contact
TASK FORCE BARAT Convergence OTLAC CEDORM
TLWOI IWRC
TLYSA TLAMABANG
LPO INGED FINTAILAN
MTO TLADC
MDTJSG TJG