“À moins que l’État et la société ne décident d’une manière pratique de lutter contre l’extrémisme et aillent au-delà des clichés et des condamnations, le monstre de l’obscurantisme continuera de dévorer les éléments vitaux du Pakistan”, , met en garde Dawn dans son éditorial du 17 août. La veille, un quartier chrétien a été attaqué par des musulmans en réaction à un prétendu blasphème commis à Faisalabad, dans le Pendjab, dans le nord-est du pays. Au moins quatre églises ont été incendiées, un cimetière chrétien vandalisé et sept maisons attaquées, selon la police, qui, par la suite, a procédé à l’arrestation de 129 musulmans.
“De toute évidence, au Pakistan, les preuves ne sont pas nécessaires en matière de blasphème, et les foules se chargent de rendre ‘justice’”, regrette le quotidien de référence pakistanais. Il s’agit du deuxième événement de ce type ces derniers jours, rappelle le journal. Un enseignant du Baloutchistan a récemment été assassiné en raison d’allégations de blasphème à son encontre.
Si la classe politique pakistanaise a dénoncé ces violences, Dawn s’interroge :
“Les dirigeants – les politiciens et l’establishment – ainsi que les religieux et les personnalités éminentes de la société ont-ils le courage d’affronter cette folie ?”
Des décennies d’obscurantisme
Car de tels événements ne surviennent pas du jour au lendemain mais sont le résultat de décennies d’obscurantisme. “Depuis plus de quarante ans, l’État lui-même promeut l’obscurantisme ou utilise des fanatiques sectaires et religieux comme mandataires”, dénonce l’éditorial. “Notre élite au pouvoir est restée silencieuse alors que les lois sur le blasphème ont été utilisées à mauvais escient pour régler des comptes personnels, occuper des biens ou terroriser des minorités.”
Mais au même titre, en Occident, “la tendance effroyable à attaquer les symboles sacrés de l’islam alimente un cercle vicieux de sectarisme et d’islamophobie”, poursuit le quotidien anglophone.
“Le fait est que, tant en Occident que dans les États musulmans, les efforts doivent être intensifiés pour contrer les forces du sectarisme religieux.”
Blasphème
Alors que cette attaque a rapidement pris de l’ampleur “sous la surveillance de la police, se propageant dans plusieurs colonies chrétiennes de la ville, le scénario des allégations, l’enregistrement des preuves et la réaction de la foule semblent provenir d’un manuel de blasphème standard”, regrette pour sa part The Friday Times.
“Les condamnations sélectives de la violence au nom de l’islam, non seulement par les islamistes et le clergé mais aussi par l’élite dirigeante, sont comme toujours pour les seules apparences”, regrette l’hebdomadaire en référence aux promptes condamnations par l’élite pakistanaise lorsque des exemplaires du Coran ont été brûlés en Suède.
À la vitesse à laquelle “les croix sont retirées dans les églises au Pakistan, on pourrait dire qu’il n’y a pas non plus de volonté de contrer le sectarisme au Pakistan”, conclut The Friday Times.
Courrier international
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