Dans une déclaration à la presse reprise notamment par le site Biobiochile, le président de gauche Gabriel Boric a été droit au but, le mercredi 14 juin :
“Nous utiliserons tous les moyens légaux, sans aucun complexe, pour attraper ceux qui commettent des attentats, posent des bombes et menacent la population.”
La veille, un explosif avait détruit en partie un pont ferroviaire dans la région de Ñuble, dans le centre du pays. Et les jours précédents, des attentats à la bombe avaient touché des pylônes de lignes électriques à haute tension dans les régions du Biobío et de Valparaíso. Aucune de ces destructions n’a fait de victimes.
Les attentats ont été revendiqués le mercredi 14 juin par un mystérieux Mouvement du 18 octobre. La date fait allusion au début des grandes manifestations de 2019, sévèrement réprimées, qui avaient commencé le 18 octobre de cette année-là. Le lendemain, le gouvernement, de droite à l’époque, avait déclaré l’état d’urgence.
“Le gouvernement est un pantin”
Le communiqué a été diffusé à la presse, et repris dans son intégralité par le site de gauche radicale El Ciudadano. Les objectifs visés par les explosions sont des “infrastructures capitalistes” ; “le Chili entre dans une époque noire pénétrée par un fascisme en germe” ; “le sauveur [Gabriel Boric] est aujourd’hui chargé de maintenir l’ordre et de perpétuer les injustices absolues du système capitaliste” ; “le gouvernement est un pantin [aux mains] de la droite”…
Le Mouvement du 18 octobre s’en prend particulièrement à l’élaboration en cours d’une nouvelle Constitution, chargée de remplacer celle mise en place en 1980, durant la dictature de Pinochet – même si elle a maintes fois été modifiée depuis. Le 7 mai, l’élection des membres du Conseil constitutionnel, chargé de la rédiger, avait été largement remportée par le Parti républicain d’extrême droite :
“Il s’agit d’une offensive conservatrice conçue par l’oligarchie, la classe politique et les médias […] face à un gouvernement inconsistant, sans aucune capacité de réaction.”
Désormais, “grâce” au Mouvement, “un nouveau fantôme traverse le Chili”.
Le pays n’a guère été habitué, ces dernières années, à l’apparition de groupes d’extrême gauche capables de poser des bombes. Les seules violences récentes proviennent de groupes radicaux séparatistes du peuple mapuche qui s’en prennent notamment aux entreprises d’exploitation forestière.
“Une loi antiterroriste inefficace”
“Il s’agit d’un nouveau groupe, peut-être de jeunes venus de l’anarchisme, commente le site indépendant Infogate. Ce qui est sûr, c’est que personne au palais présidentiel, ni au sein de la léthargique ANI [Agence nationale du renseignement], ne sait qui est derrière cette vague [de violence].” Cité notamment par Biobiochile, le président Gabriel Boric a promis de présenter prochainement au Parlement une réforme de la loi antiterroriste :
“Celle que nous avons aujourd’hui est inefficace. Non seulement inefficace mais aussi condamnée par des organismes internationaux quand nous l’utilisons.”
Selon Manuel Monsalve, secrétaire d’État à l’Intérieur, repris par le quotidien de centre droit La Tercera, avec la loi actuelle “il faut prouver l’intention de terrorisme de celui qui a commis un acte, et il a toujours été très difficile d’utiliser cette zone subjective”.
Courrier international
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