“Pour la première fois dans l’histoire récente, la nation semble flirter dangereusement avec la guerre civile”, met en garde Dawn dans un éditorial publié le dimanche 14 mai. Elle se déchire sous le poids de ses propres contradictions.” Le quotidien pakistanais poursuit : “La colère et la frustration croissante du public poussent le pays toujours plus près du point de rupture.”
L’arrestation, le 9 mai, de l’ancien Premier ministre Imran Khan (2018-2022) dans une affaire de corruption, puis sa mise en détention provisoire le lendemain, a déclenché de violentes manifestations dans le pays. Les partisans de M. Khan, figure d’opposition populaire, s’en sont pris à des bâtiments gouvernementaux et à des symboles de la puissante institution militaire.
L’ancienne vedette du cricket devenue personnalité politique multiplie les attaques contre l’armée, avec le soutien de laquelle Imran Khan était pourtant arrivé au pouvoir en 2018. Aujourd’hui, il l’accuse d’être responsable de la tentative d’assassinat qui l’a visé, au début de novembre 2022, lors d’un rassemblement politique.
Remis en liberté le 12 mai après l’invalidation de son arrestation par la Cour suprême, le chef du Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI) a intensifié ses critiques, accusant le chef de l’armée de nourrir “une rancune personnelle” contre lui, dans une interview accordée au Guardian depuis sa résidence de Lahore et publiée le 14 mai. “Le Pakistan est maintenant dirigé par le chef de l’armée. La répression contre nous est menée par le chef de l’armée”, a-t-il également commenté, en faisant référence à l’arrestation de nombreux membres de son parti.
Le ministre de l’Intérieur, Rana Sanaullah, a assuré que M. Khan serait de nouveau arrêté tôt ou tard. Une centaine d’accusations, allant de la corruption à l’incitation à la violence, pèse sur l’ancien Premier ministre. Ce dernier est devenu extrêmement populaire après avoir été évincé du pouvoir par une motion de censure en avril 2022. Depuis, il mobilise les foules et réclame des élections anticipées.
“Jusqu’à la dernière goutte de sang”
La situation demeure explosive. Dans une série de tweets, lundi 15 mai, rapportée par le Daily Times, Imran Khan a promis de continuer à se battre jusqu’à sa “dernière goutte de sang”, car sa “mort est préférable” au fait d’être “réduit en esclavage par une bande d’escrocs”. L’ancien capitaine de l’équipe nationale de cricket a également affirmé que le plan de l’armée était de le jeter en prison pour les dix prochaines années et de s’en prendre aux cadres de son parti.
L’actuel Premier ministre, Shehbaz Sharif, a prévenu que les personnes impliquées dans les violences seraient poursuivies pour terrorisme. Des milliers de personnes ont été arrêtées au cours des derniers jours et la Commission des droits humains du Pakistan s’est inquiétée au sujet d’“informations faisant état d’arrestations au hasard et de poursuites arbitraires contre des sympathisants du PTI à travers le Pakistan”.
Dans son éditorial, Dawn juge que la seule possibilité pour une sortie de crise serait d’organiser des élections. “Des élections libres et équitables, menées à la satisfaction de toutes les parties, restent la meilleure option dans les conditions actuelles. Toutes les parties doivent reconsidérer.”
Courrier international
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