L’EDITO d’Info Birmanie
A l’annonce de la nomination de M. Bernard Kouchner comme Ministre des Affaires étrangères du gouvernement français, Info Birmanie souhaitait croire que celle-ci serait l’occasion d’un soutien renforcé de la diplomatie française aux demandes d’une opposition bénéficiant de la légitimité de représentants élus du peuple birman. Le premier geste du ministre sur ce dossier aura en tout cas été un geste fort. Le 29 mai 2007, Bernard Kouchner interpellait vivement son homologue birman Nyan Win, estimant « inacceptable » la prorogation de l’assignation à résidence d’Aung San Suu Kyi survenue le 25 mai. Le ministre des Affaires étrangères birman se justifiait en expliquant qu’Aung San Suu Kyi représentait « un danger à l’ordre public ». Bernard Kouchner, se déclarant choqué, lui rétorquait que la libération de la secrétaire générale de la Ligue Nationale pour la Démocratie renforcerait au contraire la stabilité dans le pays.
Info Birmanie, qui juge ce geste encourageant, espère donc que Bernard Kouchner, à l’instar de son prédécesseur M. Philippe Douste-Blazy, acceptera de s’entretenir avec des représentants de l’opposition birmane pour évaluer la meilleure façon d’obtenir des changements positifs en Birmanie.
Cette nomination aurait-elle en revanche une influence perverse sur le traitement médiatique de la situation en Birmanie ? Info Birmanie est amené à s’interroger au vu du remplacement complet du plateau d’intervenants initialement constitué pour l’émission « La société des nations » du vendredi 25 mai sur France culture au profit d’experts pour la plupart issus des rangs de la diplomatie française, et du contenu de cette émission. Un événement sur lequel notre association reviendra.
Enfin, Info Birmanie ne peut que regretter que la position commune européenne sur la Birmanie (renouvelée le 27 avril de cette année) n’ait pu, au vu des dissensions entre Etats-membres sur la politique à suivre, qu’être maintenue en l’état. Une position renforcée aurait permis d’envoyer un signal fort à la junte après l’échec de la résolution au Conseil de sécurité des Nations unies, qui a conforté celle-ci dans le sentiment de son impunité.
Info Birmanie regrette notamment que l’initiative de la Hollande d’inscrire la Myanmar Timber Enterprise (MTE) sur la liste noire de la position commune n’ait pu voir le jour. D’après les informations dont dispose notre association, la Hollande a renoncé à soutenir cette initiative au vu de l’hostilité marquée de la France et de l’Espagne, les hollandais craignant que leur insistance puisse inciter ces deux pays à demander un affaiblissement de la position commune.
Info Birmanie.
Réponses de Total aux questions posées à l’occasion de l’assemblée générale des actionnaires de l’entreprise, réunie le 11 mai 2007.
Plus de douze millions de dollars ont déjà été investis par Total dans des projets sociaux en Birmanie. Quelle serait la réponse du groupe aux critiques de ceux qui estiment que les projets mis en place dans ce pays ne sauraient compenser – en l’absence d’un contrôle satisfaisant par le groupe de l’argent généré par le projet Yadana – les dommages résultant d’un apport de ressources à un régime peu respectueux des droits de l’homme ?
Total agit avec détermination au Myanmar en faveur des populations locales, dont les conditions de vie s’améliorent de manière très significative. L’impact de nos actions, tant au niveau local que national, fait l’objet d’un suivi rigoureux tant par nous-mêmes que par des organismes indépendants qui en ont largement établi les mérites. Au-delà des causes internes à la situation actuelle du pays, la faiblesse de son évolution résulte bien plus d’une politique générale de sanctions que d’engagement de la part de la communauté internationale. Depuis 15 ans, l’investissement étranger est l’objet de nombreuses pressions occidentales. L’intervention d’autres opérateurs économiques responsables au Myanmar permettrait de démultiplier les résultats obtenus par Total dans sa zone. Ce n’est pas en isolant ce pays que l’on parviendra à lui permettre de rejoindre la communauté internationale, mais au contraire en lui offrant l’exemple concret d’autres pratiques (telles que la transparence, la responsabilité sociétale…), en ligne avec nos chartes éthiques et les usages internationaux.
Le groupe estime-t-il que sa présence en Birmanie infléchit d’une façon quelconque la politique de la France vis-à-vis de ce pays ?
Dans le cadre de l’action menée par l’Union Européenne, le gouvernement français s’est montré favorable à une politique d’engagement (par préférence à une politique de sanctions) dans tous les dossiers internationaux récents, quelle que soit l’entreprise française présente dans les pays concernés. Cette politique de dialogue trouve un écho favorable auprès de nombreux gouvernements européens ainsi qu’auprès d’un nombre croissant de hautes personnalités d’Asie du sud-est, d’Europe ainsi qu’au niveau international. Il s’agit donc d’un point de vue partagé par de très nombreux intervenants qui ne nécessite aucune pression.
FIL D’ACTUALITE - Avril & Mai 2007
Sources : AFP, BBC, AP, Irrawaddy, Burmanet, Reuters, Le Monde, Bangkok Post, DVB
Le 25 mai : La détention en résidence surveillée d’Aung San Suu Kyi est prolongée d’un an
Malgré les nombreux appels à sa libération de la communauté internationale et des opposants birmans, la junte est restée intransigeante. Le régime birman est actuellement en position de force avec un commerce extérieur excédentaire, le soutien de la Chine, de la Russie, de l’Inde et l’attitude plus que bienveillante de la Thaïlande.
Selon Lary Jargan, un journaliste basé à Bangkok, expert de la Birmanie, le statut de détenue de Aung San Suu Kyi devrait rester inchangé tant que l’assemblée constituante n’aura pas finalisé la nouvelle constitution et tant que cette dernière n’aura pas été soumise à référendum.
La junte a choisi la force pour briser le mouvement de protestation face à cette décision. 30 membres de la NLD priaient à la Pagode Chauk Htat Gyi Paya quand une contre manifestation violente, organisée par le groupe paramilitaire de l’USDA, le Phythu Swan Arr Shin, est intervenue pour briser le mouvement.
La génération des étudiants de 1988, par la voix du respecté opposant Min Ko Naing, a promis de poursuivre la campagne pour la libération de Suu Kyi et a demandé à ce que la pression internationale aille croissant.
Le 18 mai : Le Premier Ministre birman, Soe Win, est mourrant
A l’hôpital à Singapour depuis deux mois, Soe Win souffrirait d’une leucémie. Le Lt-Gen Thein Sein le remplace dans ses fonctions. Il est Premier ministre en activité, mais aucune nomination officielle n’est encore intervenue.
Le 17 mai : Le président George W. Bush reconduit pour un an les sanctions à l’encontre de la Birmanie
L’administration Bush manque rarement une occasion de souligner son hostilité au régime des généraux en place à Rangoon, officiellement en raison de l’absence de libertés dans le pays, plus prosaïquement en raison de l’influence de la Chine sur les généraux qui lui donne un accès stratégique sur le golfe du Bengale.
Le communiqué de presse de la Maison Blanche note néanmoins « que les récentes mesures prises contre les démocrates s’inscrivent dans le contexte de la poursuite de graves violations des droits de l’homme, y compris le viol comme arme de guerre et la conscription forcée d’enfants soldats (…) dans les semaines précédentes les attaques contre les minorités ethniques se sont accentuées et le régime a fréquemment utilisé son organisation de masse, l’USDA, pour attaquer et harceler les étudiants et le mouvement pro démocratique ».
Le 17 mai : Selon la presse officielle, « la détention de Aung San Suu Kyi n’a rien d’inhabituel »
Premier signe fort que le régime n’a aucune intention de libérer la Dame de Rangoon le 27 mai. Après quatre nouvelles années de privation de liberté (plus de onze au cours des dix huit dernières années), elle arrivait normalement au terme de sa détention.
L’ASEAN, fait exceptionnel, a appelé la Birmanie à libérer Aung San Suu Kyi, bien que de profonds désaccords existent entre les Philippines, la Malaisie et l’Indonésie, et la Thaïlande, le Laos, le Cambodge et le Vietnam, beaucoup plus tolérants envers Rangoon. Le 23 mai, la Chine se refusait à adopter une telle position. « C’est une question qui relève des affaires intérieures de la Birmanie » selon un communiqué de presse du ministère des affaires étrangères chinois.
Le 15 mai : Accord russo-birman pour un centre de recherche nucléaire en Birmanie
L’Agence fédérale russe de l’énergie atomique a annoncé que la Russie et la Birmanie viennent de conclure un accord de coopération pour la création d’un centre de recherche nucléaire sur le territoire birman.
Le 15 mai : Clinton, Delors et 55 personnalités lancent un appel pour Aung San Suu Kyi
Dans une lettre adressée au chef de la junte birmane, les ex-présidents américains Bill Clinton et George Bush père, l’ancien chef de la Commission européenne, Jacques Delors, et une cinquantaine d’anciens décideurs ont réclamé la libération de l’opposante birmane Aung San Suu Kyi.
« Aung San Suu Kyi n’appelle pas à une révolution en Birmanie mais à un dialogue pacifique et non-violent entre l’armée, la Ligue nationale pour la démocratie (LND, son parti) et les groupes ethniques de Birmanie », font valoir les signataires.
Outre l’ancien chef du gouvernement norvégien, Kjell Magne Bondevik, initiateur de l’appel via son Centre d’Oslo pour la paix et les droits de l’Homme, la liste comprend l’ancien premier ministre pakistanais, Benazir Bhutto, et l’ex-président américain, Jimmy Carter, lui-même prix Nobel de la paix, en 2002.
Pendant ce temps, à Rangoon, une vague d’arrestations est en cours contre les militants de la LND (ligue nationale pour la démocratie, parti d’Aung San Suu Kyi) et d’autres opposants qui réclament sa libération et celle de tous les prisonniers politiques.
Depuis le premier mai, des opposants se relaient dans une Pagode de Rangoon pour prier pour leur libération. La junte a commencé à les arrêter le 15 mai dans un signe de nervosité à l’approche de la date du 27mai. Depuis au moins soixante opposants ont été arrêtés, pour « troubles à l’ordre public ». Une vieille femme a été arrêtée alors qu’elle priait seule au centre de Rangoon. Aux dernières nouvelles, 45 personnes étaient encore détenues.
Le 04 mai : l’ UE lance des négociations de libre-échange avec l’Asean, malgré les divergences sur le dossier sensible des violations des droits de l’Homme en Birmanie
L’ASEAN et l’Union Européenne sont parvenues à un accord de libre échange. L’Europe, sous la pression de plusieurs pays membres de l’Union qui s’inquiétaient du nombre d’accords bilatéraux conclus par les Etats-Unis, a cédé sur le dossier sensible et bloquant des violations des droits de l’homme en Birmanie. L’Europe pourra augmenter ses exportations vers l’Asean de 24 % et l’Asean vers l’Europe de 18 %.
Le 26 avril : L’affaire TOTAL relancée par la justice belge
Le ministre belge de la Défense, André Flahaut, a demandé au Procureur fédéral de saisir à nouveau le juge d’instruction dans le dossier opposant des réfugiés birmans à la firme Total. Grâce à cette décision, le dossier, gelé depuis 2003 suite à la modification de la loi de compétence universelle, est relancé.
Le 26 avril : Normalisation diplomatique entre la Corée du Nord et la Birmanie
La Corée du Nord et la Birmanie ont rétabli leurs relations diplomatiques, rompues en 1983 après un attentat à Rangoon visant le président sud-coréen Chun Doo-hwan et fomenté par la Corée du Nord.
Compte tenu des ambitions nucléaires des deux pays ainsi que le développement d’une coopération militaire et technique entre les deux capitales depuis la fin de la décennie 1990, cette décision inquiète la communauté internationale. Seule la Chine l’a immédiatement salué.
Ce partenariat sera surveillé de près par les autres pays de la région, notamment les Etats-Unis, ainsi que par des instances internationales comme les Nations Unies.
Le 23 avril : Les programmes de développement de la junte synonymes de plus de contrôle, de pauvreté et de répression, selon la KHRG. L’ONU se défend.
Un rapport de l’association Karen Human Rights Group intitulée Développement par degrés. Les politiques de pauvreté et de contrôle en Etat Karen dénonce l’utilisation par la junte des programmes de développement afin de militariser le pays, et notamment poursuivre les violations des droits de l’homme à l’encontre des Karen.
L’association appelle les organisations internationales présentes en Birmanie à vérifier qu’ils peuvent respecter ces trois principes avant de financer tout programme : transparence, responsabilité envers les populations locales et préservation des droits des populations locales par la réalisation d’enquêtes d’impact concernant les droits de l’homme. L’ONG souhaite par ce rapport ouvrir le débat sur la pertinence de l’aide humanitaire internationale en Birmanie et sur ses modalités alors que le gouvernement réduit l’autonomie des organisations sur le terrain.
L’ONU conteste publiquement les conclusions de ce rapport selon laquelle ses activités dans les zones rurales où vivent les minorités ethniques permettent à la junte birmane de rester au pouvoir. L’agence regrette que les auteurs du rapport ne l’ait pas contactée pour en discuter préalablement.
Le 22 avril : La junte jure de sévir contre les défenseurs des droits de l’homme
Le gouvernement birman a déclaré vouloir contrôler plus étroitement les activités des militants des droits de l’homme. A ses yeux, ces derniers déstabilisent le peuple, causent des troubles et menacent la paix intérieure. Plusieurs rapports d’ONG birmanes avaient dénoncé au cours du mois l’ordre de la junte de tuer dans l’œuf par tous les moyens tout début de protestation à Rangoon.
Maung Maung Lay et Myint Niang, membres de l’Organisation de défense et de promotion des droits humains, ont été hospitalisées en raison de blessures à la tête après avoir été agressés le 18 avril par plus d’une cinquantaine de personnes alors qu’ils quittaient le village de Hinthada, division de l’Irrawaddy, à moto. Leurs agresseurs se seraient servis de lance-pierres et de gourdins. Ils menaient alors des actions visant à sensibiliser la population aux droits humains.
L’Organisation de défense et de promotion des droits humains aurait été créée en 2006 dans le but de mener une action éducative en matière de droits humains en se basant sur la Déclaration universelle des droits de l’homme. Plusieurs de ses membres ont été arrêtés par les autorités depuis sa création, notamment pour avoir distribué des exemplaires de la Déclaration universelle des droits humains en birman.
Par ailleurs, huit personnes ont été arrêtées par des membres de la police lors d’une manifestation pacifique dans la banlieue de Rangoon appelant à la fin de l’inflation et à de meilleurs services publics, notamment hospitaliers.
Le prix du poulet, de l’huile et du riz, soit les aliments de base en Birmanie, ont connu une hausse de plus de 60% en 2006. Ainsi, le poulet a augmenté en un an de 80% pour atteindre aujourd’hui le prix de 4.40$/1.6kg. De son coté, le prix de l’huile a cru de 76% soit 1.76$ pour 1.6 kg. Les Etats-Unis ont estimé l’inflation birmane en 2006 à 21.4%.
Le 20 avril : Les pays de l’Asean ne défendront plus la Birmanie lors des conférences internationales
En raison de l’absence depuis plusieurs années de progrès tangibles et sincères dans le processus birman de transition démocratique, l’Asean a décidé de ne plus prendre la défense de la Birmanie lors des forums internationaux.
Le 13 avril : Le HCR salue l’attribution d’une carte d’identité aux réfugiés birmans en Thaïlande
La distribution des documents d’identité délivrés par le Gouvernement thaïlandais a commencé cette semaine dans deux camps, Ban Don Yong et Tham Hin, situés dans l’ouest de la Thaïlande, près de la frontière avec la Birmanie, marquant l’aboutissement de trois ans de travail accompli par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.
« Les cartes d’identité constituent un moyen important d’améliorer la protection des réfugiés, car l’élément le plus basique dans le domaine de la protection est de pouvoir prouver son identité », a indiqué Hasim Utkan, le délégué de l’UNHCR en Thaïlande. « En même temps, nous espérons que les cartes d’identité ne seront que la première étape d’une série de mesures pour ouvrir les camps, où les réfugiés habitent depuis plus de vingt ans », a-t-il ajouté.
Lors de sa visite dans le pays l’année dernière, le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés António Guterres avait insisté auprès du gouvernement thaïlandais pour qu’il accorde aux réfugiés une plus grande liberté de mouvement, spécialement pour qu’ils puissent travailler en dehors des camps et participer au développement économique thaïlandais, confronté à une pénurie de main-d’œuvre. António Guterres avait aussi souligné que de nombreux réfugiés travaillaient déjà illégalement et qu’ils devraient pouvoir, en toute légalité, se construire un avenir meilleur.
Le 13 avril : L’éthique toujours plus au cœur de la politique de placement des pétrodollars norvégiens. La Birmanie mise sur la liste noire.
La Norvège va renforcer les lignes éthiques régissant les placements de son fonds de pension public, alimenté par les recettes pétrolières. Le fonds norvégien a vu sa valeur atteindre 1.891 milliards de couronnes (236 milliards d’euros) fin 2006. Un chiffre qui approchera 5.000 milliards de couronnes dans dix ans selon les pronostics officiels.
Outre un volontarisme accru en matière de bonne gouvernance des entreprises, le Livre blanc prévoit que les pays cibles de sanctions imposées par l’Onu ou d’autres initiatives internationales appuyées par la Norvège soient dorénavant exclus de l’« univers d’investissement » du fonds. Premier pays à être placé sur la liste noire, la Birmanie. « L’UE a imposé des sanctions contre la Birmanie et les obligations d’Etat émises par la Birmanie seront par conséquent exclues », a expliqué Mme Halvorsen, indiquant que « d’autres pays » pourraient être concernés.
Mesure la plus spectaculaire, l’exclusion n’est que l’arme ultime, a rappelé Mme Halvorsen. « Nous pouvons, de l’intérieur, inciter les entreprises à modifier leur comportement (...) en usant de notre droit de vote, en prenant directement contact avec leurs instances dirigeantes, en accordant nos violons avec d’autres investisseurs (...) et en entrant en contact avec les autorités de contrôle », a-t-elle dit.
Le 11 avril : Compte-rendu de la conférence « Démocratie pour la Birmanie », organisée par la Conférence syndicale internationale
Des pressions soutenues à l’encontre du régime militaire birman, le soutien en faveur des efforts de l’OIT pour éradiquer le travail forcé dans ce pays et une campagne syndicale renforcée contre les investissements et les échanges étrangers avec la Birmanie. Telles sont les principales décisions de la Conférence syndicale internationale sur le thème « Démocratie pour la Birmanie » qui s’est tenue ces 3 et 4 avril à Katmandou, au Népal. Plus de 70 délégués y ont assisté en provenance de 20 pays d’Asie, du Pacifique, d’Europe et d’Amérique du Nord.
Dans une déclaration de cinq pages, les participants ont appelé le régime à engager un dialogue en bonne et due forme avec la Ligue nationale pour la démocratie (NLD) et les minorités ethniques et à mettre en application l’ensemble des recommandations d’une Commission d’enquête de l’OIT qui, en 1998, demandait à la junte de cesser immédiatement tout recours au travail forcé et de poursuivre en justice les responsables de ce crime contre l’humanité.
Le 1er avril : L’économie se redresse, mais pas au bénéfice du peuple birman
Apres des années de récession économique, l’économie birmane s’est redressée en 2005 selon une étude de la Banque asiatique de développement, ceci en raison d’un accroissement des échanges avec l’étranger et du revenu généré par les taxes. Cependant, ce redressement ne profite absolument pas au birman moyen qui subit de plein fouet les conséquences de l’inflation galopante et des hausses des taxes.
Les ressources minières, gazières et pétrolières sont les secteurs qui tirent l’économie birmane à la hausse. Elles représentent 37% des revenus d’exportation de 2006. Les perspectives de croissance sont de 3.5% en 2006 et de 4% en 2008. Ces taux sont faibles en comparaison avec les taux de 8% des autres pays de la zone, mais excellents au regard des taux négatifs qui ont suivi la crise bancaire de 2003.
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ARTICLES
« Moscou amorce une coopération nucléaire avec Rangoon »
Par Francis Deron, Le Monde, le 17 mai 2007
Les Etats-Unis ont promptement et vivement réagi, mercredi 16 mai, au projet de l’agence atomique russe de fournir à la Birmanie son premier réacteur nucléaire. « Ce n’est pas une bonne idée », a déclaré le département d’Etat.
L’agence gouvernementale russe à l’énergie atomique, Rosatom, avait annoncé, mardi, avoir conclu avec les autorités birmanes un accord pour la création d’un centre de recherches nucléaires comprenant un réacteur de 10 mégawatts à eau légère alimenté par un uranium faiblement enrichi (comportant moins de 20 % de l’isotope U-235). L’accord attribue à Atomstroyexport, bras industriel de construction nucléaire de l’Etat russe, la réalisation de ce centre, à vocation essentiellement médicale, et devant être placé, selon Rosatom, sous la surveillance de l’Agence internationale de l’énergie atomique de Vienne.
L’accord prévoit la formation, dans les laboratoires russes, de 300 techniciens birmans à la maîtrise de l’énergie nucléaire, et stipule que le centre se chargera de la conservation de ses déchets.
« La Birmanie ne dispose ni du cadre de régulation, ni du cadre légal, ni des mesures de protection, ni des autres instruments (nécessaires) pour gérer convenablement un programme comme celui-ci », a commenté le porte-parole du département d’Etat américain, Tom Casey. Les autorités birmanes « n’ont rien qui ressemble à une commission de réglementation nucléaire, pas de normes de sécurité, pas de normes de contrôle ou de gestion de l’énergie nucléaire », ajoutait-il.
RÉSERVES MONÉTAIRES
L’affaire était en négociation depuis 2000. La Russie semble avoir obtenu que les militaires birmans, très demandeurs, règlent la note en puisant dans leurs réserves monétaires, alimentées par un commerce extérieur en excédent de 1 milliard de dollars par an depuis plusieurs années.
Le réacteur en question ne pose pas en lui-même un danger à caractère militaire. L’isotope U-235 ne génère pas, dans le processus de fission, de plutonium utilisable dans la construction d’une arme atomique. Mais en facilitant à la junte birmane, isolée dans le monde en raison des violations des droits de l’homme, l’accès à un embryon de technologie nucléaire, le Kremlin manifeste à la fois une volonté d’en remontrer à Washington, et de reprendre pied sur un mode volontariste dans une région d’où il est pratiquement absent depuis la fin de la guerre froide.
Cette initiative n’est pas pour rassurer les pays du Sud-Est asiatique qui ne disposent d’aucune structure de recherche du même type. Elle va aussi indisposer la Chine, qui a tendance à considérer la Birmanie comme une chasse gardée pour l’accès qu’elle en escompte vers l’océan Indien, une projection stratégique importante de son émergence sur la scène mondiale.
« Des sacs à dos au secours des Karens »
Par Patrice Victor - Publiée par Libération le 4 avril
Des « backpackers » traqués par la junte militaire livrent des médicaments à cette ethnie birmane.
« Nos missions sont très dangereuses. Nous n’avons pas d’armes, seulement du matériel médical et des médicaments. Personne ne veut ou ne peut se rendre dans les zones où nous nous allons. Le SPDC [le Conseil national pour la paix et le développement, nom que s’est donné la junte birmane] ne laisse personne arriver par la rivière, s’il y en a, ou par la route. Il faut donc se déplacer à pied, on marche souvent toute la journée et parfois même la nuit pour ne pas se faire repérer. » L’homme qui s’exprime ainsi, Saw Ohn Mint, un Karen d’une cinquantaine d’années, est l’un des quelque 300 membres de la Backpack Health Worker Team (BPHWT), une association constituée d’auxiliaires de santé appartenant aux diverses ethnies de Birmanie.
Les backpackers, constitués en équipe de deux à quatre personnes, parcourent à pied la jungle du sud-est de la Birmanie pour apporter soins et médicaments aux populations chassées de chez elles en raison du conflit entre le SPDC et les différents groupes qui lui résistent. Elles sont regroupées dans des villages de fortune ou parfois même se cachent dans la jungle. Leur situation sanitaire est désastreuse, et les backpackers risquent leur peau à chaque voyage. Ils sont quasiment les seuls à accéder à certaines régions, interdites par la junte aux organisations internationales. La junte birmane cherche ainsi à isoler ou chasser les populations des zones où existe une rébellion armée. Pour y parvenir, elle brûle les écoles et les centres de santé, détruit les stocks de riz et considère toute aide à ces populations comme une activité hostile. Une personne trouvée en possession d’un poster concernant un régime alimentaire pour femmes enceintes a été arrêtée et torturée. La raison ? Cette affiche lui avait été donnée par les backpackers. L’année dernière, trois villageois travaillant avec eux ont été emprisonnés, et d’autres contraints de signer un document par lequel ils s’engagent à ne pas les aider.
Mines. Les backpackers menacés en Birmanie ont installé leur siège de l’autre côté de la frontière, en Thaïlande, à Mae Sot, surnommée « la petite Birmanie ». Saw Ohn Mint explique : « Avant qu’une équipe ne passe de l’autre côté de la frontière, nous informons les communautés de notre venue, elles savent où est l’armée et nous préviennent. Sans leur aide, nous ne pourrions rien faire. » Malgré les précautions, sept backpackers ont été tués en mission, que ce soit par l’armée birmane ou par l’explosion de mines sur leur passage. La dernière victime, Saw Yei Bu, a été abattue en avril 2006 par l’armée birmane à Paan, dans l’Etat Karen l’un des sept Etats de Birmanie peuplés de minorités ethniques.
Saw Ohn Mynt raconte comment l’un de ses coéquipiers, Myaung Mynt, 35 ans, a été tué en mars 2002 près de Tha Ton, également dans l’Etat Karen. Au cours d’une mission, il s’est retrouvé face aux troupes du SPDC. Il a tenté de fuir, mais les soldats ont tiré, le touchant à la jambe. Après l’avoir interrogé, ils l’ont transporté dans le village et, le lendemain, ils l’ont tué. Aujourd’hui réfugié en Thaïlande, Pu Aye, un Karen originaire du district de Kaw Kareik dans l’Etat Karen a été porteur. Il témoigne : « Nous avions peu à manger, mais de lourdes charges à porter et les marches étaient longues. Ceux qui s’effondraient en cours de route étaient abandonnés, condamnés à une mort probable en raison de l’absence de nourriture et du risque de se perdre dans la forêt. Quand il y avait des mines, nous devions marcher en tête. J’ai vu ainsi un de mes amis perdre une jambe. » Grâce à des questionnaires précis, les backpackers ont évalué le recours au travail forcé dans les zones où ils interviennent : en moyenne, un tiers des foyers déclare qu’un de leurs membres a été recruté de force, mais ce taux peut dépasser 50 % dans les zones contrôlées par le SPDC ou qui font l’objet d’un accord de cessez-le-feu.
Pourquoi Saw Ohn Mint a-t-il choisi d’être backpacker ? « J’étais prof dans l’Etat Karen. En 1979, l’armée birmane s’est mise à tuer les gens dans les forêts et à détruire les écoles. Peut-être croyaient-ils que l’on entraînait les élèves pour être soldat au service de l’Armée de libération karen, pourtant nous étions de simples civils. C’est pour cela que je suis parti. Par la suite, pour venir en aide à mon village et au reste de la population, j’ai retraversé la frontière pour suivre une formation d’auxiliaire de santé dans une zone de l’Etat Karen qui échappait au contrôle du SPDC. » Aujourd’hui, du fait de l’offensive de la junte, la situation côté birman s’est aggravée et cette formation est dispensée à Mae Sot avec le concours de médecins karens et de praticiens occidentaux qui viennent à titre bénévole, dans le cadre d’un soutien accordé par des ONG internationales.
Ravages. Saw Ohn Mint estime que le SPDC s’oppose à toute assistance médicale parce qu’il veut éliminer les Karens : « Le SPDC ne nous tue pas d’abord par le fusil, mais par le paludisme. » Les maladies infectieuses font des ravages avec le paludisme qui frappe 12 % de la population et représentent la première cause de mortalité, loin devant les actes de violence et les mines, posées tant par l’armée birmane que par l’Armée de libération karen.