Portugal : Alain Krivine nous manquera à tous et à toutes
C’est avec une immense tristesse que nous avons appris la mort d ‘Alain. Il était déjà pour nous une légende vivante même avant la fondation de la LCI (Ligue Communiste Internationaliste) en décembre 1973, quelques mois avant la chute de la dictature. Il est venu au Portugal plusieurs fois, pendant la période révolutionnaire et plus tard.
Quand il parlait à des meetings publics, son enthousiasme faisait écho du nôtre et l’amplifiait.
Au long des années, dans les réunions internationales, nous avons appris à mieux le connaître : sa passion pour la révolution, sa détermination pour l’action et aussi son humour.
Nous adressons nos condoléances à sa famille, aux camarades du NPA et à la IVe Internationale.
Alda Sousa, Francisco Louçã, Adriano Campos, Jorge Costa, Heitor de Sousa, Andrea Peniche, Andreia Galvão
(Rede Anticapitalista, Portugal)
Belgique : Alain Krivine était un authentique révolutionnaire internationaliste
Alain Krivine était un militant exceptionnel, totalement investi dans la lutte révolutionnaire dans son pays et sur le plan international. Il avait beaucoup de qualités parmi lesquelles une volonté inébranlable de lutter contre l’injustice, pour l’émancipation sociale et pour la fin de toute forme d’oppression.
J’ai connu Alain Krivine en personne il y a 52 ans en octobre 1970 lors de la conférence pour une Europe rouge organisée à Bruxelles par la IV internationale. Plus de 3000 militant·es de toute l’Europe y ont participé. J’avais 16 ans et je venais d’adhérer à la IV internationale depuis quelques mois. Depuis lors, je suis resté en contact avec Alain et j’ai milité dans la même organisation internationale que lui.
Alain Krivine a apporté un soutien actif au processus de fusion des différentes organisations qui ont constitué en 1971 la Ligue révolutionnaire des travailleurs, section belge de la IV internationale. Il était présent à son congrès en mai 1971 à Liège et est venu à des nombreuses reprises en Belgique pour soutenir les efforts de développement de l’organisation. Il était un très bon orateur et sa contribution au mouvement de mai 1968 était largement reconnue hors des frontières de la France.
Alain Krivine a fortement contribué à l’action de la IV internationale. Il n’a jamais ménagé ses efforts pour qu’en France et ailleurs s’exprime en pratique l’internationalisme des peuples et des opprimée·es. Toujours prêt à participer à une manifestation de solidarité, à contribuer au lancement d’un appel unitaire, à apporter son aide à la réalisation d’une convergence entre mouvements et individus. Toujours disposé à soutenir une lutte ouvrière, à favoriser la coordination entre travailleurs et travailleuses de différents sièges d’une société multinationale.
Il faut ajouter que parmi ses nombreuses actions, Alain Krivine a joué un rôle très actif dans l’organisation de la mobilisation contre l’initiative prise par François Mitterrand pour commémorer le bicentenaire de la révolution française qui avait convoqué en 1989 une réunion des puissances impérialistes à Paris, le tristement célèbre G7. La volonté d’Alain que soit mise sur pied une action collective a abouti à l’énorme succès de la campagne « Dettes, colonies, apartheid ; ça suffat comme ci » le 14 juillet 1989, avec une marche unitaire et un grand concert à la Bastille avec Renaud, Johnny Clegg, les Négresses vertes. Alain Krivine et la LCR agissaient de concert avec le Cedetim, Gilles Perrault, Jacques Gaillot, Renaud Séchan.
Cette initiative basée sur l’appel de la Bastille pour l’annulation de la dette du Tiers monde a contribué à la création en Belgique en 1990 du Comité pour l’Annulation de la dette du Tiers Monde. Depuis lors ce comité devenu Comité pour l’Abolition des dettes illégitimes est devenu un réseau international présent dans plus de 30 pays dont 16 pays africains.
En tant qu’un des fondateurs de ce réseau, je peux témoigner du soutien permanent qui lui a apporté Alain Krivine.
Alain était également très motivé par la solidarité avec la révolution et le peuple cubains. Il ne s’agissait pas d’une solidarité aveugle. La solidarité était critique mais elle n’hésitait pas à soutenir des efforts matériels de soutien face au blocus imposé par l’impérialisme de Washington.
Alain Krivine, jusqu’il y a quelques années, a participé activement aux réunions du bureau de la Quatrième internationale. Il ne s’est jamais replié sur l’activité dans son propre pays. Il a toujours été convaincu que la lutte pour la révolution se déroulait à l’échelle planétaire et qu’il fallait autant que possible renforcer la Quatrième internationale. Il n’a jamais considéré que la Quatrième internationale représentait la seule organisation révolutionnaire internationale. Il savait parfaitement qu’il fallait à la fois la renforcer, l’ouvrir et favoriser des regroupements. C’est notamment pour cela qu’il a mis beaucoup d’énergie dans les efforts de créer un cadre commun entre organisations anticapitalistes à l’échelle européenne dans leur diversité. Ce travail est indubitablement à reprendre au moment où une nouvelle guerre est en cours sur le sol européen. Alain Krivine a consacré beaucoup d’énergie au soutien apporté aux camarades qui ont constitué en Russie il y a plusieurs années la section de la Quatrième internationale et qui se battent aujourd’hui contre l’impérialisme de Poutine.
Sur le plan personnel, j’ai toujours apprécié les grandes qualités humaines d’Alain dans les petits détails comme dans les grands, dans les bons moments comme dans les situations difficiles. Il était en outre toujours prêt à essayer de répondre à une demande d’information sur les luttes en cours en France, sur l’action du NPA, disponible pour communiquer une adresse utile pour l’action, prêt à fournir un coup de main pour faciliter un contact, chercher à remonter le moral quand on était dans le doute.
Alain était un grand ami, un grand révolutionnaire, un grand camarade.
Éric Toussaint, membre du bureau de la IV internationale
Ma mère et mes tantes ne connaissaient rien à la politique, mais...
Je ne pourrai pas aller aux obsèques d Alain. Je suis en province et je comptais revenir à Paris pour y assister mais je suis malade.
Je me souviens de Krivine lorsqu’il s est présenté aux présidentielles. Mes deux tantes qui étaient venues d Espagne en visite étaient chez mes parents. j’avais 16 ans. Leur père qui était aussi le père de ma mère avait été fusillé pendant la guerre civile. Comme tant d autres, il est dans une fosse... Mais il faisait partie d’une minorité originale en Espagne : il était trotskyste ! Ma mère et mes tantes ne connaissaient rien à la politique mais pour elles un trotskyste a forcément raison ! Elles étaient émues et enthousiaste en entendant Alain ; elles ne comprenaient rien de ce qu’il disait, je traduisais un peu mais ce n était pas la peine : elles applaudissaient a tout rompre ! Et on était tous très contents.
Quelques années plus tard, pendant les procès de Burgos, le POUM, qui était le parti de mon père, a manifesté sous son propre drapeau. Ils ont été très applaudis. Je me souviendrais toujours que la Ligue leur a servi de SO et je reverrais toujours Krivine parmi les militants présents. Sur le moment je n y ai pas prêté tellement d attention, j’étais jeune, mais maintenant ça me touche terriblement.
Bref pour te dire que Krivine c était quelqu’un !
J’irai à l’hommage.
Olga Balaguer
Un engagement algérien
Les obsèques d’Alain Krivine, militant du NPA (France)et de la 4 internationale, ce lundi 21 mars coïncide avec la commémoration, en Algérie et en France, des accords d’Evian qui ont vu l’accession de l’Algérie à son indépendance.
Cette coïncidence nous rappelle le rôle et la place qu’a eu le combat des algériens(ennes) pour leur souveraineté dans la vie militante de Krivine.
C’est en pleine guerre d’Algérie, 1957/58, alors qu’il s’est retrouvé à Moscou, membre d’une délégation de jeunesse communiste (PCF), qu’il fait la connaissance d’un délégué algérien du FLN. Il rentre en contact direct avec le combat engagé par les Algériens(ennes). Il ne comprenait pas les réticences de « Moscou » et du PCF face à ce combat.
Ce sera le début d’une radicalisation qui va l’emmener à rompre avec « Moscou » et toute la tradition stalinienne. Il soutient sur le moment les positions du délégué du FLN. Il rejoint plus tard toutes les actions en faveur de l’émancipation de l’Algérie, en aidant les « porteurs de valises », en activant pour la désertion des soldat appelés à combattre en Algérie….
Il restera toute sa vie militante à l’écoute de ses « camarades » algériens(ennes), et leurs combats démocratiques notamment dans des grands moments, en Avril 80, en octobre 88, en 2001 jusqu’au récent « Hirak ». Il n’hésite pas une seconde pour donner de son temps à tout (e) « camarade » algérien pour un café, une rencontre, un hébergement, une lettre d’invitation, voire une intervention ne serait-ce que symbolique auprès des autorités françaises pour obtenir un visa … ou juste les aider à passer des vacances en France.
Merci pour tout. Ce sont là quelques lignes aux algérien(ennes) qui les liront pour se rappeler de ce nom, Alain Krivine et sa relation avec l’Algérie.
Nadir Djermoune
L’Humanité et Krivine en 1971, pour le centième anniversaire de la Commune de Paris.
Je me souviens bien de cet épisode. J’avais 17 ans et étais membre de la direction du syndicat lycéen UNCAL (proche de la Jeunesse Communiste). Les membres du bureau national, presque tous membres de la Jeunesse Communiste, étaient impressionnés par la manifestation et chuchotaient entre eux. Je leur avais dit naïvement : « Mais on s’en fiche, c’est les gauchistes, ils ne représentent rien ! ». Et les fidèles du parti communiste m’avaient répondu : « Malheureusement, si, il y avait 30.000 personnes à la manifestation, surtout des jeunes, cela nous inquiète beaucoup ».
Mais cette « inquiétude » ne transparaît nullement dans l’article de l’Humanité, qui ne dit pas une seule fois qu’il s’agissait du 100e anniversaire de la Commune de Paris.
Trois ans après, je rejoignais la LCR.
Très amicalement,
Michel Cahen
Aubervilliers 1998
Photo prise à Aubervilliers en 1998, à l’occasion d’un rassemblement de la LCR pour les 30 ans de mai 68.
De gauche à droite Henri Krazucki, X ?, Alain Krivine, Josette Trat, Daniel Bensaïd.
J’ai quelques autres photos, qui comme celle-ci ne sont pas de très grande qualité.
Adieu de Brest
André Garçon
Bonjour,
A quelques jours de l’hommage qui va être rendu à la Mutualité à Alain Krivine, je me joins aux nombreux messages déjà envoyés.
Très touché, comme des milliers de militant.e.s révolutionnaires à travers le monde qui ont rencontré et connu Alain Krivine, je m’associe à la tristesse de ses proches. Nous sommes beaucoup à avoir partager avec lui des réunions, des manifs, des échanges toujours chaleureux.
Infatigable, il a parcouru des centaines de fois le monde, et notre pays pour aller donner un coup de main aux groupes et aux équipes militantes dans les villes les plus éloignées.
Combien de fois, il est venu dans la Bretagne qu’il aimait bien, tenir des réunions à Brest, Quimper ou Carhaix ?
Pour illustrer cette disponibilité d’Alain, un article de Ouest-France du 14 février 1985, pour un meeting aux côtés de son vieil ami André Fichaut, le journaliste titrait : « Le battant de la Ligue ».
Une autre photo, lors de sa venue à Brest le 2 juillet 2009, accompagné de Janette Habel, Olivier Sabado, Catherine Samary, François Rippe et Olive. C’était justement à l’occasion du dernier hommage à notre camarade, André Fichaut, un grand ami d’Alain et l’un des animateurs de la grande grève victorieuse d’EGF Brest en 1972, grâce à son comité de grève.
Adhérent à la Quatrième depuis 1973, j’ai bien sûr partagé de très nombreux combats et campagnes politiques avec Alain Kristine. Nous nous sommes côtoyés dans de nombreuses réunions, congrès, universités d’été …
Déterminé, convaincant, pédago, Alain aura contribué à former des générations de militant.e.s. pour changer le monde.
Nous essayerons de poursuivre son combat !
Adieu, cher camarade !
André GARÇON (Brest)