Cette classe politique, de l’extrême droite au Parti socialiste, derrière le porte-étendard Macron, a nié le droit d’un peuple à disposer de lui-même en s’appuyant entièrement sur le « droit » du plus fort (2000 gendarmes supplémentaires envoyés sur place), et sur une novlangue hélas entérinée par l’essentiel des médias.
Crédit Photo. DR.
De quoi s’agit-il en effet ? Le troisième référendum d’autodétermination de la Nouvelle-Calédonie, prévu par les accords de Nouméa en 1998, a été avancé d’un an unilatéralement par le gouvernement français, reniant la promesse faite en 2020 par l’ancien Premier ministre Édouard Philippe. Il a été maintenu contre la prégnance de la crise sanitaire du Covid-19, empêchant le peuple kanak et l’ensemble des populations océaniennes de respecter les deuils rituels et de mener une campagne pluraliste et démocratique. Le référendum a été maintenu malgré la prise de position de l’ensemble des organisations politiques, associatives, syndicales et les structures coutumières kanakes de non-participation à une consultation aussi faussée et mal à propos, position rejointe par une bonne partie des organisations océaniennes. Il n’y a donc eu de campagne que pour le « Non », marquée par des arguments jusqu’au-boutistes et des clips carrément racistes.
Le résultat est sans appel : la participation ce dimanche a été quasiment divisée par deux par rapport au précédent référendum, n’atteignant que 44% contre 86% en 2020. Dans les provinces majoritairement à population kanake, la participation n’atteint que 16,6% dans la province Nord, et 4,5% dans les îles Loyauté. Ce n’est que dans la province Sud, celle de Nouméa où la colonisation de peuplement a été la plus marquée, que la participation dépasse — de peu — les 60%. Dans ce contexte, que valent les 96% de « Non » à l’indépendance et à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie ?
Face à un tel constat électoral n’importe où ailleurs, les commentateurs en France concluraient que la non-participation à ce point massive du peuple colonisé rend inopérant le résultat du scrutin. Mais ici, on assiste à un retour éclatant du refoulé colonial. La présidente de la province Sud et chef de file des « loyalistes », Sonia Backès a proclamé : « Les rêves tristes de l’indépendance se sont brisés. […] Nous avons décidé en notre âme et conscience de rester français […]. Ce n’est plus négociable. Et c’est ça le sens de l’Histoire ».
Quant au président-démiurge Emmanuel Macron, son allocution est un chef-d’œuvre d’hypocrisie et de fermeture à double tour de toute perspective décolonisatrice. En déclarant que « les Calédoniennes et Calédoniens ont décidé de rester français, ils l’ont choisi librement. […] Ce soir, la France est plus belle car la Nouvelle-Calédonie a décidé d’y rester ! », se disant par ailleurs « fier de ce cheminement inédit et pacificateur » ouvrant une période « libérée de l’alternative binaire entre le oui et le non », Macron insulte la réalité de la situation que vivent les Kanak et d’autres parties de la population de l’archipel, ajoutant l’insulte au mépris en retournant une formule kanake contre son sens profond pour prétendre accueillir le résultat avec « respect et humilité ». Cela nous rappelle ses discours sur la « bienveillance » accompagnant la répression des Gilets jaunes et la destruction des services publics… Face au concert de réactions allant dans le même sens, nous sommes plus qu’inquiets du sort qui atteint le peuple kanak refusant d’entériner une telle parodie de consultation.
Nous appelons donc l’ensemble des forces attachées à la démocratie et au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, au rejet de toute légitimité au « référendum » du 12 décembre, à la solidarité avec le peuple kanak face à cette nouvelle offensive coloniale, et au refus de toute tentative de répression de ses aspirations.
NPA, Montreuil, le 12 décembre 2021