Ce sommet est devenu au fil des ans “un rendez-vous incontournable pour la coopération entre l’Afrique et l’empire du Milieu” note le titre sénégalais Le Soleil. Malgré la pandémie, la cérémonie d’ouverture a été placée sous la double égide des chefs de l’État sénégalais et chinois, Macky Sall et Xi Jinping, ce dernier intervenant par visioconférence.
C’est la huitième édition de ce forum, qui avait été lancé après une première conférence ministérielle organisée en octobre 2000 à Pékin. Sur le papier, le thème de cette rencontre se donne pour but d’“approfondir le partenariat sino-africain et [de] promouvoir le développement durable pour bâtir une communauté d’avenir partagé entre la Chine et l’Afrique”.
Et le quotidien sénégalais d’énumérer, en citant “une source diplomatique chinoise”, les acquis déjà nés de cette coopération africaine et chinoise : projets d’énergies propres et de développement vert pour soutenir le développement de l’énergie solaire et éolienne, développement de l’économie numérique avec notamment le datacenter national, soutenu technologiquement par la Chine et qui devrait jouer “un rôle important dans la transition numérique du pays” note Le Soleil.
À l’occasion de ce sommet, des annonces ont déjà été faites par le directeur général du département des Affaires africaines du ministère chinois des Affaires étrangères. La Chine élargira ainsi la liste des produits bénéficiant d’un traitement tarifaire spécifique pour les pays les moins avancés (PMA) ayant des relations diplomatiques avec la Chine, dans le but d’atteindre 300 milliards de dollars (266 milliards d’euros) d’importations totales en provenance d’Afrique au cours des trois prochaines années. De même, le président chinois, Xi Jinping, a annoncé que la Chine ouvrirait ce qu’il a appelé des “voies vertes” afin de faciliter les exportations agricoles africaines vers la Chine.
Autre engagement chinois, offrir à l’Afrique un milliard de doses de vaccin contre le Covid-19. Le dirigeant chinois a déclaré que la Chine donnerait directement 600 millions de doses. Les 400 millions de doses supplémentaires proviendraient d’autres sources, comme les investissements dans des sites de production du vaccin, indique le site nigérian Punch.
China will further increase the scope of products enjoying zero-tariff treatment for the least developed countries (LDCs) having diplomatic relations with China, in a bid to reach 300 billion US dollars in total imports from Africa in the next three years.#FOCAC2021
— 吴鹏 Wu Peng (@WuPeng_MFAChina) November 29, 2021
La dette, le prix à payer
Pourtant, certaines voix s’élèvent en Afrique pour souligner que le prix à payer de la présence en Afrique est aussi celui d’une dette qui pèse sur les économies africaines fragiles. The East African note ainsi que l’ambitieux projet chinois de route de la soie, dont les États africains ont pensé bénéficier en obtenant des prêts commerciaux pour le développement de leurs infrastructures, est revenu “hanter certains des bénéficiaires” qui sont désormais confrontés au surendettement.
L’Ouganda a pu faire les frais de cette politique chinoise rapporte le Guardian Nigeria. Le pays avait en effet contracté auprès de la banque chinoise, Exim China, un prêt de 207 millions de dollars (183 millions d’euros). Mais en raison de “clauses toxiques” du contrat de prêt, note le site nigérian, il est très vite apparu que l’accord signé avec le créancier chinois signifiait “pratiquement que l’Ouganda avait ‘cédé’ son principal et unique aéroport international”. L’aéroport d’Entebbe est en effet le seul aéroport international ougandais et accueille plus de 1,9 million de passagers par an. Le pays avait bien tenté de renégocier les clauses toxiques du prêt initial, avec notamment l’envoi d’une délégation en Chine, mais Pékin avait rejeté ses demandes.
Au Kenya, note The East African, la nouvelle de la mésaventure ougandaise a été accueillie “avec une impression de déjà-vu”. En mars 2021, Nairobi avait rejeté certaines informations selon lesquelles le pays avait hypothéqué le port de Mombasa pour obtenir un prêt auprès d’Exim China de 3,2 milliards de dollars (2,84 milliards d’euros) pour la construction d’un chemin de fer.
Autre cas rapporté par le site est-africain, celui de la Zambie, où la dette accumulée envers les prêteurs publics et privés chinois s’élève à 6,6 milliards de dollars (5,86 milliards d’euros). Soit près du double du montant reconnu officiellement par les autorités, 3,4 milliards de dollars (3 milliards d’euros), indique African Business. Une dette qui pèse sur un pays en pleins pourparlers avec le FMI et la Banque mondiale pour un plan de sauvetage de son économie.
En septembre dernier, CNBC publiait une étude selon laquelle l’initiative chinoise dite des “nouvelles routes de la soie” avait amené des dizaines de pays en développement à accumuler 385 milliards de dollars (341 milliards d’euros) de “dettes cachées” envers Pékin.
Cette vision est contestée par la Chine. The East African rapporte ainsi les propos de Wu Jianghao, ministre adjoint chinois des Affaires étrangères, qui aurait déclaré que le discours sur le piège de la dette chinoise en Afrique était “de la propagande”. “Pourquoi l’argent offert par les pays occidentaux aux pays en développement est-il considéré comme de l’‘aide au développement’ alors que l’argent offert par la Chine est qualifié de ‘piège de la dette’ ?” interroge-t-il via les réseaux sociaux.
“Why is money offered by Western countries to developing countries considered ‘assistance for development’, while the money offered by China is labelled as ‘debt trap’ ? This view is NOT logic or correct !”, said Wu Jianghao, Assistant Minister of Foreign Affairs, China pic.twitter.com/ErKkHWJ43N
— Chinese Embassy in Uganda (@ChineseEmb_Uga) November 26, 2021
Courrier International
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